Et OTAN en emporte le divan ?
Officier d'élite à la carrière irréprochable, poète et mondain, le commandant Lerou, en poste à Oslo comme observateur au quartier général Nord-Europe de l'OTAN, est soupçonné d'avoir divulgué aux Russes un document concernant les modifications dans le statut de la Norvège à l'OTAN. Cependant personne n'imagine Lerou dans le rôle du traître.
Sa vie, sa carrière, son caractère démentent les accusations et ses proches le défendent contre vents et marées. Seulement il a disparu.
Jordan est chargé non seulement de retrouver le commandant mais également de démasquer le traître. A Oslo il prend contact avec Gravier, un permanent établi en Norvège depuis la bataille de Narvik et installé comme restaurateur. A peine arrivé dans la capitale norvégienne, Jordan reçoit à son hôtel une missive anonyme lui donnant rendez-vous dans le Fram (bateau-musée avec lequel l'explorateur Nansen a effectué une expédition dans la banquise Nord en 1893-1895). Quoi que devant s'y rendre seul, il demande à Gravier d'assurer ses arrières, précaution qui porte ses fruits puisque l'agent du SDECE est agressé.
Jordan demande au lieutenant-colonel Dumont, attaché d'ambassade et fervent défenseur de Lerou, d'organiser une rencontre avec Danuta, la femme du commandant, d'origine polonaise. Danuta est une séduisante brune imprégnée du messianisme polonais, reliquat de ses années d'adolescence et Jordan doit le retrouver chez elle, car elle se refuse à dîner au restaurant avec lui, par peur des rumeurs.
Entré en fraude chez les Lerou, à la recherche d'il ne sait trop quoi, Jordan est frappé par la disposition des livres sur une étagère. Eberlué il comprend que les initiales des titres des quatre premiers volumes ainsi que des quatre derniers dorment un mot : Kari. Gravier lui en donne la clé, c'est un prénom féminin. Jordan suppute alors au commandant une liaison hors mariage.
Le colonel Dumont lui apprend que la principale secrétaire du service des traductions, une certaine Kari Maslov dont le père était Russe, a été découverte morte, assassinée, ou suicide. Or seul Gravier était dans la confidence selon laquelle Jordan était sur les traces d'une dénommée Kari, et l'annonce de sa mort semble l'affecter. Danuta lui propose d'aller déjeuner dans un endroit calme à Hollmonkollen, lieu de promenade et de sport. Au cours de leur balade, Il essuie un coup de feu qui le blesse. Il ne doit la vie sauve qu'à l'intervention de Gravier.
De cette histoire qui tire son origine de la guerre, de l'Occupation de la Pologne, on retiendra surtout le geste de Danuta qui obéit à une vengeance réveillée vingt ans après, à cause d'enjeux politiques, et à celui de Lerou, endossant les crimes de sa femme, témoignage d'un esprit chevaleresque plus dans la mouvance romantique du 19e siècle que celle matérialiste de nos jours.
Une fois de plus Maxime Delamare cite de nombreux auteurs littéraires, La Rochefoucauld, Orson Welles, Jacques Perry, Malaparte, les égratignant ou les encensant au passage. Le bouquet étant cette référence à Pierre-Hyacinthe Azaïs qui affirmait, vous le savez, que le hasard compense toujours des écarts anormaux par des écarts en sens contraire, et, par exemple, de graves malheurs par des périodes de réussites incroyables.
Curiosité :
OTAN pour les crosses est un roman d'espionnage mais nous avons droit à un problème en chambre close, prestation que n'aurait pas désavoué John Dickson Carr.
Citation :
Mais, dans un roman, un agent spécial qui partirait en mission par le chemin de fer, ça ferait sourire de pitié les lecteurs.
Maxime DELAMARE : O.T.A.N. pour les crosses. Série Noire N°1053. Parution avril 1966. 192 pages.