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20 août 2019 2 20 /08 /août /2019 04:00

Elle était si jolie
Que je n'osais l'aimer…

Paul DARCY : Si belle.

Trentenaire, le comte Robert de Tanville aime vaquer dans son vaste cabinet de travail, au milieu de ses livres, de ses bibelots et de ses archives familiales.

Ce matin là, sa femme de charge, la bonne Madeleine vieillissante, lui apporte, en même temps que ses journaux, une lettre en provenance d’Algérie. La misive émane de la veuve de son ancien général, madame Louise Bouvray, qui lui annonce son intention de quitter Alger et de s’installer dans la région avec ses deux filles, Hélène et Josette. Le père de Robert, le colonel de Tanville, et le général étaient amis, et c’est tout naturellement que la veuve du général Bouvray lui demande un asile momentané.

Il va donc chercher à leur arrivée au train madame Bouvray et ses deux filles. Aussitôt Robert est impressionné par la beauté d’Hélène, dix-huit ans. Sa plus jeune sœur Josette est belle elle aussi mais un peu plus fade. Une joliesse un peu moins prononcée. Mais au point de vue caractère, les deux jeunes filles sont totalement différentes. Autant Hélène est hautaine, bipolaire, aguicheuse, autant Josette est serviable et attentionnée.

Pourtant c’est bien d’Hélène que Robert s’éprend, au grand dam de Madeleine. Et lorsqu’il offre à la famille Bouvray de s’installer à La Renardière, une propriété qu’il possède non loin, c’est avec joie que cette proposition est acceptée. Il va leur rendre visite quasi quotidiennement, mais il souffre car Hélène n’a de cesse d’inviter quelques personnes qui lui tournent autour. Dont un certain lieutenant, ce qui attise la jalousie de Robert, même s’il se garde de le montrer.

 

Ce roman est gentillet mais il pèche par son épilogue rapidement expédié et qui laisse de nombreux points d’interrogation en suspend.

Notamment cette lettre anonyme (qui n’est pas signée, bien évidemment) lui indiquant qu’Hélène rencontrerait le beau lieutenant de Franchay en catimini à la lisière d’un bois jouxtant La Renardière. Bon, le lecteur s’imagine quel peut-être l’expéditeur, mais cela aurait demandé quelques explications et précisions.

Ensuite, comment se fait-il que Robert de Tanville, trentenaire posé, appréciant la solitude et le calme, s’entiche d’une jeune fille inconstante, et apparemment volage ? Pourquoi ne s’intéresse-t-il pas plus à Josette, dont le caractère s’approcherait du sien ?

Ce roman donne l’impression d’avoir été écrit à la va-vite, comme si l’auteur était pressé de rendre sa copie. Des ellipses dans la narration confortent cette impression.

Et alors que Robert de Tanville demeure en Anjou, l’auteur cite la ville de Chambly qui est dans l’Oise !

Paul DARCY : Si belle. Collection Les Romans de la vie N°28. Editions C.E.P. Parution 1er trimestre 1946. 32 pages.

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17 août 2019 6 17 /08 /août /2019 04:17

La suite du Capitaine Tempête et quelques interrogations sur l’auteur !

RICHARD-BESSIERE : Le retour du capitaine Tempête.

Quelques mois plus tard après les événements décrits dans Capitaine Tempête, début 1778, Bruce Anderson, accompagné de Catherine, rejoint Brest à bord du Sea Bird.

Il a à son bord des diplomates américains qui doivent en compagnie de Franklin, déjà arrivé à Paris, convaincre Louis XIV et à son ministre Vergennes de reconnaître l’indépendance des Etats-Unis. Un événement qui entraînerait d’autres pays, dont l’Espagne, à admettre cet état de fait, ne serait-ce que par haine de l’Angleterre. Bruce et ses compagnons Cachalot et O’Brien, ainsi que Catherine, sont reçus en triomphateurs à Brest et ils sont invités chez les Coedec. Seul Yves Coedec, toujours amoureux de Catherine et marié à Solange, ne participe pas à ces réjouissances. Il n’est pas d’accord avec son père et le fait savoir.

Bruce doit repartir vers Norfolk, son bâtiment chargé de munitions, seulement des marins sont atteints du scorbut et il doit renouveler une partie de l’équipage. Pendant ce temps à Londres, Lord Grégory Maxwell n’a pas dit son dernier mot et souhaite toujours non seulement unir Edgar à Catherine, mais s’emparer du capitaine Tempête. Il débarque à Brest et promet sa fille à Yves Coedec en échange d’un petit service. Le jeune homme doit fournir à Bruce des hommes dévoués aux Anglais en remplacement des matelots déficients.

Yves accepte et Bruce recrute en toute confiance les nouveaux membres. Seul l’un d’eux semble louche aux yeux d’O’Brien et Bruce le met à la raison. Yves est obligé d’embarquer avec eux, afin de remettre la cargaison en échange de denrées telles que tabac et café. Au cours du voyage, alors qu’Yves confesse sa félonie, la mutinerie s’enclenche. Bruce et ses hommes parviennent non sans mal à prendre le dessus. Les rebelles, ou ce qu’il en reste, sont balancés à la mer et Yves confié à la grâce de Dieu dans une barque avec quelques jours de vivres.

Parmi les mutins, une jeune femme nommée Gloria est graciée par le Capitaine. Elle voue une haine farouche depuis la mort de son frère, décédé lors de l’insurrection de Norfolk qui a permis la libération d’Anderson. Une violente tempête malmène le navire et les organismes des marins restants, détournant le Sea Bird de sa route. Englué dans les algues de la mer des Sargasses, Bruce tente par tous les moyens d’arracher son vaisseau des plantes marines qui prolifèrent plus vite qu’elles sont coupées.

Les rations sont diminuées afin de ne pas succomber à la disette. Un ouragan libère le navire et peu après Bruce et ses hommes aperçoivent parmi les nombreux navires qui errent depuis des décennies dans les eaux traîtresses, un ancien galion espagnol qui transportait un trésor aztèque. Bruce s’empare des coffres contenant objets de valeur, or et pierres précieuses afin d’alimenter la caisse des révolutionnaires américains. Anderson rencontre les membres du Congrès à Lancaster et leur impose ses conditions. Il veut que le trésor soit affecté à Washington et ses hommes et non à quelques magouilles quelles qu’elles soient. Le Congrès est obligé d’accepter et peu après Bruce rencontre le fameux général. Ensuite il rentre à Tomstown afin de préparer l’expédition du pactole. Le convoi aura lieu par terre, conduit par Cachalot, O’Brien et quelques autres, tandis qu’il sillonnera l’océan dans l’esprit d’attirer à lui l’armée anglaise. Pour ce faire il feint d’être attiré par le charme de Gloria, lui dévoile qu’il convoiera le trésor et la laisse s’échapper, persuadé que la réaction de la jeune femme sera de prévenir l’oppresseur. Tout se déroule sans encombre et Bruce regagne son havre de paix.

