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2 septembre 2020 3 02 /09 /septembre /2020 03:41

Trompette de la renommée…

Michel BOUJUT : Souffler n’est pas jouer.

Le jeu, c’est aussi une façon de communiquer avec son prochain, de lui faire partager des sentiments. Mais dans le cas que je vais vous évoquer, il ne s’agit plus du jeu tel que décrit ci dessus, mais de musique, dans un roman qui ne manque pas de souffle. Guest star, comme on dit au cinéma, Louis Armstrong. Année de référence, 1934. Lieu, la France, principalement Paris et sa région, mais également Le Havre et la frontière suisse. Le thème, l’argent, bien évidemment, ou plutôt la corruption.

Attention, ce mot n’est pas écrit, mais c’est tout comme. Louis Armstrong s’est séparé de son agent et celui-ci, affilié avec la Mafia, n’a pas apprécié ce congé venant de la part d’une vedette internationale, d’autant que son poulain n’est pas de race blanche. Alors il lance sur les notes du trompettiste un duo d’affreux jojos dont la mission est d’opérer un kidnapping, histoire de montrer au musicien qui commande. Commence une histoire qui va entraîner les deux ravisseurs dans une course poursuite qui deviendra une cavale.

La reconstitution d’une époque où le jazz prenait son envol, accueilli en France comme une musique évolutive, les divers personnages qui émaillent le parcours tels que Joséphine Baker, Hugues Panassié, Robert Desnos, Henry Miller, Howard Hugues ou encore Boris Vian adolescent, insufflent à ce court roman picaresque une note musicale harmonieuse, joyeuse et triste à la fois, comme seuls savent les musiciens de jazz exprimer leurs sentiments à l’aide de leurs instruments.

Michel Boujut est un fin connaisseur et il s’est amusé, pour son plus grand plaisir et celui du lecteur, à imaginer un avatar à l’une des plus grandes stars de la musique, avatar qui est en même temps un divertissement. Un régal.

Michel BOUJUT : Souffler n’est pas jouer. Collection Rivages Noir N°349. Editions Rivages. Parution 2 février 2000. 156 pages.

ISBN : 978-2743606015

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1 septembre 2020 2 01 /09 /septembre /2020 03:51

Loft story…

Luis ALFREDO : Téléréalité.

Pour le commandant René-Charles de Villemur, cette soirée aurait dû se dérouler comme les autres. Dans le calme et la sérénité, avec ses pensées vagabondes et mortuaires.

A partir de 19h30, la télévision est éteinte, et il préfère choisir un livre au hasard dans sa monumentale bibliothèque, placer un CD dans le lecteur, déguster un verre et un cigarillo. Et ses idées vagabondent, revoyant les morts qui jalonnent son parcours amoureux. Christian, son ami-amant avec lequel il a vécu deux ans, leur séparation et la découverte de son cadavre sur une plage landaise, ou encore Patricia dont il avait fait la connaissance lors de la traque d’un serial-qui-leurre, Patricia qui s’est suicidée. Il pense également à Joan Nadal, le détective parti à Lourdes pour régler une affaire de cocufiage confiée à lui par un mari jaloux.

Le téléphone l’arrache à ses pensées négatives. D’abord Patrick, le journaliste, qui l’informe qu’il se rend immédiatement à Lourdes, un reportage sur un mort tombé du haut de la Basilique et retrouvé parmi les cierges une dizaine de mètres plus bas. Les cierges ont-ils résisté à cette chute, l’histoire ne le dit pas.

Nouvel appel téléphonique, émanant cette fois-ci de son adjoint Octave avec lequel il fait ses gammes depuis dix ans. L’affaire est sérieuse. Une concurrente d’une émission de téléréalité a été découverte morte, un poignard dans le cœur. Dwelling s’appelle cette émission culturelle suivie par des millions de téléspectateurs qui se délectent à regarder les évolutions d’une bande de jeunes au physique hollywoodien confinés dans une demeure aménagée exprès pour cette étude sociale.

Cette demeure (dwelling en français) se situe à une dizaine de kilomètres de Toulouse (pour la candidate, c’est to loose !) aux portes de Muret, dans un ancien restaurant. Géraldine, la concurrente, a été retrouvée morte dans les toilettes, un poignard dans le cœur. Et les cabinets d’aisance n’étaient pas fermés de l’intérieur !

