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Bienvenue dans la petite revue de la littérature populaire d'avant-hier et d'hier. Chroniques de livres, portraits et entretiens, descriptions de personnages et de collections, de quoi ravir tout amateur curieux de cette forme littéraire parfois délaissée, à tort. Ce tableau a été réalisé par mon ami Roland Sadaune, artiste peintre, romancier, nouvelliste et cinéphile averti. Un grand merci à lui !

Marie NEUSER : Je tue les enfants français dans les jardins.

Bonjour monsieur le professeur...

Marie NEUSER : Je tue les enfants français dans les jardins.

Souvenez-vous, à l'appel dans la cour, les élèves se rangeaient deux par deux et interdiction de parler dans les rangs. Pour s'exprimer en classe, il fallait d'abord lever le doigt. De nos jours la configuration a bien changé. Les collégiens se conduisent comme des électrons libres et l'enseignant a bien du mal à se faire entendre et imposer une certaine discipline.

Jeune professeur d'italien, Lisa peine à se faire respecter dans sa classe de troisième. Seule Samira lui offre des petites satisfactions, le plaisir de corriger ses copies, auxquelles elle met invariablement un 20/20, des notes méritées. Samira est arrivée en France elle avait quinze ans, aujourd'hui elle en a dix-huit et a assimilé la langue française en bûchant car elle n'en possédait aucune bribe lors de son entrée à l'école. Samira travaille, quand elle peut, car dans sa famille elle doit s'acquitter des tâches ménagères en esclave moderne.

Samira est la seule à ne pas participer au chahut général qui règne dans la classe, mise à l'index par les perturbateurs. Malik, Andrami, Marel, Noumein... Les trublions qui ne se contentent pas d'être les agitateurs patentés, mais se comportent en véritables provocateurs, et même en petits dictateurs en puissance. Par exemple Malik ou Andrami qui font la loi chez eux, n'ayant pas peur de tabasser leurs génitrices.

Aussi Lisa se rend à son établissement presque à reculons, angoissée par ce qui l'attend. Pierre, son mari est au calme dans la librairie où il travaille, et s'il sait les vexations, les affronts, les humiliations que Lisa subit, il n'y peut pas grand chose.

Ce matin là, lorsqu'elle arrive sur le perron du collège, le CPE attend Lisa de pied ferme. L'agent de service s'est plaint : quelqu'un a uriné dans la poubelle. Lisa n'entend pas se laisser faire et le CPE est obligé de tenter de découvrir le coupable lui-même. Tâche trop ardue et il consigne la classe. Le lendemain Lisa est la risée de Malik and Co via un dessin pornographique.

Ses collègues sont à même enseigne. Certaines ont beau afficher un tempérament de dresseurs de monstres, il ne s'agit que d'une façade d'orgueil. D'autres ont passé l'âge d'être importunées, pas comme Lisa. La rançon de la joliesse.

Mais les filles ne valent guère mieux que leurs condisciples masculins. Elles affichent avec fierté leur poitrine, se prennent pour des top-modèles et goutent déjà aux jeux des grandes personnes, sans culotte et sans honte, entre deux voitures avec des hommes qui pourraient être leurs pères. L'apprentissage de la vie non décrit dans les manuels scolaires. Et que ne ferait-on pas pour s'acheter des fringues de marque, des gamines devenues femmes-sandwich.

Racket, inceste, brutalités, sans oublier les suicides pour se soustraire à des mariages forcés. Elle est pas belle la vie ?

Ceci n'est qu'un roman, mais on ne peut s'empêcher de penser que tout n'est pas sorti de l'imagination de l'auteur et qu'elle a vu, connu, entendu la plupart des protagonistes, des incidents, des épisodes décrits dans ce livre. Des anecdotes qu'elle a grappillé ici et là, en leur donnant une forme romanesque. D'ailleurs, la traditionnelle petite mise en garde selon toute ressemblance avec des personnes ou faits réels seraient purement fortuite... n'apparait pas en prolégomènes.

Un roman dur, âpre, poignant et qui bouleverse. Le petit monde de l'éducation est malmené dans tous les sens mais ce n'est pas la première fois que ce sujet est traité. J'ai retrouvé cette ambiance sur le thème de la violence entre adolescents et professeurs, peut-être pas de façon aussi paroxystique, qui était déjà abordée et décrite dans Graine de violence (Blackboard Jungle) signé Evan Hunter, plus connu en France sous l'alias d'Ed McBain, un roman adapté au cinéma par Richard Brooks en 1955.

Plus proche de nous Corinne Bouchard préfère parler des problèmes éducatifs avec un humour incisif et caustique dans La vie des charançons est assez monotone puis La vie des charançons deviendra poétique.

 

Quant au titre il renvoie à un fait divers relaté par le Petit Journal du 29 avril 1906.

 

De Marie Neuser lire également le très beau roman Un petit jouet mécanique paru en 2012 aux éditions de L'Ecailler.

 

Une chronique à lire également sur Action Suspense de Claude Le Nocher.

 

Marie NEUSER : Je tue les enfants français dans les jardins. Editions Pocket N° 15545 (réédition de l'Ecailler - 2011). Parution le 11 septembre 2014. 160 pages. 5,30€.

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L
Je vais plutôt me diriger vers Corinne Bouchard.<br /> Amicalement<br /> Le Papou
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O
C'est un bon choix Papou, mais encore faut-il pouvoir trouver les ouvrages...<br /> Amitiés
P
Bonjour Paul<br /> Tous ces commentaires ne peuvent donner qu'une envie , c'est de le lire ...<br /> Je note aussi...:(...<br /> Amitiés et bon samedi....
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O
Et comme il vient de ressortir en format poche...<br /> Amitiés et bonnes lectures Patrick
L
Je viens de lire le post de Pierre. j'ignorai qu'il avait fait scandale à sa sortie ce livre. En tout cas je le trouve bien tentant, rien que le titre m'attire :) l'occasion de decourir un auteur que je ne connais pas encore!
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O
Bonjour Bruno<br /> Disons que certains ne comprenaient pas la démarche de l'auteure bien calfeutrés dans leur petites villes ou quartiers tranquilles et bourgeois. Mais il faut voir plus loin que le bout de son nez et ne pas dire que cela n'existe pas parce que chez soi cela ne se passe pas ainsi. Un roman à lire et à réfléchir.<br /> Amitiés
P
Salut Paul, que l'on adhère ou pas au propos, ce livre est et reste un roman, et doit être lu comme tel. Il a fait un peu scandale à sa sortie, et moi même, j'ai été secoué. Quel choc ! Un livre pour reflechir c'est suret la découverte d'une auteure de grand talent ! Amitiés
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O
Bonjour Pierre<br /> Oui ce livre est un roman mais parfois la réalité dépasse la fiction. Et je pense sincèrement que Marie Neuser a glané quelques anecdotes afin d'établir son propos. Mais j'avoue que ce qu'il se passe dans ce roman n'est pas à élargir à toutes les structures de l’Éducation Nationale. A Neuilly par exemple, il ne peut y avoir de tels débordements. <br /> Amitiés