Lord Maxwell, toujours lui, n’a pas changé d’un iota dans ses idées. Et la présence de Gloria devenue la maîtresse de son fils va lui donner une idée. Un jour Bruce reçoit à son bord un émissaire du Lord lui indiquant que Maxwell désire une entrevue, ses sentiments à l’égard du pirate ayant radicalement changé. Catherine est circonspecte mais Bruce néanmoins accepte. C’était un piège et Bruce est fait prisonnier et dans la foulée un prêtre uni Edgar à Catherine qui n’en peut mais. Quelques mois plus tard, Cachalot et O’Brien qui ont connu bien des vicissitudes et des aventures maritimes depuis la capture de leur capitaine préféré, échouent près de Savannah, recueillis par une famille de pêcheurs. Ils y retrouvent par hasard Yves Coedec qui n’a pas péri en mer comme ils le pensaient mais a connu lui aussi pas mal de tribulations. Il fait partie de l’escadre de l’amiral d’Estaing et dorénavant se fait appeler Charles Baron.

Personne ne sait qu’il est vivant. Il doit évaluer les canons et batteries qui protègent Savannah, afin que l’amiral puisse s’emparer du port. Mais les autorités de Savannah connaissent les projets de l’amiral et la défense est acharnée. Coedec et ses amis Cachalot et O’Brien sont surpris par des soldats anglais alors qu’ils étaient cachés dans une grange. Ils sont menés devant un conseil de guerre expéditif. Ils s’attendent à être pendus ou fouettés jusqu’au sang, mais heureusement pour eux, une bonne fée veille en la forme de Gloria. La farouche adversaire des patriotes fait libérer les trois hommes, répondant d’eux. Elle rumine sa vengeance à l’encontre d’Edgar et dévoile sur l’oreiller à Yves où résident les nouveaux mariés : New York.

 

Placé sous le signe des trois A, Amour, Action, Aventures, Capitaine Tempête et Le retour du capitaine Tempête nous proposent un épisode glorieux pour la France, l’émancipation des Etats-Unis. Un esprit d’autonomie, d’indépendance flotte sur la nation, pardon sur le royaume français, avec le désir avoué surtout contrarier et même combattre l’hégémonie anglaise sur les mers et par conséquence sur terre. Evidemment, les armes et munitions ne sont pas fournies gratuitement aux insurgés. En contrepartie ceux-ci doivent alimenter les besoins de nos ancêtres en tabac et en café.

Reconnaissez qu’aujourd’hui s’élèvent de nombreuses divergences quant à la suprématie américaine qui alors était inexistante et à ce goût de luxe cancérigène actuellement prohibé concernant l’herbe à Nicot. Mais n’entrons point dans de douloureuses polémiques et restons dans le contexte historique de l’époque, c’est à dire fin des années 1770 début 1780.

La France donc, par le biais de Beaumarchais entretient des relations privilégiées avec les révoltés américains, qui rappelons le forment déjà une fédération composée de treize états, et qui sont aidés dans leur démarche libératrice envers le joug anglais par de jeunes généraux comme Rochambeau et Lafayette, lequel réglait la solde de son armée avec ses propres deniers. Quelques années plus tard la Révolution éclatait, la royauté aussi, et tout doucement les Etats-Unis s’unifiaient. Une période faste, entre autres, pour exacerber l’esprit aventureux des hommes (et des femmes) épris de liberté dans un monde en mouvement à la recherche d’une nouvelle façon de vivre, d’exister. La Liberté éclairant le Nouveau Monde émanera donc à plusieurs titres, et sous de multiples formes, de la France mais il ne faut pas pourtant se cacher la face. Il s’agit bien de revanche, de compétition, envers un autre état dominant. La rivalité s’exerçant outre mer, à l’Occident, du Canada jusqu’en Louisiane.

Mais je m’éloigne car Richard-Bessière ne fait qu’écrire une page d’histoire mettant en valeur certes un corsaire, d’où les titres des deux volumes, mais surtout, et cela est quasiment occulté par justement les intitulés des romans, la volonté, le courage, l’esprit de décision, le sang-froid, l’énergie qui se dégagent d’une jeune femme. Catherine Lagrange restera une figure inoubliable par sa grâce, sa vitalité, son dynamisme, sa candeur parfois, sa beauté, sa grâce émouvante, sa fidélité à un homme, à un idéal, son abnégation. Si vous voulez en rajouter, vous pouvez.

 

RICHARD-BESSIERE : Le retour du capitaine Tempête.

Au fait, j’allais oublier de vous signaler que ces deux romans signés Richard-Bessière ne sont que des rééditions au Fleuve Noir, sans mention d’une première édition, et qu’ils avaient paru en 1953 et 1954 aux éditions André Martel sous les titres respectifs de Pour le meilleur et pour le pire et Capitaine Tempête, et signées Ralph Anderson.

Comme on peut s’en rendre compte le titre du premier volume a donc été changé lors de sa réédition reprenant tout simplement celui du deuxième tome de l’édition originale. Les couvertures étaient signées Jef de Wulf et Gourdon s’en inspirera pour la réédition au Fleuve Noir. Elles seront plus épurées et le graphisme amélioré mais l’esprit est le même.

Or, un mystère cependant demeure. Ces romans sont-ils vraiment de Richard Bessière ? Selon certains Ralph Anderson serait le pseudonyme conjoint de Richard Bessière et François Richard, alors directeur de collection au Fleuve Noir et qui ont signé les premiers Anticipation de Bessières sous le nom de Francis Richard-Bessières. Mais dans un courrier échangé avec Bessière, celui-ci ne m’a jamais indiqué cette première édition, ni ce pseudonyme.

Alors que penser ? Que son père serait éventuellement l’auteur des deux romans et que lui-même les aurait fait rééditer par la suite sous son nom ? Ensuite pourquoi publier ces deux romans initialement chez Martel puisque la collection Grands Romans était en gestation et a démarrée fin 1954.