 

Débute pour le commandant Villemur, une enquête en local clos avec tout ce que cela implique d’interrogations et de démarches parfois inutiles.

René-Charles de Villemur se fait d’abord expliquer les règles du jeu auprès de la productrice déléguée, du réalisateur, du psychiatre de service, de quelques concurrents. Géraldine aurait dû depuis longtemps quitter cette résidence, mais le vote des téléspectateurs l’avait à chaque fois repêchée. Et il apprend également que les séquences montrées à la télévision ne reflètent pas forcément la réalité, car il faut du gratiné pour entretenir le suspense et surtout capter l’attention du public, sinon c’est la désaffection, et donc une perte irrémédiable de recettes publicitaires.

Et il hésite entre conclure à un meurtre, certains des candidats n’appréciant guère leur compagne de réclusion, volontaire au départ, ou à un suicide. Mais le suicide n’est guère envisageable car la poignée du couteau a été soigneusement nettoyée. De plus certaines séquences enregistrées ont été effacées, et d’autres caméras, dont celle placée dans les WC, sont factices.

Une enquête résolue en quelques heures par le commandant et son adjoint, mais cette intrigue n’est pas le seul intérêt de cette histoire. Le lecteur découvre les coulisses de ce genre d’émission de téléréalité suivie par des millions de téléspectateurs-voyeurs et se rend compte que le sensationnel prime sur la vérité.

Il est dommage que Luis Alfredo se complaise à cette mode abêtissante de l’utilisation d’un vocabulaire anglo-saxon, le mot dwelling et ses déclinaisons étant assénés à longueur de pages alors qu’il possède ses équivalents en français. D’autant que Villemur se montre quelque peu vieille France avec son nœud papillon, son couvre-chef mitterrandien et ses cigares dont il se délecte dès la nuit tombée, ses vis-à-vis profitant souvent des émanations fumigènes nocives.

Luis ALFREDO : Téléréalité. Itinéraire d’un flic. Saison 2, épisode 1. Collection Noire Sœur. Editions SKA. Parution 24 août 2020. 96 pages. 2,99€.

ISBN : 9791023408256

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31 août 2020 1 31 /08 /août /2020 08:31

Un roman wagnérien ?

Edmund CRISPIN : Prélude et mort d’Isolde

Isolde possède le don d’agacer son entourage. En réalité, c’est une enquiquineuse, pour ne pas employer un mot plus trivial mais qui la qualifierait d’une façon plus juste.

Tous ceux qui la côtoient pensent, parfois tout haut, qu’un jour, un mauvais plaisant pourrait lui apprendre les bonnes manières en l’envoyant ad patres. Aussi bien les hommes que les femmes.

D’ailleurs c’est l’unanimité parmi les représentants des deux sexes pour la vouer aux gémonies. De sa demi-sœur Helen qu’elle déteste, en passant par les acteurs d’une troupe théâtrale d’Oxford, jusqu’à son ex-amant, l’auteur de la pièce dans laquelle elle doit jouer un rôle insignifiant.

Pourtant, lorsqu’elle est découverte morte, avec un pistolet à la main, la police conclut à un suicide.

Hypothèse rassurante mais non partagée par Gervase Fen, un professeur de littérature anglaise à Oxford qui joue les détectives à ses heures perdues.

Faut avouer qu’il ne connait pas l’échec, d’ailleurs il ne le supporterait pas.

 

Ce roman d’Edmund Crispin est délicieusement rétro et classique.

Des personnages hauts en couleurs, une ambiance théâtrale assaisonnée d’une pincée de jalousie et d’un soupçon de sexe, quelques réparties humoristiques, font de ce roman un agréable passe-temps.

Edmund CRISPIN : Prélude et mort d’Isolde (The Case of the Gilded Fly ou Obsequies at Oxford – 1944. Traduction de Jean André et Claudine Rey). Le Masque Jaune N°1935. Librairie des Champs Elysées. Parution 26 octobre 1988. 222 pages.

ISBN : 978-2702418451

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29 août 2020 6 29 /08 /août /2020 04:05

Ric Hochet est orphelin : après Tibet en 2010, André-Paul Duchâteau est décédé le 26 août 2020

André-Paul DUCHÂTEAU : Crimes par ricochet.

