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14 janvier 2020 2 14 /01 /janvier /2020 05:35

La lumière revient déjà
Et le film est terminé…

 

Alexis AUBENQUE : Souviens-toi de Rivers Falls.

L’animation règne dans la petite ville de River Falls, au grand mécontentement du shérif Mike Logan.

En effet une équipe de cinéma a investi les lieux, afin de tourner un film inspiré de l’une des précédentes affaires que Logan a eu à résoudre, dans des conditions pénibles et sanglantes. Un film basé sur l’histoire d’un tueur en série et il serait le personnage principal.

Mais Mike Logan, s’il est ulcéré par cette initiative qu’il n’apprécie pas, est aussi en proie à des sentiments divers suite à sa séparation d’avec Jessica Hurley. Mais, en général, les habitants de River Falls se réjouissent de cette intrusion dans leur quotidien.

Ce qui n’empêche pas la vie de s’écouler au quotidien. N’empêche pas ? Si, un fait toutefois. La productrice est retrouvée morte dans sa chambre d’hôtel, entraînant toutes les suppositions : accident, suicide, meurtre. Mike Logan est chargé, en tant que shérif, d’enquêter sur ce décès mystérieux. Il fait équipe à l’occasion avec Lindsay, sa lieutenante et bras droit.

Lindsay s’est mise en couple avec Callahan, un journaliste qui a parcouru le monde mais s’est installé depuis quelques mois à River Falls. Possibilité de conflits d’intérêt, mais Logan fait confiance à Lindsay pour ne pas trop en dévoiler à son compagnon. La sœur de Callahan, veuve avec trois enfants, vit dans un manoir situé sur les flancs de la cité. Quant à Callahan, il vient d’hériter d’une riche demeure.

Callahan est chargé par son rédacteur en chef de couvrir l’affaire en binôme avec Marion, la jeune fille de son patron et stagiaire dans le journal. Marion se découvre une passion subite pour le jeune premier rôle masculin, Chester Walker, un comédien en devenir qui accumule les bonnes fortunes. Un peu trop machiste dans ses déclarations, comme s’il était déjà blasé.

Parmi les trois enfants de la sœur de Callahan, Beverly se tient en retrait de cette animation. Elle est bien obligée car elle est handicapée et ne se déplace plus qu’en fauteuil roulant. Le fils est trop jeune. Seule Tawny, dix-sept ans fait l’école buissonnière afin de tournicoter sur les lieux du tournage. Et elle s’éprend d’un beau jeune homme, bien sous tous rapports, qui s’occupe entre autres de l’intendance. Une histoire d’amour en gestation.

Mais l’actrice principale disparait à son tour. La dernière fois qu’elle a été vue, c’est en compagnie de Logan. Le passé de Logan va ressurgir inopinément, et entrent alors en scène des agents du FBI ainsi que Hurley la mère de ses enfants.

 

D’autres protagonistes font leur apparition et pour Logan, et les lecteurs, une nouvelle énigme s’amorce, puisant sa genèse dans son passé. Des individus, masculins et féminins interfèrent dans l’histoire.

Quasiment tous les personnages évoluant dans cette histoire sont des transformistes psychiques et il suffit de les dépouiller de leurs oripeaux pour découvrir ce qui se cache sous les ors ou les guenilles psychiques. Un peu à la manière dont on enlève la pelure des oignons jusqu’à arriver au bulbe nu. Et là, une fois enlevées ses couches protectrices, on peut apercevoir un légume sain ou au contraire pourri jusqu’au cœur.

Chacun de ces protagonistes possède un jardin secret. Mais ce jardin peut être épanoui, ou en friche. Et les pistes ne manquent pas, les enquêteurs s’attardant parfois sur des sujets troubles dont la posture est contraire à leur véritable personnalité.

Car Alexis Aubenque, tout en plaçant son intrigue dans l’Amérique de l’Ouest, dans l’état de Washington, non loin de Seattle, suit l’actualité. Cette fois tout tourne autour des affaires dites de harcèlement et s’inspire du cas Weinstein. Et il est amusant ( ?) de lire ceci :

Les Français ont beaucoup de défauts, mais ils s’y connaissent en cinéma. J’ai été sur plusieurs tournages là-bas. Les filles sont super canons, et pas farouches, vous pouvez me croire. C’est pas là-bas qu’une affaire Weinstein serait sortie !

 

Chaque roman possède une intrigue inédite, pourtant Alexis Aubenque possède cette faculté démoniaque, machiavélique, tout en se renouvelant, de tisser avec ses précédents titres un filet reprenant d’autres séquences, les complétant, leur offrant une nouvelle vie et une suite annoncée, sans que pour autant chacun de ses livres pâtissent d’un manque.