D’ailleurs de très nombreux points d’interrogation sont toujours en suspend concernant les premiers romans de Bessière et sa collaboration avec François Richard, collaboration qu’il a toujours nié. En effet il argue du fait que c’est son père qui signa le contrat le liant au Fleuve Noir sous la houlette de François Richard, dont il était un ami, ne pouvant le faire lui-même car il était mineur. Or, comme chacun sait, Bessière est né en 1923 donc en 1951, date de la parution de Les Conquérants de l’Univers, premier volume de la collection Anticipation, Bessière était âgé de 28 ans et donc pouvait voler de ses propres ailes.

Mais il a toujours entretenu l’ambigüité concernant ce pseudonyme de F. Richard-Bessière ainsi que celui F.H. Ribes en affirmant qu’il s’agissait de ses propres initiales et agglutination de ses prénoms et nom.

F. Richard-Bessière puis Richard-Bessière pour Anticipation et F.R. Ribes peuvent très bien se décliner ainsi :

Pour F. Richard-Bessière et Richard-Bessière : François Richard et Henri Bessière. Pour F.R. Ribes : François et Richard, puis Richard pour RI et BES pour Bessière.

Mais dans tous les cas, il a toujours affirmé qu’il s’agissait d’une seule et unique personne, lui, rédigeant ces romans, avançant qu’il se prénommait François Henri Michel Bessière. Or, ce prénom de François ne figure pas à l’état-civil. Mais comme selon lui, on l’aurait toujours appelé François chez lui, pourquoi se gêner…

Selon la revue Lunatique n°27, de mars 1967, les premiers romans Anticipation auraient été rédigés en collaboration avec Bessière père et dateraient de 1941 !

Tout ceci est bien trouble et troublant n’est-ce pas ?

 

Cet article et Capitaine Tempête ont fait l’objet d’une publication, quelque peu différente dans l’ouvrage Richard-Bessière, une route semée d’étoiles paru en 2005 aux éditions L’œil du Sphinx.

RICHARD-BESSIERE : Le retour du capitaine Tempête. Collection Grands Romans. Editions Fleuve Noir. Parution décembre 1970.

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16 août 2019 5 16 /08 /août /2019 04:49

Comme un ouragan …

RICHARD-BESSIERE : Capitaine Tempête.

Catherine Lagrange, un peu plus de seize ans, orpheline – son père est inconnu et sa mère est décédée quelques mois après sa naissance - est élevée dans un couvent situé entre Brest et Morlaix. Tout en acquérant une instruction assez poussée, elle participe aux activités domestiques, n’étant pas comme ses condisciples une riche héritière. C’est ainsi qu’en compagnie du père Mathieu, l’homme à tout faire du couvent, elle se rend à Brest afin d’effectuer quelques emplettes nécessaires à la vie scolaire. Elle y fait la connaissance d’Yves Coedec, d’une manière fugitive mais prépondérante.

Quelque temps plus tard elle surprend une conversation entre un homme et Sœur Marthe, qui dirige le couvent. Une âpre discussion oppose Sœur Marthe à Lord Maxwell. Celui-ci prétend récupérer sa fille Catherine afin de lui faire épouser son neveu, sous un prétexte bassement matériel. Il est le fondateur et le président d’une société d’exportation et d’importation maritime l’Indian Pacific, et acculé à la faillite il n’a d’autres ressources que d’organiser cette union susceptible de le renflouer. Sœur Marthe réserve sa réponse mais Catherine refuse de rencontrer cet homme, dont elle ignore l’identité.

La jeune fille décide de quitter le couvent et se rend à Brest. Elle se fait embaucher comme dame de compagnie chez les Coedec, retrouvant avec plaisir Yves dont les fiançailles avec Solange sont imminentes. Riche armateur, Coedec père entretient avec les opposants américains qui fomentent la guerre d’Indépendance, des relations étroites et plus particulièrement avec Bruce Anderson, surnommé le Capitaine Tempête. Il envisage d’affréter des navires dont la cargaison serait constituée d’armes afin d’aider les rebelles dans leur combat contre le roi d’Angleterre George III, avec l’aval de ministres de Louis XVI et d’hommes politiques dont Beaumarchais.

Lors d’une promenade dans la campagne bretonne, Yves se montre un peu trop entreprenant auprès de Catherine qui le remet à sa place. Elle le considérait simplement comme un frère et son geste déplacé la choque. Mais elle continue à le considérer comme un ami. Le secrétaire et confident de Lord Maxwell, William Ferraby, a retrouvé la trace de Catherine et il tente de convaincre celle-ci de rejoindre son père. Si elle n’obtempère pas, il dévoilera aux Coedec sa véritable identité lesquels penseront immédiatement avoir recueilli une intrigante.

Déboussolée, la jeune fille erre dans Brest. Elle tombe nez à nez avec le père Mathieu et lui narre ses malheurs. Il assure à sa protégée que tout va s’arranger. Il donne rendez-vous à Ferraby et l’assassine, presque malgré lui. Regagnant le couvent sa carriole se renverse et le père Mathieu décède dans l’accident. Pendant ce temps Bruce Anderson débarque chez ses amis les Coedec. Il veut connaître les projets de Maxwell sur un éventuel blocus de la part des Anglais. Pour cela il faudrait que quelqu’un rejoigne Plymouth où Shannon, un de ses agents, est établi. Catherine, en dette envers Anderson, se propose, puisqu’elle maîtrise parfaitement l’anglais, d’effectuer cette mission. Arrivée sur place, le 1er janvier 1776, elle contacte immédiatement Shannon. Mais il est à la solde de Lord Maxwell qui séquestre aussitôt la jeune femme.

Dix-huit mois plus tard, Bruce Anderson arraisonne près des côtes américaines un bâtiment anglais. Parmi les passagers, Catherine et sa gouvernante, miss Hawkins, véritable cerbère qui la surveille nuit et jours. Bruce n’a pas digéré l’échec de Plymouth. Il croit en toute logique que Catherine les a grugé lui et les Coedec. Elle a beau essayer de lui raconter son histoire, il ne veut pas l’entendre, d’autant que Shannon a été retrouvé mort peu de temps après l’arrivée de la jeune fille en terre anglaise.

Cachalot, le maître canonnier ne peut s’empêcher d’éprouver une certaine sympathie envers la prisonnière. Les deux femmes et quelques soldats rescapés sont débarqués sur les côtes de la Virginie, non loin de Norfolk. C’est ainsi que Catherine, se retrouve malgré elle chez son oncle, le gouverneur de la Virginie Lord Maxwell, et son cousin Edgar, le futur promis. Bruce Anderson apprend de source sûre par le capitaine Berthier, envoyé par Coedec, que Shannon était un traître à leur cause. Aussitôt il organise la libération de Catherine, le jour même où elle devait se marier avec Edgar.