Si André-Paul Duchâteau est le scénariste de la célèbre bande dessinée ayant pour héros Ric Hochet, il ne faut pas oublier qu’il a écrit quelques romans et nouvelles dont les savoureux Palmarès pour cinq crimes, Mourir à Angoulême, La vieille dame à la poupée, ou encore De cinq à sept avec la mort, maniant le noir et l’humour avec un réel bonheur et un talent incontestable.

Et cette association d’humour et de noirceur on la retrouve dans Crimes par ricochet, titre clin d’œil à son personnage fétiche.

Ceux qui ont apprécié l’exercice de style de Palmarès pour cinq crimes, incursion de nouvelles dans la trame du récit (ce qui n’est pas sans rappeler certaines œuvres de Dickens dont l’inénarrable Monsieur Pickwick) prendront un vif plaisir à découvrir cet ouvrage d’André-Paul Duchâteau.

L’auteur ne se contente pas d’associer dix nouvelles disparates comme le font bon nombre de romanciers, mais il les relie par un fil conducteur, lui-même nouvelle dont la chute, sinon prévisible, est fort bien amenée gardant le suspense jusqu’au bout.

Mais André-Paul Duchâteau s’amuse et se pirate, reprenant deux nouvelles déjà utilisées dans Palmarès pour cinq crimes, Carambolages et Chambre noire, les réécrivant et les améliorant tout en gardant l’intrigue.

 

André-Paul Duchâteau sans Tibet, ce serait un peu comme un festival polar sans auteurs de romans policiers.

Aussi nous retrouvons le dessinateur de Ric Hochet, le complice de toujours, apportant sa touche personnelle pour la présentation, le coup d’envoi de chaque chapitre-nouvelle.

A noter l’amicale préface de François Rivière, lui-même romancier scénariste et critique.

André-Paul DUCHÂTEAU : Crimes par ricochet. Collection Attitudes. Claude Lefrancq éditeur. Couverture Gisèle Simon. Illustrations intérieures de Tibet. Parution 1991. 176 pages.

ISBN : 978-2871530633

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25 août 2020 2 25 /08 /août /2020 04:48

Si tu ne vas pas à l’aventure, l’aventure viendra à toi…

Henri VERNES : Trafic aux Caraïbes.

En villégiature à Port-au-Prince, Bob Morane et son ami Bill Ballantine ont loué une villa située sur les hauteurs de la ville. Mais l’aventure guette nos héros. Elle vient à eux sous la forme d’une silhouette s’introduisant nuitamment dans le garage.

Il s’agit d’un individu du nom de Phil Jourdan, qui désirait se venger de l’actuel propriétaire, un certain Mathias Van Horn, qui l’a fait inculper pour un meurtre qu’il n’a pas commis. Aussi s’était-il mis en tête de bricoler le véhicule de location de Bob Morane, qu’il pensait appartenir à Van Horn, afin de provoquer un accident.

Il narre aux deux amis ses déboires. Jourdan habitait à La Havane et était à la tête d’une petite entreprise de pêche au gros. Il possédait une petite vedette à moteur et emmenait les touristes désireux de sacrifier à leur passion, la pêche au thon, au tarpon ou encore à l’espadon. Sa femme malade devait subir une opération, mais il n’avait pas assez d’argent et était au désespoir. Mathias Van Horn, connu dans les Caraïbes sous le nom de Requin de La Havane, surnom qui lui a été donné à cause de son implication dans divers trafics, lui demande de conduire sur la côte américaine, une personnalité cubaine du nom de Ramon Ramirez. Pressé par le besoin d’argent, Jourdan accepta non sans réticence.

Le jour dit, Ramon Ramirez, à la main une serviette à laquelle il semble tenir beaucoup, embarque sur le bateau de Jourdan en compagnie de Van Horn. Les deux hommes s’enferment dans la cabine, puis Van Horn en ressort, la fermant à clé, arguant que Ramirez désire se reposer. Puis Jourdan fait cap sur la Floride où il est arraisonné par la police maritime américaine. Le cadavre de Ramirez gît dans la cabine et le contenu de la serviette a disparu. Jourdan est accusé de meurtre et emprisonné. Il parvient à s’échapper de longs mois plus tard. Cependant sa femme est morte et Van Horn s’est réfugié à Port-au-Prince, d’où sa présence dans la villa.