Tout est expliqué, du moins en ce qui concerne l’intrigue principale, mais des débouchés, des retours en arrière sont proposés. Le tout constitue une énorme saga qui s’étoffe au fil des ans et des titres. Alors oui, chaque ouvrage peut être lu indépendamment les uns des autres, voire dans le désordre, mais les extensions offertes incitent le lecteur à découvrir les autres tomes mettant en scène Mike Logan, et d’autres titres dans lesquels certains des protagonistes évoluent comme dans Tu ne manqueras à personne.

C’est comme une composition florale dont chaque fleur posséderait son histoire, ses couleurs, ses senteurs, mais en mettant l’accent sur un ensemble harmonieux.

 

Alexis AUBENQUE : Souviens-toi de Rivers Falls. Saison 2 épisode 3. Thriller Poche. Editions Bragelonne. Parution 12 juin 2019. 384 pages. 7,90€.

ISBN : 979-1028106799

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13 janvier 2020 1 13 /01 /janvier /2020 05:55

Ma sorcière bien aimée !

Barbara CARTLAND : La sorcière aux yeux bleus

En ce début de printemps 1800, Oswin marquis d’Alridge s’ennuie. Il est riche, jeune, trente ans, ne comptabilise plus ses conquêtes, mais il s’ennuie.

Il est ami avec le Prince de Galles, un noceur, mais sa soirée chez madame Fitzherbert ou à la Fête de Vénus au Cloître, n’y font rien, il s’ennuie. Il décide alors de quitter Londres et de se rendre dans le domaine des Alridge, dans l’Essex, un comté réputé pour sa phobie des sorcières mais où il a été élevé étant jeune et adolescent, n’informant personne de son départ ni de son lieu de résidence.

Il jouait avec John Trydell, mais celui-ci est mort depuis une dizaine d’années. De même que le père, et il ne reste plus de cette famille que le cadet, Caspar, un gamin infect et qui n’a pas changé depuis. Il dilapide la fortune familiale, se rendant souvent à Londres afin de satisfaire sa passion du jeu. Son domaine en pâtit et ses serviteurs ne sont pas payés.

Alors qu’il approche de son domaine, Alridge aperçoit une cohorte de paysans traîner une jeune fille blessée et évanouie. Ils lui indiquent qu’il s’agit d’une sorcière et qu’ils vont la plonger dans la mare, comme c’est la coutume, attachée à une corde. Si elle coule, c’est qu’elle est innocente, et si au contraire, elle nage, c’est qu’elle est coupable.

Cette façon de procéder barbare d’une autre époque révolte le marquis qui l’emmène chez lui, au grand dam des paysans, puis de la plupart de ses serviteurs. Et il confie la jeune fille à Nanny, la vieille dame maintenant qui fut sa nourrice. Et il lui narre comment cette blessée a été découverte. Elle gisait sur une pierre, les Pierres des Druides, ensanglantée, blessée à la tête, et déposé sur son corps un coq mort au cou tordu.

Un coup tordu par le Marquis qui en détaillant les mains de celle qu’il a recueillie, est persuadé qu’elle n’aurait pas eu la force d’infliger un tel supplice au gallinacée. D’autant que ses mains ne possèdent aucune trace de sang. Grâce aux bons soins prodigués par Nanny, la jeune fille, supposée sorcière, se remet doucement. Seulement elle est devenue amnésique. Toutefois, en nettoyant ses habits, Nanny découvre un mouchoir de fine batiste, avec Idylla brodé dans un coin. Le prénom de celle qui n’est plus une inconnue.

 

Le marquis Oswin d’Alridge se promet d’enquêter sur les antécédents d’Idylla et pourquoi elle a ainsi été frappée. Nul doute qu’elle avait été déposée sur la Pierre des Druides, son agresseur pensant qu’elle était décédée de son coup à la tête puis simulant une mise en scène propice à ne pas la reconnaître.

Naturellement, il s’éprend de la belle brune aux yeux bleus, et les sentiments sont réciproques de la part d’Idylla. Il prend le temps de lire dans sa bibliothèque fournie, les ouvrages consacrés à la sorcellerie. Et il apprend de la part de son fidèle régisseur que la région est quelque peu agitée suite aux frasques de Caspar Trydell. Le marquis embauche certains des serviteurs de son voisin peu recommandable, les connaissant de longue date, et la description qu’ils font de Caspar n’est pas flatteuse. Le père était strict, sévère mais honnête, et John l’aîné était un bon camarade. Alors il suit de loin les événements.