La jeune fille est mise en sûreté dans un ranch, non loin de Tomstown où mouille le Sea Bird, le navire d’Anderson, appartenant à Dolorès, la maîtresse du corsaire. Mais Catherine est amoureuse du fringant Bruce et comme c’est réciproque, il n’en faut pas plus pour que s’accomplisse un rapprochement au grand dam de Dolorès. Le gouverneur Maxwell fait répandre le bruit que le Sea Bird a été pris en chasse par la flotte anglaise, coulé et que de nombreux membres de l’équipage sont dans les geôles de Norfolk. Aussitôt Anderson décide de se rendre dans la capitale de la Virginie mais heureusement, O’Brien, le second du navire, Cachalot et John Smith se lancent à la rescousse.

A eux quatre ils mettent en déroute l’armée qui attendait de pied ferme le corsaire et ils retournent au ranch. Seulement Maxwell connaît pratiquement le lieu de leur refuge et des militaires anglais campent dans la région. Tandis qu’Anderson et d’autres corsaires vont à l’encontre de la flotte de Coedec afin de les protéger des attaques maritimes anglaises, la pauvre Catherine n’est pas au bout de ses avatars. Dolorès, rongée par la jalousie, la dénonce au représentant du gouverneur et Catherine est à nouveau enfermée dans le palais gouvernemental de Norfolk. Bruce, sa mission terminée rentre au ranch mais il est capturé lui aussi par les Anglais. Dolorès se rend compte qu’elle a fait une grosse bêtise et elle veut se racheter.

Pendant ce temps Catherine, mise au courant de la situation par son futur beau-père passe à l’acte. Elle s’échappe du palais, obligeant Edgar à la suivre et confie son otage à des rebelles américains. Dolorès tente de délivrer Bruce mais la relève de la garde empêche son projet. Elle est mortellement blessée et Bruce comparaît devant une mascarade de tribunal. Catherine a alerté Cachalot et O’Brien et elle débarque en compagnie des corsaires dans le port de Norfolk. Alors qu’il allait être pendu haut et court Bruce rue dans les brancards tandis que les insurgés se ruent sur les portes du palais. Un duel oppose le gouverneur à Bruce. Maxwell est mortellement blessé, et son fils Edgar a réussi à filer à l’anglaise.

Bruce peut enfin filer le parfait amour avec Catherine après avoir recueilli les derniers mots de repentance de la part de Dolorès. Fin du premier tome sur ces phrases qui semblent définitives : Ils se retrouvèrent sur la grande terrasse dominant la mer. Devant eux, sur les flots ensoleillés, se balançait le Sea Bird toutes voiles dehors… Ces grandes voiles gonflées de vent et d’espoir… d’amour et de liberté !

 

A première vue, et en se fiant au titre, le lecteur pourrait penser que ce roman serait entièrement dédié à l’héroïsme masculin, le héros bravant mille et un dangers. Si en partie ce souhait est réalisé, il convient toutefois mettre en avant le personnage de Catherine, dont on sait seulement qu’elle est issue des amours adultères d’un Lord anglais et d’une mère probablement de souche plébéienne. Catherine se montre dès sa prime adolescence comme une jeune fille courageuse, aussi bien en action qu’en parole, la force de caractère dont elle est pétrie étant transcendée plus tard par l’amour et son corollaire, la haine.

Ainsi elle gifle l’une de ses condisciples, riche héritière, qui, l’odieuse, la traite de bâtarde. Sœur Marthe comprend la rébellion de la jeune Catherine mais elle ne peut supporter que deux de ses pensionnaires se chicanent, même si le geste de Catherine est compréhensible. Elle demande donc aux deux adolescentes de se réconcilier.

Catherine rêve de découvrir la mer et reproduit sur des toiles sa passion, peignant des voiliers. Mais ses connaissances maritimes sont nettement moins étendues que celles de Melle de Bretteuse. Celle-ci jette un coup d’œil indifférent sur les dessins de Catherine et persifle : “ Très drôle, mon amie, mais je crois que vous avez tort d’essayer de reproduire quelques chose que vous n’avez jamais vu ”. A quoi Catherine, sans se démonter, réplique : “ Vous semblez oublier, ma chère, que nombre de peintres de talent ont maintes et maintes fois représenté le ciel, le purgatoire et l’enfer. Vous pensez sans doute qu’ils ont eu l’occasion de les visiter ? ”.

Cette force de caractère, Catherine aura l’occasion de la mettre en valeur aussi bien dans ses relations avec Yves Coedec, que dans ses engagements au côté de Bruce Anderson. Elle se révèlera même décisive dans ses interventions, usant non de ses charmes mais de son courage. Elle n’est pas vénale, contrairement à une autre figure de proue féminine du roman, Dolorès. Car la Métisse, comme elle est surnommée, cédant à la jalousie perd l’homme qu’elle aime et malgré ses remords, elle ne pourra survivre à ses trahisons. Catherine la blonde et Dolorès, la brune, deux entités qui se confrontent incarnant le Bien et le Mal.

Sans s’appesantir sur les descriptions physiques et morales des divers protagonistes de ce roman, ce qui évidemment pourrait être intéressant en soi mais alourdirait cet article, penchons nous sur une figure connue : Pierre Augustin Caron de Beaumarchais. Si aujourd’hui il est plus connu comme homme de théâtre, auteur entre autre du Barbier de Séville, Beaumarchais se montra particulièrement actif en faveur des patriotes, des indépendantistes américains.

Richard-Bessière le décrit ainsi : …Malgré ses quarante trois ans bien sonnés, (il) était un homme extrêmement actif qui donnait l’impression d’une perpétuelle jeunesse. Très sympathique, parlant un langage direct, son talent d’écrivain et ses succès littéraires faisaient de lui un homme de premier plan. Mais si Beaumarchais devait un jour être connu surtout comme auteur dramatique, il était principalement un intrigant aimant l’aventure, et qui n’hésitait pas à faire preuve de la plus grande désinvolture quant aux expédients à employer. Le trait le plus saillant de son caractère résidait dans son amour insensé de la liberté. De là à aimer puis à essayer de favoriser le mouvement de révolte américain, il n’y avait qu’un simple pas qu’il n’avait pas hésité à franchir lorsqu’il avait fait la connaissance à Londres d’Arthur Lee. Certains le représentaient comme un aventurier de profession, alors que Caron de Beaumarchais était tout au plus un exalté qui se donnait corps et âme à ses sentiments du moment.