Bob Morane promet de faire la lumière sur cette affaire et il se rend en priorité chez Forceville, l’agent immobilier qui a procédé à la location. Celui-ci se retranche derrière le secret professionnel et ne peut donner aucun renseignement concernant Van Horn. Dépité, Morane ressort mais un employé de l’agence lui glisse dans l’oreille, dans la rue, le nom de Basil Cortés qui vivrait au Cap Haïtien. Un appel téléphonique anonyme confirme le renseignement, un dédommagement financier à la clé.

C’est ainsi que Morane et Ballantine se rendent au Cap Haïtien, après avoir mis Jourdan en sécurité. Localiser Cortès n’est guère aisé mais ils parviennent enfin à le trouver dans un bouge à Port-de-Paix où il officie derrière le comptoir. Cortès, prévenu de leur visite, déclare ne pas aimer les curieux et bientôt les clients présents, ses copains, se lancent dans une rixe destinée à réduire les deux amis comme appâts à requins. Heureusement, l’un des clients, qui était de passage, se joint à eux et ils peuvent s’extraire de cette souricière.

Leur sauveur providentiel s’appelle Tiger Jack et il déclare avoir bourlingué durant des années dans cette région des Caraïbes, ayant participé au Boulevard du Rhum durant la Prohibition. Il leur indique un éventuel individu, à qui il a rendu service un jour, pouvant leur fournir des éléments de recherches. Et c’est ainsi qu’ils rencontrent Hiéronimus Li lequel affirme ne pas pouvoir leur être de grand secours.

De Haïti aux Bahamas, près d’un petit îlot où gît une épave, en passant par La Havane, Bob Morane et Bill Ballantine vont affronter moult dangers et Tiger Jack sera toujours là à point nommé pour les tirer des griffes de leurs adversaires.

 

Roman d’aventures de facture classique, Trafic aux Caraïbes vaut surtout par la présence de Tiger Jack, sobriquet sous lequel se cache Jean Ray. Même si celui-ci n’est jamais nommé, le lecteur reconnaitra aisément ce fantastiqueur belge.

Né en Belgique à Gand sur Escaut, la merveilleuse cité flamande qui mire ses vieux pignons, les façades précieuses de ses anciens hôtels et son château moyenâgeux, compact comme un œuf de pierre, dans les eaux béates et glauques de ses canaux, Tiger Jack était le fils d’une famille de marins et c’était à sa grand-mère, une authentique indienne Dakota, qu’il devait son profil courbe de Sioux.

Après avoir décrit ses aventures maritimes de trafiquant d’alcool, ce sexagénaire et plus a raccroché un jour et s’est installé chez lui dans sa bonne ville de Gand.

Un beau jour il en avait eu assez de la flibuste, avait vendu au plus offrant bateau et arsenal pour aller chercher le calme à l’ombre des pignons espagnols de sa bonne ville de Gand, où il s’était mis à écrire de merveilleuses histoires pleines d’aventures, de sel, de brume et d’angoisse, où les spectres du passé se pressaient en fantastiques sarabandes. Ces histoires, traduites dans le monde entier, avaient valu la célébrité à leur auteur qui, après avoir été l’un des derniers pirates, était devenu l’un des plus prodigieux conteurs de son temps, sinon de tous les temps.

Un magnifique hommage d’Henri Vernes à Jean Ray.

Mais on n’aurait garde d’oublier le contexte de ce roman, l’aspect politique, avec des personnages qui pourraient ressembler à Batista et Fidel Castro.

L’illustration de couverture est signée Pierre Joubert et les illustrations intérieures de Forton.

Henri VERNES : Trafic aux Caraïbes. Bob Morane N°49. Collection Junior Marabout N°206. Editions Gérard & C°. Parution 1961. 160 pages.

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23 août 2020 7 23 /08 /août /2020 04:38

D’où l’expression Belle comme un camion ?

Andrew VACHSS : Blue Belle

Détective privé un peu spécial, marginal, souvent exerçant à la limite de la régularité, de la légalité, Burke comprend, pardonne, accepte même l’emploi de certains coups fourrés, de certaines arnaques.

Mais s’il y a une chose qu’il condamne avec force et combat par tous les moyens, c’est l’exploitation, le mal, et toutes les formes d’exactions perpétrées à l’encontre des enfants.