Il fait venir de Londres des robes magnifiques afin de vêtir décemment Idylla, ils prennent leurs repas ensemble, la jeune fille s’apprivoisant à son contact, et la mémoire lui revient lorsque des individus tentent de l’enlever en grimpant à une échelle posée contre le balcon de sa chambre.

 

La romance amoureuse n’est qu’un lien qui pourrait sembler futile dans cette intrigue quelque peu policière mais qui est surtout l’occasion pour Barbara Cartland de décliner un roman historique dans une atmosphère propice à développer les superstitions.

En effet elle revient souvent dans des affaires de sorcellerie, empruntées à des légendes et des faits réels, qui se sont déroulées dans cette région de l’Essex surnommée la terre des sorcières. Les exemples ne manquent pas et le marquis vitupère contre les paysans obnubilés par des croyances mi-païennes, mi-religieuses. Il n’y a que des ignorants dans cette région et ils l’ont toujours été ! déclare sans ambages Nanny, alors qu’il s’insurge contre le paganisme, une manifestation qui pour lui est hors d’âge.

Et en lisant cette histoire d’amour, on ne peut s’empêchant de penser au film Titanic, et à ce lien qui unit un émigré Irlandais et une jeune bourgeoise. Histoire qui occulte quelque peu l’élément principal, le naufrage de ce navire lors de sa première traversée, sombrant dans les eaux avec cette rencontre avec un iceberg.

Une fois de plus, on se rend compte que les romans de Barbara Cartland étaient beaucoup plus profonds, plus psychologiques, que pouvaient penser quelques critiques, et s’inscrivaient dans la grande Histoire avec un aspect sociétal indéniable.

 

Les gens ne changent pas. Ils se contentent de vieillir.

 

Barbara CARTLAND : La sorcière aux yeux bleus (The blue-eyed Witch – 1976. Traduction de Monique Ties). Collection J’ai Lu N°1042. 192 pages. Parution 18 mars 1980.

ISBN : 2277214020

Première édition : Editions de Trévise. 1977

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11 janvier 2020 6 11 /01 /janvier /2020 05:08

Vanina rappelle-toi
Que je ne suis rien sans toi …

Mario ROPP : Une fois, il y eut Vanina.

Lorsqu’elle se réveille ce matin-là, Nadine se souvient de son rêve. Un cauchemar peut-être, car elle a revu Hilda, sa chienne boxer qu’elle aimait tant et disparue pour toujours deux ans auparavant.

Herbert, son mari, le mari de Nadine je précise et non pas de Hilda, lui non plus n’est pas en forme. Ils se sont mariés cela fait trois ans environ, mais il pense toujours à Vanina, sa première femme, décédée accidentellement quelques années auparavant.

Ils habitent Paris où il travaille comme commercial pour une imprimerie située à Belfort, et justement il a rendez-vous d’affaires avec son patron. Il doit rentrer le lendemain samedi et ils profiteront du week-end ensemble. C’est ce qu’espère Nadine, mais il ne donne pas de ses nouvelles et le lendemain matin Nadine, inquiète, téléphone à l’employeur de son mari.

Celui-ci confirme qu’il a bien vu Herbert la veille, qu’il est reparti le soir même, mais qu’il avait l’air soucieux.

Alors elle pense qu’il a fait une étape à La Coudre, un petit village situé entre Troyes et Ermont le château, où vivait Vanina. Peut-être effectue-t-il un pèlerinage. Nadine décide de se rendre sur place. Alors qu’elle part, sur la route qui longe la Petite Maison à La Coudre, d’étranges événements se déroulent.

Il ne fait pas encore tout à fait nuit en cette fin de journée de juin, et le gendarme Paul Valère qui circule pour son plaisir en moto, s’arrête non loin de cette Petite Maison qui lui rappelle tant de souvenirs. Rien n’a changé. L’échelle est toujours là, appuyée à une fenêtre du premier étage. Depuis dix ans. Depuis le départ de Vanina, dont il fut secrètement amoureux. Tout comme Abel qui tous les ans taille la vigne vierge qui grimpe le long du mur.

Justement Abel est présent, se promenant lui aussi. Et il annonce à Valère que quelqu’un est là, une voiture bleue étant garée dans le garage. La porte du garage était ouverte depuis dix ans et qu’elle soit fermée a attisé sa curiosité. Et il a entendu quelqu’un tousser dans la chambre de Vanina. Abel est toujours amoureux de Vanina et il l’attend, espérant la revoir. C’est à ce moment que Nadine arrive devant la Petite Maison et trouve sur son chemin Valère.