D’autres personnages historiques font de brèves apparitions ou sont simplement nommés, comme par exemple La Fayette, mais c’est pour mieux transposer la fiction dans la réalité.

Demain, suite avec le second volume de cette passionnante histoire.

 

 

RICHARD-BESSIERE : Capitaine Tempête. Collection Grands Romans. Editions Fleuve Noir. Parution juillet 1969.

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8 août 2019 4 08 /08 /août /2019 03:53

On s'est connu, on s'est reconnu,
On s'est perdu de vue, on s'est r'perdu d'vue
On s'est retrouvé, on s'est réchauffé,
Puis on s'est séparé.

Robert GAILLARD : Guayaquil de mes amours.

Agent d’une compagnie fruitière panaméricaine, Henri Chaudet est fort étonné d’ouvrir l’huis de sa chambre d’hôtel à deux policiers, dont l’intendant de police Emilio Moraldo.

L’intendant de police, ou inspecteur, lui annonce qu’Evelyne Deloste est décédée, et il invite (fermement) Chaudet à lui fournir de plus amples précisions sur cette quadragénaire.

Chaudet est en poste à Guayaquil depuis cinq ans et il tombe des nues. Il a fort bien connu Evelyne, vingt ans auparavant, leurs chemins s’étaient séparés, puis croisés à nouveau cinq ans auparavant à Paris, au Ritz. Mais il ne savait pas que son ancienne maîtresse habitait la même ville que lui. C’est une lettre qu’il avait adressée à Evelyne, il y a fort longtemps, déposée sur une table avec un début de réponse, qui a fourni aux policiers son nom.

Lorsqu’il se présente le lendemain au commissariat afin d’apporter moult précisions, Chaudet aperçoit une jeune fille, légèrement métissée, qui attend elle aussi. Moraldo lui apprend qu’Evelyne Deloste a été assassinée et que son corps a été retrouvé pendu à la fenêtre de sa chambre alors que toutes les ouvertures, porte et fenêtres, étaient closes. Evelyne avait reçu un coup de poignard dans le flanc et le sang avait abondamment coulé. Pour Moraldo, il s’agit sans conteste possible d’un meurtre et non d’un suicide. D’ailleurs l’arme blanche n’a pas été retrouvée.

La jeune fille qui est reçue ensuite par Moraldo se nomme Diana Sajon, et est, ou plutôt était, l’amie et l’employée d’Evelyne. C’est elle qui a découvert le drame en compagnie de voisins appelés à la rescousse. Elle dormait dans la maison d’Evelyne mais n’a rien entendu.

 

Attablé à la terrasse d’un café, à la sortie du commissariat, Chaudet aperçoit la jeune fille et il l’aborde. C’est ainsi que Diana lui apprend qu’Evelyne a eu un garçon Tony, et surtout, comment elle a connu celle qui était devenue son amie lorsqu’elle avait treize ans à Port-au-Prince. Mais Diana est dans le collimateur de Moraldo qui la fait suivre par ses hommes. Pourtant elle parvient à leur échapper. Dans quel but ? Peut-être une histoire d’héritage.

 

C’est une plongée dans les souvenirs de Chaudet qui se remémore où et quand il a vu pour la première fois Evelyne à la fin de la guerre. Sur un navire qui le transportait vers les Antilles. Elle était seule, altière, et l’un des voyageurs avec lequel il sympathisa l’avait surnommée la Reine de Saba. Puis leur attirance alors que Chaudet était en poste à Fort-de-France, déjà agent pour la Compagnie fruitière. Comment ils se sont aimés, puis perdus de vue, retrouvés bien des années plus tard. Comme dans la chanson interprétée par Jeanne Moreau.

 

Ce récit, narré à la première personne par Chaudet, puise dans ses souvenirs ainsi que dans la narration de Diana Sajon. L’histoire d’Evelyne, devenue prostituée sous la férule d’un maître-chanteur et d’un maquereau, et qui connut bien des vicissitudes mais ne se départit jamais de sa fierté.

Une histoire qui emprunte à des épisodes durant la dernière guerre, et s’étale sur un peu plus de vingt ans. Avec de nombreuses interrogations. Celles de Chaudet notamment qui connaissant le racisme d’Evelyne, son appréhension envers les Noirs, eut toutefois un enfant de couleur.

Une histoire qui imbrique les différents parcours de Chaudet, dans ses différents postes dans les Antilles et en Amérique Latine, celui d’Evelyne que l’on découvre grâce aux révélations de Chaudet et de Diana, et le dernier, celui de Diana lorsqu’elle fut confiée jeune à Evelyne et ce qui s’ensuivit.

Guayaquil de mes amours est tout autant un roman historique, un roman policier, un roman d’aventures qu’un roman d’amour. La partie policière réside en ce meurtre en chambre close dont l’intendant Moraldo pense avoir résolu l’énigme. Et en dernière partie de roman, il explique même comment cela a pu se dérouler. Sa démonstration est simple, claire, logique, irréfutable… et pourtant elle est fausse. Car une autre solution existe, et c’est tout l’art de Robert Gaillard de nous la fournir d’une façon incontestable.

Quant à la partie historique, elle prend sa source durant la seconde guerre mondiale, avec l’accointance d’Evelyne avec la Résistance. Puis lors de la Libération, lorsque tout se décanta, mais pas toujours en faveur de ceux qui jouèrent un rôle obscur mais parfois primordial.

Peu de personnages dans ce roman, mais des personnages forts, dont la présence s’impose malgré leur statut de bons ou de méchants. Et le fantôme d’Evelyne est tenace, avec sa part d’ombre et de lumière. Elle resplendit et pourtant il demeure toujours un côté de sa personnalité dans l’ombre.

Et lorsque Robert Gaillard avance des explications sur certains épisodes, elles sont contredites un peu plus tard, car Chaudet, le narrateur, ne possède pas toutes les clés et les portes s’entrouvrent peu à peu. Le lecteur a l’impression de s’aventurer dans une suite de pièces qui s’éclairent au fur et à mesure, d’une lumière vive ou atténuée.

De Paris à la Martinique, d’Haïti jusqu’en Equateur en passant par la Jamaïque, Robert Gaillard nous emmène sur les traces des agents chargés de négocier l’achat de fruits exotiques, principalement des bananes, mais également de ceux qui trouvèrent des points de chute fructueux.