Burke vit avec Pansy, un dogue napolitain qui lampe sa canette de bière plus facilement qu’un nourrisson avale son biberon. Il possède quelques amis sur lesquels il sait pouvoir compter en n’importe quelle occasion. Max, La Taupe, Le Prophète, La Mama, Michèle et Terry forment sa famille. Une famille hétéroclite mais soudée.

Pourtant Burke porte sa croix. Une croix qui a pour nom Flood, mais c’est une vieille et une autre histoire. Belle pourra-t-elle et saura-t-elle lui faire oublier Flood et cicatriser ses souvenirs qui le poursuivent ?

Burke fait la connaissance de Belle lorsque Marquès, un proxénète sorti du rang, lui propose une affaire délicate : un camion fantôme s’en prend aux belles de nuit qui travaillent sur les quais, et pour lui comme pour ses collègues, c’est un sérieux manque à gagner.

Au cours de son enquête Burke va découvrir des ramifications qui mettent en danger la vie de certains membres de sa famille.

 

Roman noir, Blue Belle est surtout un fascinant roman d’amour entre Burke et Belle. Mais attention, on est loin des romans dits à l’eau de rose de Barbara Cartland, quoi que.

Après Flood, après La Sorcière de Brooklin, parus dans la même collection, Andrew Vachss nous propose un roman dur, fort et poignant.

Mais il est vraiment dommage que les auteurs, ou les traducteurs, se croient obligés de souligner certaines scènes par une verdeur, une crudité dans les dialogues hors de propos, apportant ainsi de l’eau au moulin de ceux qui dénigrent la littérature policière et populaire en tant que véritable littérature. Presque comme une provocation hors de mise.

Andrew VACHSS : Blue Belle (Blue Belle – 1988. Traduction Marie-Hélène Dumas). Collection Spécial Policier. Editions Albin Michel. Parution mai 1990. 374 pages.

ISBN : 9782226041180

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22 août 2020 6 22 /08 /août /2020 04:21

Peggy Sue, Peggy Sue
Jolie, jolie, jolie, jolie Peggy Sue...

Serge BRUSSOLO : Armés et dangereux.

Heureux les auteurs soutenus par leurs éditeurs ! Peggy Sue Fairway a connu le succès avec la publication de son premier roman, mais depuis quatre ans, plus rien. L’imagination n’est plus au rendez-vous et conséquence inévitable, elle n’a plus rien écrit. Elle essaie, mais en vain.

Obligée de se loger dans un vieil immeuble, elle est en proie au cafard. Aux cafards, devrais-je dire, car ça grouille de partout. Heureusement le propriétaire fait appel à une entreprise spécialisée dans la destruction de ces insectes nuisibles et un jeune homme se présente afin de la débarrasser de ces blattes envahissantes. Au cours de la conversation, Andy lui apprend que son entreprise, Exterminator, recherche des participants pour un stage afin de déterminer si leur nouveau produit est efficace.

Comme elle est aux abois financièrement, elle se présente au siège de la société mais déjà d’autres prétendants attendent leur tour. A son vif contentement, et étonnement, elle est sélectionnée avec 1000 dollars à la clé pour une semaine de travail.

Départ donc pour ce stage particulier organisé par la société Exterminator, et quelle n’est pas la surprise de Peggy Sue de se retrouver en compagnie d’Andy, grand amateur de whisky, de June Dawson, présidente du Club des Amis de Kitty et Dum, de Ken adepte des préceptes de la religion tibétaine enregistrés sur cassettes. Leur lieu de résidence, la maison Hellsander, est une bâtisse décrépite et à peine terminée, à la lisière du désert de Mojave, gardée par un vieil homme qui se déclare en avoir été le guide lorsque cette demeure avait été transformée en musée.

Car cette vieille maison possède une histoire, elle fut le théâtre d’un épisode tragique que connait fort bien Peggy Sue. En effet son père s’était pris de passion vingt ans auparavant pour l’épopée de deux jeunes truands, Kitty Doyle et Dum Heresford, qui se prenant pour Bonnie and Clyde, avaient braqué avec succès douze banques. Mais lors de l’attaque de la treizième, un gros pépin les attendait. Ils durent fuir les policiers et se réfugièrent dans la maison Hellsander. Cette histoire Peggy Sue l’a entendue et digérée durant toute son enfance et son adolescence, aussi la connaît-elle par cœur sous toutes ses coutures.