Elle entre dans la petite bâtisse, grimpe l’escalier et découvre dans la pièce un cadavre. Celui d’Herbert. Valère procède aux premières investigations et nul doute que l’homme a été abattu d’une balle de revolver. Mais il est improbable, selon les premières constations, que celui-ci se soit suicidé. Il existe des incompatibilités. Quoi que, lorsque l’on veut accuser quelqu’un de sa mort, il suffit de ruser et d’imaginer une mise en scène. Alors, Nadine et Abel se trouvent sous le coup des projecteurs, Valère se souvenant après coup avoir entendu un coup de feu.

 

Ce roman aurait très bien pu être publié dans la collection Angoisse tant l’atmosphère étouffante imprègne les premiers chapitres du livre. Mais cette collection avait été interrompue en 1974.

Cela aurait pu également être un meurtre en chambre close mais la solution est nettement plus tarabiscotée et l’intrigue est assez retorse.

Seuls quelques personnages gravitent dans cette histoire, dont quelques anciens amoureux de Vanina, des amoureux qui ne l’ont jamais oubliée et ignoraient qu’elle était morte trois ans auparavant dans un accident.

Mario Ropp plante le décor dans une région, sa région, et il n’est pas vain de penser qu’Ermont le Château n’est autre que le petit village d’Ervy-le-Châtel où elle vécut. Mais le lecteur est entraîné aussi à Belfort, Giromagny où Vanina connut une aventure avec un artiste peintre, et d’autres endroits touristiques comme les vestiges de l’ancien château du Rosemont petit fort situé à Riervescemont, dans le Territoire de Belfort.

 

Elle croyait rêver encore et le silence qui s’appesantissait autour d’elle contribuait à maintenir l’ambiance du rêve. Il n’y a jamais de bruit dans les rêves.

 

Les rêves, comme les souvenirs, ne peuvent toucher personne d’autre que soi-même.

 

 

Mario ROPP : Une fois, il y eut Vanina. Collection Spécial Police N°1244. Editions Fleuve Noir. Parution mars 1976. 224 pages.

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9 janvier 2020 4 09 /01 /janvier /2020 05:41

Et aimez-vous les uns les autres…

Philippe CARRESE : Tuez-les, à chaque fois.

Il était une fois trois vigiles. L’un se prenait pour Superman, l’autre pour Hulk, le troisième pour Zorro.

Virés pour violence envers des clients du supermarché où ils étaient employés, ils n’ont qu’une solution, se reclasser. Patrice Martinez, alias Zorro, se voit très bien dans le rôle du justicier masqué, déclenchant une guerre des gangs qui laisse des traces, ou s’instituant le vengeur des petites gens. Il veut embrigader ses copains, mais cela ne se déroule pas comme il voudrait.

L’inspecteur Ronaldi, un policier obèse qui ne compte plus ses triples, voire quadruples mentons, et j’en passe, associé au jeune marié Fabien, est chargé d’enquêter sur le meurtre d’un propriétaire de bar dont les barmaids fidélisent la clientèle en servant les seins nus.

Un V comme vengeance est tagué non loin du corps et ses soupçons se dirigent vers Franky le Clown, truand local, lequel est en bisbille avec Stef la Méduse, autre patron d’une mafia locale.

 

A partir de cette trame simple, avec Marseille en toile de fond, Philippe Carrèse brosse avec humour des personnages, qui au fur et mesure que l’intrigue avance, se révèlent plus ou moins déjantés.

L’épilogue, moral, est en contraste avec l’humour qui baigne dans ce roman. Le duo Ronaldi-Fabien pourrait ressembler au début à l’association Laurel et Hardy et l’on se prend à sympathiser avec ces deux flics, l’un bourru, l’autre quelque peu naïf jusqu’au moment où…

Philippe Carrèse retourne peu à peu la situation et l’on ne peut qu’approuver le final de cette histoire.

 

Philippe CARRESE : Tuez-les, à chaque fois. Collection Les Noirs N°68. Editions Fleuve Noir. Parution septembre 1999. 192 pages.

ISBN : 2265065412

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2 janvier 2020 4 02 /01 /janvier /2020 04:35

Ce matin, un lapin…

Gaëtan BRIXTEL : Rabbit Run.

Un chien ? Trop gros et puis, il faut le sortir, quelque soit le temps.

Un chat ? Il prend trop de place aussi et il faut accepter qu’il griffe les fauteuils.

Et il faut s’en occuper de ces bestioles, être à leur disposition. C’est encombrant dans un studio, bruyant parfois.

Pourtant un animal, pour un jeune homme solitaire, à défaut de femme, c’est un gentil compagnon, qui ne parle pas trop.

Dans une animalerie, une gentille dame, c’est toujours gentil une vendeuse lorsqu’elle veut vous refourguer quelque chose, une gentille dame présente à notre narrateur un lapin. Pas n’importe lequel. Un lapin bélier au front têtu, aux oreilles tombantes, calme, docile, affectueux.