 

Je me disais qu’en amour aucune des femmes que j’avais connues n’avait eu le même comportement qu’une autre ; elles présentaient des différences plus ou moins sensibles. Comme les visages humains ne se ressemblent pas, bien qu’ils aient deux yeux, un nez, un front, une bouche.

Robert GAILLARD : Guayaquil de mes amours. Collection Grands Romans. Editions du Fleuve Noir. Parution le 3e trimestre 1968. 380 pages.

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4 août 2019 7 04 /08 /août /2019 04:57

Le vizir qui voulait être calife à la place du calife...

André BESSON : Aventure à San Miguel.

La petite république de San Miguel, nichée entre la Cordillère des Andes et le Pacifique, est en effervescence. Une grande corrida, à laquelle doit assister le président Rodriguez, se déroule l'après-midi avec en vedette le célèbre torero Paquito Parra.

Cependant la révolution couve avec comme protagonistes, d'un côté les mal-lotis, les miséreux, les Rouges, et de l'autre, une fraction de l'armée qui se rebelle, décidée à destituer le Président. Rodriguez ne se rend compte de rien, dépendant du Ministre de l'Intérieur, Alvarados, qui alimente la haine et est à l'origine de la grogne.

Alvarados connaît les tenants et aboutissants du complot des deux camps et tire les ficelles afin de s'octroyer le pouvoir.

L'écrivain Antonio Barrios, qui revient au pays sous une fausse identité et après une opération de chirurgie esthétique, Célia, la fille de Rodriguez, qui se bat contre l'analphabétisme, le colonel Ruiz, amoureux de la fille du président et membre de la conjuration militaire, plus quelques autres personnages traversent ce récit dont l'action se passe dans une république fictive, reflet des juntes militaires sud-américaines manipulées.

 

Besson dénonce sans en avoir l'air la participation active de la CIA, pour ne pas dire l'ingérence, et l'apport éducatif des émigrés nazis dans les organisations gouvernementales et militaires.

Aventure, action et amour sont au programme de cette histoire qui plaira aux amateurs de tauromachie et d'exotisme mais manque peut-être un peu d'épaisseur dans la description de la misère locale et la révolte des gueux.

 

André BESSON : Aventure à San Miguel. Collection Grands Romans. Editions Fleuve Noir. Parution septembre 1969.

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10 juillet 2019 3 10 /07 /juillet /2019 04:55

Ce doit être humide dedans !

Paul VIALAR : La maison sous la mer.

A Dielette au début des années 1930, dans la falaise, existait une mine sous-marine d’extraction de minerai. Et toutes les fins d’après-midi, Flora accompagne son mari jusqu’à la mer, non loin du wharf où accostent les cargos qui embarquent le minerai amené à place par un système de bennes va-et-vient accrochées à un filin d’acier.

Flora et Lucien sont jeunes, guère plus de vingt ans et leur vie est réglée sur le travail à la mine. Ils habitent non loin, à Flamanville, et c’est le même rituel tous les soirs. Lucien rentre dans la nuit et selon la fatigue il s’occupe de Flora puis il s’endort. Flora dans la journée a toujours quelque travail à effectuer tandis que Lucien se repose béatement.

Parfois elle se promène sur la falaise, longeant le précipice, regardant vers le bas, du côté de la mer. Quant à regarder vers l’horizon, elle peut toujours même si elle sait que l’avenir est bouché, qu’ils sont condamnés à végéter. Seulement sa vie si bien rangée bascule le jour où se promenant elle est face à un bouc hargneux qui s’est mis en tête de la précipiter en bas de la falaise.

Heureusement, un homme est là, un inconnu providentiel, qui lui sauve la vie. Constant est un quadragénaire qui roule sa bosse en travaillant de ci de là, donnant un coup de main, se faisant embaucher durant quelques jours, quelques semaines. Il est libre Constant, et tient à sa liberté.

Il était vraiment libre, sans autres liens et sans autres attaches que ce qui était devenu inconsciemment devenu la règle de sa vie.

Flora tombe immédiatement amoureuse de cet homme fort, protecteur, prévenant, expérimenté, mature, sans attaches. Et ce sentiment est réciproquement partagé. Il travaille à la mine et même s’il peut coucher à l’auberge, il a découvert au cours de ses pérégrinations dans la région, une chambre à ciel ouvert. Et il l’emmène dans ce petit nid d’amour caché dans un petit îlot qu’ils peuvent gagner à marée basse. Une aiguille rocheuse semblable à l’aiguille creuse chère à Maurice Leblanc.

 

Mais Constant est depuis quelque temps l’équipier de Lucien à la mine. Ils travaillent en couple, s’entendant parfaitement. Le contremaître, afin de pallier l’absence d’ouvriers, leur confie le transport à bord des bennes. Et à cause d’un incident technique, l’un va sauver la vie à l’autre. Ils ont lié une solide amitié ignorant que l’un couche avec la femme de l’autre. Jusqu’au moment où, en discutant, Lucien apprend son infortune, Constant étant tout autant stupéfait que son équipier du forfait dont il est à moitié responsable. Flora ne lui ayant jamais avoué qu’elle était mariée.

 

Si jamais vous vous rendez à Flamanville, non loin des Pieux dans la Manche, vous ne reconnaitrez pas cet endroit aujourd’hui défiguré par la centrale nucléaire qui est édifiée sur le site, sans parler du réacteur de l’EPR deuxième génération qui connait déboires sur déboires (et coute cher aux contribuables !).

Le petit port de Diélette existe toujours et depuis 1997 un nouveau port a été adjoint à l’ancien, la commune devenant Port-Diélette. Quant à la mine de fer, elle est fermée depuis 1962.

Si Paul Vialar évoque l’époque où l’extraction du minerai de fer était en pleine effervescence, il n’apporte guère de précisions sur le travail de ceux qui travaillaient vingt-quatre heures sur vingt-quatre. Toutefois il souligne la pénibilité de ce travail et décrit assez succinctement les galeries s'étendant sous la mer qui en rendait l'exploitation difficile du fait des infiltrations.

Il s’attache surtout à mettre en valeur les sentiments qui animent ses trois personnages principaux, et la fascination que Constant exerce sur Flora qui devient dépendante de cet homme mûr. Elle est mariée et découvre soudain un attrait auprès d’un homme différent de celui qu’elle connait, qu’elle côtoie quotidiennement. Il est d’ailleurs et tout autant Lucien que Flora, ils n’ont jamais vraiment vécu en dehors de leur lopin de terre.