Le couple résista tant bien que mal, tuant une trentaine de policiers, avant de succomber sous les balles. Seulement leur magot, qui devait être conséquent, ne fut jamais retrouvé. De même que les corps d’ailleurs. Depuis une légende circule dans le pays, et Peggy Sue se rend compte que ses compagnons, chargés d’exterminer les cafards, ne sont pas insensibles à cette légende.

Outre le vieil homme qui se veut le gardien du temple, vivent à quelques centaines de mètres de là, une vieille femme et sa nièce, dérangée mentalement.

 

On retrouve dans ce roman, qui est plus d’aventures que policier, les thèmes chers à Serge Brussolo, notamment la montée progressive de l’angoisse conjuguée au déchaînement des éléments atmosphériques, et la présence supposée de fantômes, le désert et l’atmosphère délétère qui se dégage d’une bâtisse en ruines. Peu de personnages mais de forts contrastes entre eux. Et les monstres sont remplacés par des cafards, des blattes énormes.

La tension entre les divers protagonistes monte progressivement et l’angoisse s’installe, sans qu’il y ait une once de fantastique dans ce récit.

L’atmosphère repose sur des fantômes supposés, sur la présence d’un énigmatique trésor, et sur les préoccupations des différents protagonistes. Et pour sublimer cette ambiance baignant dans l’angoisse, un orage se déchaîne ajoutant à la peur diffuse qui s’est installée progressivement dans le groupe.

 

Ecrire est un métier, répétait la grande Carrie. Un roman est un produit comme un autre, il faut le bricoler en y mettant tous les ingrédients réclamés par le public. Un roman c’est une recette de cuisine… si on ne respecte pas, on gâche la pâte pour rien. Aujourd’hui, ce qui marche, ce sont les histoires de bonnes femmes coupées en morceaux. Les bouquins avec des psychotiques, vous voyez ? Les têtes tranchées qu’on conserve au réfrigérateur. Les tueurs en série. Faites-moi quelque chose avec un tueur en série. Sans oublier les détails sexuels qui s’imposent, bien sûr. Ça fait vendre.

 

Serge BRUSSOLO : Armés et dangereux. Collection Le Masque N°2157. Librairie des Champs-Elysées. Parution novembre 1993. 224 pages.

ISBN : 9782702424247

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20 août 2020 4 20 /08 /août /2020 04:55

N’en faites pas une fixation, ce n’est qu’un flic…

Georges MOREAS : Flicxation.

Autant vous l’avouer tout de suite, je n’étais pas très chaud pour lire ce roman, mais comme je l’avais reçu en service de presse, je me suis forcé par respect pour l’éditeur et l’auteur.

D’abord une couverture peu engageante, tout du moins c’était mon avis, et comme dit l’autre je le partage. Le titre également ne m’attirait guère. Donc deux raisons pour rebuter le lecteur éventuel.

Nonobstant ces considérations personnelles, j’ai entamé la lecture de ce que je pensais être une énième histoire de brigades. Bon, Moréas, je connaissais et le tenais pour un auteur intéressant, quoique les policiers, ou ex-policiers devenus romanciers n’ont guère figuré dans mes choix de lectures.

Sans être un chef d’œuvre, ce roman se lit avec plaisir d’une traite. Pas de tergiversations, de descriptions oiseuses, de l’action ! Comme dans les bons vieux films policiers de série B, les meilleurs, qui possédaient intrigues et dialogues à l’emporte-pièce.

Faut dire que Moréas a connu, sinon vécu, des situations similaires ou approchantes à celles décrites dans son roman. Donc part belle à l’imagination, quoique, dans l’intrigue, mais les relations entre personnages, les dialogues, les différentes scènes d’action, tout sonne juste.

Même la petite touche de mélo, histoire de nous rendre le commissaire Morgain, son personnage principal, sympathique, passe sans trop de difficulté. Alors je suis revenu sur mes préjugés et nous verrons bien dans la suite des aventures de Morgain si Moréas va continuer dans ces bonnes dispositions prometteuses.

Ce roman, je m’empresse de le signaler, ne fait ni dans le sadisme ni dans la pornographie, pratiques courantes chez d’autres brigadistes qui n’apportent rien au plaisir de la lecture.