Si, si, un lapin peut se montrer affectueux. La preuve, lorsque le futur acquéreur le prend, Jeannot Lapin se niche dans ses bras.

Rectification : il ne va pas se prénommer Jeannot mais Gustave. C’est bien Gustave, cela sent le terroir, ça rime avec betterave…

 

Papa c’est pris d’affection pour Gustave qui est presque comme un gamin pour lui. Gustave possède sa cage, Papa lui a installé un parc tout autour pour que son lapin bélier puisse se promener, s’ébattre, comme s’il était en liberté. Parfois Adélie vient voir Papa, s’inquiète de sa santé. Lui il s’inquiète de Gustave, surveillant ses petites crottes noires, semblables à des olives desséchées.

Jusqu’au jour où…

 

Débutant dans la douceur, ce roman rose devient bientôt d’une noirceur torride.

Avec Gaëtan Brixtel, aucune nouvelle ne se ressemble, et pourtant il existe une continuité dans son œuvre. L’auteur nous plonge dans un quotidien, son quotidien, implacable. Peu de personnages dans ce conte animalier, mais une ambiance familiale qui peu à peu devient étouffante.

Il est simplement dommage que, obéissant à une mode non écrite que l’on retrouve dans les titres de films ou de romans, Gaëtan Brixtel ne nous offre pas un titre français mais emprunte à une manie de plus en plus prégnante d’intituler cette nouvelle, de l’affubler pourrais-je écrire, d’un titre anglo-saxon.

Je lui pardonne, car j’aime bien le style de Gaëtan Brixtel, son univers parfois décalé et pourtant situé dans un quotidien dans lequel chacun pourra se retrouver.

Mais il aurait pu donner comme titre : La course du lapin bélier à travers le studio… Un clin d’œil à Sébastien Japrisot.

 

Gaëtan BRIXTEL : Rabbit Run. Nouvelle numérique. Collection Noire Sœur. Editions Ska. 20 pages. 1,99€.

ISBN : 9791023407969

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28 décembre 2019 6 28 /12 /décembre /2019 05:49

Une main de fer dans un gant de velours !

Philippe BOUIN : Au nom du père et du crime.

Cette locution n’a jamais été aussi vraie, aussi appropriée pour le commandant de police Charlotte Auduc, en poste à Limoges. Et il ne faudrait pas prendre cette quadragénaire pour une poupée de porcelaine.

Ancienne du RAID, ayant sauvé la vie de qui vous savez, elle a perdu la main gauche dans une opération, une tentative d’assassinat. Et lorsque l’on est gauchère, c’est un fait rédhibitoire, surtout lorsque l’on se défendait honorablement au piano.

Depuis cet incident fâcheux, elle est affublée d’une main myoélectrique, la Chose, cachée aux yeux des âmes sensibles par des gants. Ce qui ne l’empêche pas de mener ses enquêtes avec dextérité. Elle a été mutée, sur sa demande, à Limoges, alors qu’elle pouvait prétendre mieux. Elle vit seule avec Rap, son beauceron qui bave devant elle et frétille de la queue. Un chien tout dévoué et qui comprend tout, ou presque.

Ce matin-là, Charlotte se rend à G*, charmante petite cité limousine, justement en voiture, en compagnie de Chevillard, légiste patenté. Car il ne s’agit pas d’une promenade touristique qu’elle effectue, ni même un pèlerinage, même si elle s’arrête deux minutes au cimetière local, mais bien parce qu’un crime vient d’être découvert dans l’église du village. Deux en réalité, mais le second cadavre importe peu. Il s’agit d’une nonagénaire qui se trouvait au mauvais endroit au mauvais moment. Ça arrive.

Donc le premier cadavre était un homme tout en étant curé, et par ses sermons dominicaux, il avait réussi l’exploit de remplir dimanche après dimanche, une église promise à la désertitude. Et ses paroissiens devenus fidèles se pressaient afin de l’entendre vitupérer envers mais pas contre tous. Il avait ciblé un notable de la cité et sans citer de nom, tous savaient qu’il s’agissait de Victor Juillet, le maire de la commune depuis des décennies.

Victor Juillet régit tout dans sa commune. Il possède des usines, des commerces, fait la pluie et le beau temps, et surtout il emploie ses concitoyens dans ses affaires. Alors quand on a du travail, sur place qui plus est, on ne regimbe pas. Ou presque. Donc le curé Piffaud, le maire ne pouvait pas le piffer. Mais ce n’est pas pour autant qu’il fallait s’abaisser à se débarrasser d’un Don Camillo local.