Pourtant Constant, si lui aussi est subjugué par cette jeune femme qui s’immisce dans sa vie de façon brutale, n’est pas un voleur, un Don Juan, un bellâtre. Il l’aime et jamais il n’aurait pu imaginer qu’elle appartenait à un autre.

Une histoire d’amour qui ne peut se terminer que par une crise de jalousie compréhensible de la part de Lucien, alors que Constant ne pensait pas marcher sur les brisées d’un autre. La faute est à imputer à Flora qui se sent dominée par Constant, alors qu’il ne fait rien pour, et qui découvre dans ses bras la vie. Elle ne joue pas les coquettes, elle ne se sent pas coupable, elle découvre tout simplement une autre facette de la vie, de l’amour.

Une histoire simple, racontée simplement, mais qui se termine dans un drame. Un roman noir de terroir au temps où les autochtones ne connaissaient guère autre chose que leur canton, et végétaient dans un immobilisme qui ne favorisaient guère l’épanouissement.

 

Paul VIALAR : La maison sous la mer.

Ce roman a été adapté au cinéma par Henri Calef en 1946, sous le titre éponyme, et tourné principalement à Flamanville. Avec, dans les rôles principaux : Viviane Romance, Clément Duhour et Guy Decomble.

Paul VIALAR : La maison sous la mer. Editions J’ai Lu N°417. Parution le 1er trimestre 1973. 192 pages.

Première édition Denoël 1941.

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22 juin 2019 6 22 /06 /juin /2019 04:54

Cruciverbistes, vous êtes prévenus !

Léon GROC : La grille qui tue et autres romans.

Chargé de mission dans le Nord canadien par la société française de Géographie, Marc Morènes, Français d’à peine trente ans, docteur es-lettres à la Faculté de Paris, sort de cette sorte de léthargie provoquée par un somnifère. Il reprend péniblement ses esprits et se rend compte que son guide, un Indien d’Amérique du Nord, l’a laissé seul dans la neige, lui laissant uniquement son sac de couchage et les précieuses notes recueillies au cours de son périple.

La neige alentour ne lui offre aucun repère et il se fie à la position du soleil pour regagner un lieu civilisé d’où il pourra rejoindre Québec. Il se rend bientôt compte qu’il tourne en rond. Alors qu’il arrive près d’un bosquet qu’il a déjà côtoyé auparavant, il entend des détonations. Il se précipite et parvient à mettre en fuite une demi-douzaine d’Indiens qui agressent Pierre, un homme blanc. Une jeune fille gît dans la neige. Elle est juste évanouie et lorsqu’elle reprend ses esprits, Sabine explique à Marc ce qui vient d’arriver. Un guet-apens minutieusement préparé mais heureusement Marc est arrivé au bon moment.

Sabine lui propose de les accompagner chez ses parents adoptifs, l’oncle Alphonse et la tante Sophie, car elle est orpheline. Presque. Alors que sa mère s’est noyée, son père a échappé à un naufrage en regagnant la France, son pays d’origine, et depuis il vit à Paris. D’ailleurs Sabine doit aller le rejoindre. Seulement, et bizarrement, sur sa dernière lettre, une inscription au crayon lui enjoint de ne pas effectuer le voyage. Quant aux Indiens qui l’ont agressée, ils étaient dirigés par un Blanc, un ouvrier des Beaumont, oncle et tante de Sabine. Muni de son revolver, Marc ne rate pas sa cible et l’homme est abattu. Il s’agit de Nicolas, l’un des employés à la ferme des Beaumont.

Nicolas recevait depuis quelques temps des lettres, dont il a dû se débarrasser car elles ont disparu, mais dans ses affaires figure Arcana, une revue datant d’un mois proposant des énigmes et éditée en France.

Bientôt majeure, Sabine espère se rendre en France afin de connaître de visu ce père qu’elle n’a pas vu, sauf en photos, depuis l’âge de ses trois ans. Mais Marc doit partir et Sabine en est malheureuse. Seulement elle reçoit une lettre de son père l’invitant en France et il en profite pour lui annoncer qu’il s’est remarié avec une jeune femme prénommée Suzanne. Mais bizarrement, sur la dernière page de la missive, figure une phrase étrange griffonnée au crayon : Sabine, ma petite Sabine, ne viens pas ! Il n’en faut pas plus pour inciter justement Sabine à effectuer ce voyage.

Elle embarque donc à bord du Montcalm et fait la connaissance d’un homme qui l’entraîne vers la rambarde et tente de la faire passer par-dessus bord. Heureusement un passager lui sauve la vie. L’homme se noie et le sauveteur n’est autre que Marc. Le détective du bord, Achille Croissy, dont c’est la dernière traversée, fouille la cabine de l’individu en compagnie de Marc et à nouveau celui-ci découvre dans les affaires de l’agresseur un magazine intitulé Arcana. Le même numéro que celui que possédait Nicolas.

Les deux jeunes gens arrivent sans encombre à Cherbourg et prennent le train devant les mener à Paris. En cours de voyage, Marc descend à Lisieux pour affaires familiales, mais il promet de retrouver Sabine à Paris. Pauvre Sabine qui se fait agresser à nouveau et est sauvée par Croissy et Bouteloup, un inspecteur de police qui se trouve dans la rame. Celui-ci est un ancien collègue de Croissy lorsque le détective travaillait à la Sûreté parisienne. Mais l’agresseur, qui prétend se nommer Blaise, parvient à fausser compagnie aux deux hommes lors de l’arrêt.

En gare de Saint-Lazare, personne n’est là pour réceptionner Sabine. Le temps que Sabine fasse sa déposition au commissariat de la gare, madame Surgères arrive enfin. Suzanne, tel est le prénom de cette femme qui se montre sympathique, mais d’une sympathie de surface, décide alors d’emmener Sabine au bureau où travaille, même de nuit, son mari, dans l’import-export. Seulement lorsqu’elles arrivent, c’est pour découvrir Surgères dans un triste état. Il a été poignardé dans le dos. Et dans sa main il tient un papier que Sabine reconnait immédiatement. Arcana ! Au même moment Croissy arrive dans l’immeuble, s’étant donné pour mission de protéger Sabine. Hélas, malgré tout, Sabine est enlevée.

 

Un roman enlevé justement, qui accumule les péripéties en tout genre, et qui ne se cantonne pas dans un seul domaine.