Donc mon reproche ira à l’encontre du maquettiste de la couverture, et je demanderai quelque chose de moins hideux, de plus sobre. A moins que ce soit moi qui n’ai rien compris. Le regret des illustrations signées Michel Gourdon peut-être.

 

La collection DPJ6, 6ème Division de Police Judiciaire, ne vivra que le temps de six romans. Encore une tentative de collection avortée au Fleuve Noir qui cumulait les échecs à cette période, à moins que les responsables financiers fussent trop gourmands et pas assez patients.

 

Georges MOREAS : Flicxation. Collection DPJ6 N°1. Editions Fleuve Noir. Parution juin 1988. 190 pages.

ISBN : 9782265038134

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18 août 2020 2 18 /08 /août /2020 04:08

Dans la douceur angevine, l’ange vint…

Isabelle VERDET : Véronique.

Dans le petit village de Montdraypon, sis en Anjou, la tension monte. La propriétaire d’un élevage équin a été assassinée et la rumeur accuse l’un des jeunes résidents de la Merlotte, un centre expérimental de rééducation.

Véronique Lamblin, jeune juge d’instruction de trente-deux ans, est chargée de cette affaire et elle se présente à la gendarmerie du bourg où elle est reçue par l’adjudant Guyomard. L’enquête ne lui sera pas retirée au profit du SRJP et il en est satisfait. Personne pour lui marcher sur les plates-bandes, et il se sent en confiance avec cette juge dont il pressent, malgré le jeune âge, une détermination à conduire à bien l’enquête sans se laisser influencer.

Le maire du village est le premier à accuser Michel Crobert, vingt ans, mais dont le passé chargé ne plaide pas en sa faveur. Les époux Brisson qui dirigent ce Centre expérimental défendent évidemment leurs protégés, quatorze garçons et six filles, qui tous ont eu une enfance difficile et doivent se racheter aux yeux de la société. C’est pour cela que Crobert avait été embauché par Suzanne Vuillaume, quadragénaire avancée, afin de s’occuper des chevaux en compagnie de deux employés en place depuis longtemps et d’une stagiaire.

Suzanne Vuillaume s’était mariée sur le tard, avec un homme plus jeune qu’elle de sept ans, et depuis, elle avait abandonné ses frasques, se concentrant uniquement à soigner ses chevaux et à son mari qui s’occupe également de l’établissement équin.

Crobert est un coupable tout désigné mais pour Véronique Lamblin, il existe des failles dans les accusations. Alors elle reprend les témoignages, organise une reconstitution, contre le maire qui clame haut et fort avoir l’appui du préfet, de député, du procureur, pour fermer la Merlotte. Elle reçoit aussi les confidences et l’appui d’une vieille dame qui connaît bien les habitants du village et leurs antécédents.

 

Dans un contexte rural, Isabelle Verdet noue et dénoue une intrigue assez simple, et le lecteur rapidement se doute de l’identité du ou de la coupable.

Mais c’est l’atmosphère et l’ambiance qui priment, cette arrogance d’un édile vindicatif qui veut à tout prix se débarrasser d’un centre de rééducation pour adolescents difficiles en marge de la loi.

Toute cette vermine, ça vous a déjà des antécédents : vol, drogue, prostitution ! Ici c’est pas une décharge publique pour que ceux de la ville nous y envoient leurs ordures !

Mais Véronique Lamblin ne se laisse pas démonter, ni influencer. Elle sait se montrer diplomate, rester calme face aux provocateurs, amener les témoins à compléter leurs dépositions, relever les failles et revenir sur de petits faits omis lors de leurs première déclarations. Une femme énergique sachant créer de l’empathie autour d’elle.

Il est précisé que ce texte est l’adaptation d’un roman paru dans la collection Spécial Police, sans autre renseignement. Une indication qui nous a fourvoyé, Pierre Turpin et moi-même dans l’attribution de ce livre à Peter Vanett alias Liane Méry, alias Viviane Syrmen, n’ayant pas eu l’ouvrage sous les yeux afin d’effectuer une comparaison.