L’inconnu armé d’un couteau s’est amusé à se prendre pour le nouveau Jack l’Eventreur et a perpétré son forfait dans l’église. C’est l’organiste albinos qui a découvert les deux défunts et a prévenu la gendarmerie qui elle-même s’en est référée au préfet qui mandé à la Police Judiciaire de Limoges de diligenter un enquêteur discret. Et c’est comme ça que Charlotte Auduc a pour mission d’aider le capitaine Trajan et ses hommes dans une enquête délicate. Seulement Charlotte est chaussée de pataugas, et elle n’hésite pas à mettre les pieds dans la boue et le reste. Question discrétion assurée, on repassera. Mais au moins cela à l’avantage de faire bouger la fourmilière.

Car bientôt d’autres cadavres sont découverts. Des jeunots qui traficotaient dans les produits illicites. Et d’anciennes affaires remontent à la surface des souvenirs. Des disparitions enregistrées trente ans auparavant. Deux jeunes hommes dont plus personne n’a eu de nouvelles et une affaire classée un peu trop rapidement au goût de Charlotte. Une jeune fille aussi disparue sans laisser de traces. De même que les rapports de police qui ont été effacés. Et puis quelques mois auparavant ces disparitions, la mort accidentelle des parents de Charlotte. Lui médecin apprécié de sa patientèle, elle infirmière fort estimée. Charlotte n’avait que dix ans.

 

La présence de Charlotte à G* semble indisposer quelqu’un. Mais qui ? Car au début elle s’est bien gardée de dévoiler son appartenance familiale. Seule sa hiérarchie connait ses antécédents, ainsi que Yoyo, un braconnier qui vit essentiellement de rapines forestières. Et pour braconner, il faut savoir se mouvoir en silence, épier les environs, traquer les lièvres et les faisans, se méfier des malfaisants.

Les habitants de cette petite cité si tranquille bientôt se montrent sous un jour pas si aimable, bienveillant, naïf, calme, pudique, sans histoires, auquel on pourrait penser. Car sous le tapis de feuilles automnales, se cachent quelques pratiques qui n’ont rien d’honnêtes. Seuls quelques adolescents se déplaçant bruyamment à motos sont pointés du doigt. L’arbre pourri qui cache la forêt véreuse.

On retrouve dans ce roman l’humour parfois caustique de Philippe Bouin (il me manquait !) et son regard sans pitié sur une communauté bien sous tous rapports. Rapports que Charlotte ne manquera pas de mettre au jour parmi une population composée de personnages atypiques et pour certains attachants. Certains seulement.

Mais, personnellement, je déplore que Philippe Bouin se soit cru obligé d’emprunter des locutions anglo-saxonnes ou un vocabulaire de jeunes fâchés avec la langue française afin d’en truffer son texte. Cela me fait penser à un visage angélique parsemé de comédons disgracieux.

 

Les chiens c’est pareil que les Hommes, ils ne peuvent tout avoir, la liberté et le confort.

 

Avec toutes les lois qui tombent sur le dictionnaire, j’ai pris mes distances avec les mots. Je ne suis même pas sure que ministre ne soit pas une injure.

 

Philippe BOUIN : Au nom du père et du crime. Collection Moissons noires. Editions La Geste. Parution 10 septembre 2019. 400 pages. 18,00€.

ISBN : 978-2490746071

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27 décembre 2019 5 27 /12 /décembre /2019 05:09

Lorsqu’Evelyne Brisou-Pellen signait d’un sigle…

E.B.P. : La bague aux trois hermines.

La pétulante et intrépide Alix, dix ans, préfère être en compagnie de sa maîtresse, damoiselle Isabelle, que vaquer en cuisine ou auprès des lavandières. Elle trouve toujours une bonne excuse pour se défiler à ses tâches qui l’ennuient.

Placée près du sire Ordéric toute jeune, après avoir perdu des parents, elle se mêle de tout et l’annonce que damoiselle Isabelle va se marier ne lui sied guère. Elle pense qu’elle a son mot à dire et les six prétendants invités au château ne lui plaisent guère. Elle se renseigne, elle prétend que damoiselle Isabelle est moche, claudicante, et tout autre excuse à décourager les seigneurs qui convoitent sa main. S’autant que damoiselle Isabelle ne doit pas voir les prétendants avant que sire Ordéric ait fait son choix.

Alors elle les espionne, les interroge, mais pour elle aucun d’eux n’est le fiancé idéal. Trop gros, trop vieux, pas assez riche, pas assez beau, pas assez aimable. Bref tout le contraire de ce qu’elle ambitionne pour sa jeune maîtresse.

Mais lorsque l’un des prétendants est assassiné, car pour elle il n’y a aucune tergiversation, il ne s’agit pas d’un accident, donc lorsque l’un des prétendants est assassiné, elle se met enquête du fautif. A ses risques et périls, car c’est bien joli de fouiner ainsi, mais le retour de bâton peut provoquer d’autres dégâts, surtout sur sa personne.

Elle provoque des remous parmi toute la gente assemblée, se faufilant d’une pièce dans une autre, fouillant dans les affaires des uns et des autres, à la recherche d’une preuve afin de confondre le coupable. Du moins celui qui a commandité le tueur pour effectuer son forfait. Et l’assassin ne peut qu’être Ordin le jongleur, un malfaisant à la tête d’une bande de malandrins.

Et voici qu’un nouveau venu s’installe au château. Il lui plait bien ce jeune seigneur, qui théoriquement n’est que de passage, seulement bientôt les soupçons pèsent sur lui. Alors qu’Alix s’était mis en tête que ce jeune seigneur serait le fiancé idéal de damoiselle Isabelle.

Heureusement Alix peut compter sur l’aide de son frère, un peu plus vieux qu’elle et qui est chargé de l’entretien des écuries, dans ses recherches. Pauvre Alix qui pense avoir trouvé le coupable et qui est obligée de se rendre compte qu’elle se fourvoie. Elle soupçonne chacun des prétendants, mais s’il s’agissait de quelqu’un d’autre ?

Et c’est ainsi que le lecteur la suit dans ses démêlés, ses déductions, ses à-priori également, mais elle n’est pas à l’abri d’un mauvais coup car bientôt elle devient la fouineuse qui gêne.

 

Un roman médiéval enlevé qui fait la part belle à une gamine indépendante et entreprenante. Son seul défaut se mêler de ce qui ne la regarde pas, au grand dam de sire Orderic, de dame Eusebia, la gouvernante de damoiselle Isabelle, et qui trouve toujours une excuse pour se défiler lorsque les autres servantes ont besoin d’elle.

C’est gentillet mais pour autant ce n’est pas naïf, au contraire. A l’instar de la vive Alix, ce roman d’action et de détection, fourmille de coups d’éclats, de joie de vivre (malgré les morts), de pétillance, d’humour.

 

E.B.P. : La bague aux trois hermines. Collection Zanzibar N°71. Editions Milan. Parution janvier 1991. 200 pages.

ISBN : 2867266254

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23 décembre 2019 1 23 /12 /décembre /2019 09:21

Attention, le petit oiseau va sortir…

Peter LOVESEY : Le bourreau prend la pose

Dans cette nouvelle enquête du sergent Cribb, dont nous avons fait la connaissance dans La course ou la vie, dix ans ont passé et huit enquêtes ont été conclues entre les deux affaires. D’ailleurs Le bourreau prend la pose ce sera la dernière apparition de ce personnage.

Le sergent Cribb n’a pas connu d’avancement, ce qui ne le tracasse pas outre-mesure. Le voici plongé dans une enquête qui est une contre-enquête, officieuse, avec laquelle il a plus à perdre qu’à gagner.

L’assistant d’un photographe est retrouvé empoisonné au cyanure. Meurtre, suicide ? La femme du photographe s’accuse et plaide coupable. Elle aurait agit ainsi pour se libérer d’un odieux chantage.

Oui, mais… mais une photographie découpée dans un journal et reçue par le ministre de l’Intérieur va tout remettre en question. La coupable est-elle vraiment coupable ?

Le sergent Cribb doit être extrêmement prudent au cours de cette enquête officieuse pour laquelle il n’est pas couvert.

 

Le personnage du bourreau décrit dans ce roman est particulièrement attachant, si je puis employer cette expression concernant un homme dont l’outil de travail est une corde.

Presque dix ans séparent la publication de La course ou la vie et ce roman. Il n’aura fallu qu’un mois pour La Librairie des Champs-Elysées, devenue de nos jours les Editons du Masque, pour réparer cet oubli. Pourtant, selon une aberration éditoriale ces deux romans sont le premier et le dernier d’une série de dix titres, les huit autres étant édités dans un savant désordre ou totalement oubliés. Les voies des éditeurs sont impénétrables !

Réédité sous le titre La Photo du bourreau. Collection Labyrinthes n°5. Éditions Le Masque. Parution 2 avril 1997.

Réédité sous le titre La Photo du bourreau. Collection Labyrinthes n°5. Éditions Le Masque. Parution 2 avril 1997.

Peter LOVESEY : Le bourreau prend la pose (Waxwork – 1978. Traduction de Christiane Poulain). Collection Le Masque Jaune N°1803. Editions Librairie des Champs-Elysées. Parution octobre 1985. 192 pages.