Je remercie Olivier Ancel de la Librairie L’Amour du noir de m’avoir fourni ce livre et maintenant je possède une intime conviction quant au nom de l’auteur, mais ceci serait encore à démontrer. Je pense à Giova Selly, auteur dans la dite collection, et qui par la suite a fourni quelques romans pour Alain Grèzes dans la collection Nous Deux qu’il dirigea dans les années 1990. Donc il faudrait piocher dans sa bibliographie, mais d’autres pistes ne sont pas à écarter, même si elles me semblent moins probables, telle que celle de Mario Ropp, pseudonyme derrière lequel se cachait une femme.

Isabelle VERDET : Véronique. Collection Femme Viva N°11. Une coproduction Alain Grèzes - Editions Fleuve Noir. Parution octobre 1987. 192 pages.

ISBN : 9782265037038

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17 août 2020 1 17 /08 /août /2020 04:11

Faut en profiter !

Peter VANETT : Trois jours à vivre.

Méthodique, maniaque, célibataire, Simon Auclair effectue tous les jours, à la même heure, les mêmes gestes avant de se rendre à son travail. Seulement, ce vendredi matin, il entend aux informations une nouvelle qui le ramène cinq ans en arrière et va le perturber pour le début de la journée.

Aldo Frascati avait été inculpé cinq ans auparavant pour meurtre et il avait écopé de la perpétuité. Or c’est Simon Auclair qui l’avait identifié et avait témoigné à charge. Les dénégations de Frascati n’avaient rien changé à la donne, il avait été condamné. Mais Frascati vient de s’évader de la prison où il était enfermé et Simon commence à se poser des questions quant à son avenir.

Au bureau, son chef de service et ses collègues sont évidemment informés de cette évasion, eux qui l’avaient chaudement félicité cinq ans auparavant. Simon était même devenu un petit héros au sein de l’entreprise. Soudain le téléphone sonne, c’est Frascati qui se rappelle à son bon souvenir, lui signifiant qu’il n’a plus que trois jours à vivre.

Simon Auclair décide de se rendre au commissariat et demander une protection. Le commissaire ne croit pas trop en la vengeance du truand, mais il va mettre quand même des hommes en faction, chargés de surveiller les alentours et les déplacements de Simon Auclair, lequel n’est pas au courant des précautions prises.

Et Simon Auclair se trouve le lendemain en présence de Frascati dans la rue mais une voiture arrive sur les entrefaites. Simon s’enfuit pensant à des complices de Frascati et le truand parvient à s’échapper. Dès lors, Simon Auclair va vivre des heures sombres, angoissantes, au cours desquelles il se sent traqué, à juste titre.

Parallèlement, le lecteur suit Frascati dans sa nouvelle vie d’évadé. Il s’est réfugié dans une mansarde, dans l’immeuble où vit Mario, son ancien complice, un truand sur le retour. Il est approvisionné par Mimi, seize ans, qui a bien changé depuis qu’il l’avait vue pour la dernière fois. Et Mimi, jeune plante pas encore tout à fait en fleur, tombe amoureuse de Frascati, et veut absolument l’aider dans sa fuite. Les sentiments de Frascati prennent le même chemin, malgré le jeune âge de Mimi.

 

Si la première partie du roman est consacrée à Simon Auclair et à ses affres qui enflent au fur et à mesure que les heures passent, peu à peu l’intérêt du roman se déplace sur Frascati qui devient le personnage principal avec Mario et la jeune Mimi.

Roman psychologique à suspense, dont l’épilogue est franchement noir et pessimiste, Trois jours à vivre est le seul roman de Viviane Syrmen, plus connue des amateurs de littérature populaire sous les noms de Viviane Pernet et Liane Méry, à avoir été publié au Fleuve Noir. Et ce roman, de par certaines scènes et descriptions, sa structure et les différentes phases (et phrases) d’écriture semble bien être une collaboration entre Viviane Syrmen avec son mari de l’époque, Pierre Cambon.

Mais il infirme également les suppositions que ce roman a été réédité dans la collection Femme Viva sous le titre Véronique et signé Isabelle Verdet. Il s’agit juste d’une légère homonymie entre Syrmen/Vernet et Verdet.

 

Les flics ne sont pas des gens bien malins, tout le monde le sait, mais tout de même, tu pourrais finir par te faire posséder…

Peter VANETT : Trois jours à vivre. Collection Spécial Police N°86. Editions Fleuve Noir. Parution 4ème trimestre 1955. 224 pages.

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