ISBN : 9782702416563.

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19 décembre 2019 4 19 /12 /décembre /2019 06:45

Et je cours, je cours
Après quoi je cours,
Mais j'aimerai bien que l'on me dise un jour,
Après quoi je cours.

Peter LOVESEY : La course ou la vie

Les romans de Peter Lovesey, lorsqu’ils furent publiés en France, se démarquaient de la tendance du roman noir qui à l’époque envahissaient, et envahissent encore, les étals des libraires. Des ouvrages particulièrement intéressants par le ton, le style, l’humour discret  et implantés dans la fin du XIXe siècle qui fut marquée par l’affaire de Jack l’Eventreur.

Mais Peter Lovesey explora cette période sans emprunter au célèbre criminel, proposant des situations insolites qui avec le recul ne sont pas éculées ou désuètes.

Dans ce roman, situé dans le Londres de 1879, le sergent Cribb doit découvrir le meurtrier d’un coureur à pied, puis de son entraîneur, avec en toile de fond l’ambiance d’un sport bien particulier : une course d’endurance, à pied, durant six jours, dans une halle transformée pour ce concours en complexe sportif.

Comme dans toute compétition, matchs ou réunions sportives, il y a des favoris et des tocards, des professionnels et des amateurs, mais à qui cela peut-il profiter ? Peut-être l’argent, clé de voûte de ce genre de réunions. Les gains de la course, les enjeux, les paris des spectateurs, des bookmakers, des investisseurs, et des dettes qui peuvent en résulter.

 

La course ou la vie, titre de ce court roman, aurait peut-être gagné en consistance en développant un peu plus les phases de la course proprement dite, l’ambiance régnant dans les tribunes, les différentes réactions des spectateurs, les heurs et malheurs des différents concurrents.

Mais il est vrai que c’est le premier roman policier de Peter Lovesey, lauréat d’un concours organisé en 1969 par l’éditeur McMillan/Panther.

 

Peter LOVESEY : La course ou la vie (Wobble to Death – 1970. Traduction de Jean-André Rey). Le Masque Jaune N°1798. Edition Librairie des Champs-Elysées. Parution septembre 1985. 128 pages.

ISBN : 9782702416464

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17 décembre 2019 2 17 /12 /décembre /2019 05:56

Sous le soleil, exactement…

Jacques SADOUL : Trois morts au soleil.

Pour la jeune commissaire Ledayon, Muriel de son prénom, nouvellement installée à Marseille, l’affaire qui lui échoit semble compliquée à souhait.

Sylvain Pridat, photographe à Cassis, est abattu d’une balle de revolver. Si seulement elle pouvait trouver un motif à ce meurtre ! Peut-être une histoire de photos, un trafic quelconque ?

Mais après le photographe, c’est un croupier puis un agent immobilier qui décèdent de la même façon.

Les soupçons de Muriel se portent d’abord sur Solange Destain, jeune femme entretenue par les deux dernières victimes, et qui avait eu des relations avec la première. Puis c’est sur Magali Chamin, la femme du croupier, que les suspicions de Muriel se focalisent. Soupçons alimentés par tout un faisceau de présomptions, de probabilités, de possibilités matérielles. Surtout que Magali est la reine du mensonge. Mais de preuves formelles, point !

 

Ce roman de Jacques Sadoul, qui obtint le Grand Prix de Littérature Policière en 1986, est un roman que le lecteur lit avec jubilation et délectation. En effet, le lecteur suit l’enquête de Muriel, assiste à ses tâtonnements, ses erreurs, ses amours aussi en passant, alors que dès la première page l’identité du coupable est dévoilée. Dévoilée, enfin presque, puisqu’il ne manque que le nom. Et le lecteur voudrait bien la guider la pauvrette.

Construit un peu comme un livre-tiroir, un livre gigogne, ce roman nous réserve un épilogue digne en tout point des maîtres de la littérature policière.

Jacques SADOUL : Trois morts au soleil. Editions du Rocher. Parution 1er avril 1986. 230 pages.

ISBN : 978-2268004495

Réedition J’ai Lu Policier N°2323. Parution avril 1989. 256 pages.

ISBN 2-277-22323-9

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Présentation

  • : Lectures de l'Oncle Paul
  • : Bienvenue dans la petite revue de la littérature populaire d'avant-hier et d'hier. Chroniques de livres, portraits et entretiens, descriptions de personnages et de collections, de quoi ravir tout amateur curieux de cette forme littéraire parfois délaissée, à tort. Ce tableau a été réalisé par mon ami Roland Sadaune, artiste peintre, romancier, nouvelliste et cinéphile averti. Un grand merci à lui !
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