Roman d’aventures au Canada, roman maritime, roman ferroviaire, traque des ravisseurs de Sabine, roman jeu avec ce fameux périodique Arcana, roman médical également car Surgères n’est pas mort mais son état nécessite une intervention chirurgicale risquée pouvant s’avérer mortelle, et roman d’amour aussi car Marc prévenu, va se joindre à Croissy et Bouteloup pour dénouer cette affaire qui les entraîne jusque près de Gif-sur-Yvette, dans ce qui était à l’époque la Seine-et-Oise, où l’aide d’un vieux musicien sera prépondérante.

Donc plus qu’un roman policier, La grille qui tue joue sur plusieurs tableaux et le lecteur n’a pas le temps de s’ennuyer dans cette histoire qui doit parfois au hasard et aux coïncidences, mais offre de nombreux rebondissements en tous genres. Et l’action prévaut au détriment de l’aspect psychologique des personnages, mais c’est bien ce qui lui donne sa force, son intérêt, sa puissance, le lecteur s’emparant de cette histoire qui offre un bon moment de détente.

 

Ce roman a paru sous le titre Arcana en 1934 dans la collection Loisirs Aventures N°2 aux Editions des Loisirs.

Il fait actuellement l’objet d’une réédition aux Editions Les Moutons électriques en compagnie de cinq autres romans : L'Autobus évanoui, Le Disparu de l'ascenseur, La Cabine tragique, La Maison des morts étranges, La Grille qui tue, Les Jumeaux du Quatorze juillet, sous le titre : Six mystères. Un ouvrage de 818 pages au prix de 49,00€.

Afin d’en savoir plus vous pouvez consulter leur site en cliquant sur le lien ci-dessous :

Léon GROC : La grille qui tue et autres romans.

Léon GROC : La grille qui tue et autres romans. Les Moutons électriques éditeur. 818 pages. 49,00€.

ISBN : 978-2-36183-596-5

Première édition : Collection Grandes aventures N°17. Editions Tallandier. Parution 1er trimestre 1951. 256 pages.

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9 juin 2019 7 09 /06 /juin /2019 04:38

Sans faire de taupinières...

Robert DARVEL : L'homme qui traversa la Terre. Roman d'amour et de vengeance.

Le zoo de Bréval, un zoo comme un autre puisqu'il possède comme pensionnaire un rhinocéros indien, est toutefois le théâtre de deux incidents, sans aucun rapport entre eux, c'est l'auteur qui nous l'affirme.

La santé de Dürer, le mammifère herbivore appartenant à la famille des Rhinocerotidae, ordre des Périssodactyles, inquiète la belle et jeune Emerance de Funcal, fille de monsieur Funcal, riche et redoutable homme d'affaires, et fiancée de Louis Zèdre-Rouge, un savant dont les neurones sont perpétuellement en ébullition et qui vient de mettre au point, ou presque, une invention qui devrait révolutionner le monde moderne.

Emerance s'inquiète donc de Dürer et elle demande à examiner l'animal dont la peau pèle. Elle entre dans la cage, veut flatter le rhinocéros, placide habituellement, mais qui n'apprécie pas le geste, peut-être trop appuyé et lourd sur le corps de l'unicornis, et elle se fait bousculer. Rien de grave. Mais cette main pesante et les frissons qui parcourent la belle Emerance sont probablement dus à un incident qui s'est produit la veille dans le laboratoire de Louis Zèdre-Rouge, en compagnie de Gilping, l'assistant du savant.

Remise de ses émotions, Emerance rentre chez son père, or, en cours de route, un étrange phénomène se produit. Elle marche sur le bitume mais ses pieds s'enfoncent comme s'il ne s'agissait que de vulgaire boue.

Elle a été exposée la veille, une maladresse de Gilping probablement, au rayon ZR, mais elle a confiance. Louis Zèdre-Rouge a sûrement, elle n'en doute point, mis au point le procédé inverse, le rayon RZ.

Seulement les conséquences sont plus graves qu'elle pouvait penser. Rentrée chez elle, elle est accueillie par son père en colère. Il vitupère contre Louis Zèdre-Rouge, passant sous silence que la faute n'en incombe point au savant mais à son assistant. Louis, prévenu, se rend chez de Funcal où il est reçu plus que fraîchement. Mais les deux amants peuvent se voir, dans la salle de bain, elle nue et lui habillé, et se réconfortent mutuellement.

Ils se rendent au laboratoire, ils c'est-à-dire Louis Zèdre-Rouge, Thomas Gilping et Emerance afin de procéder à de nouvelles expériences avec le rayon RZ qui doit, théoriquement contrebalancer les effets du rayon ZR. Les jours passent et Louis calcule toujours d'improbables spéculations afin de remédier au désagrément du funeste rayon. Funeste ? Et oui, Louis aperçoit Emerance s'enfoncer dans le sol bétonné, et bientôt il ne reste plus de la jeune fille qu'une vague trace bientôt effacée.

Louis Zèdre-Rouge est accusé d'avoir attenté à la vie d'Emerance et est emprisonné. Mais il se promet bien de sortir de geôle, car incarcéré pour un crime qu'il n'a pas commis, et spolié de ses inventions, il compte bien rendre la monnaie de leur pièce à ceux qui sont à l'origine du drame. Selon les journaux, à scandale ou non, il se serait pendu dans sa cellule.

Dix ans plus tard, en Islande, à Snæfellsjökull exactement, où cas l'envie vous prendrait d'aller visiter les lieux, des ouvriers-racleurs altérés, en langage courant des altéracs (comme Joseph ?), travaillent en sous-sol afin d'extraire un minerai fort convoité pour la réalisation de procédés modernes n'étant plus astreints à fonctionner à la vapeur et au gaz. Ils explorent la lithosphère pour le compte de Funcal, dont l'empire ne cesse de grandir. Un empire en pire.

 

Si ce roman est placé sous les augustes parrainages de Jules Verne et de Paul Féval, il ne faut pas non plus oublier ces étonnants précurseurs du roman de merveilleux scientifique, à la trame et aux intrigues débridées que furent Paul d'Ivoi, Arnould Galopin, Jean de la Hire, Ernest Pérochon ou encore Maurice Renard et quelques autres dont l'imagination débordante produisait des feuilletons extraordinaires qui offraient des heures de lecture rafraîchissantes aux grands comme aux petits.

Mais Robert Darvel, tout en possédant ce don de romancier-hypnotiseur (dont on ne peut lâcher les romans avant le mot fin), va plus loin dans l'extrapolation tout en employant les recettes des grands anciens, mais sans la lourdeur de la narration, parfois, ou le style ampoulé, voire amphigourique et emphatique qui étaient de mise.

Robert Darvel possède et exploite habilement une élégance d'écriture au service du roman populaire, faisant la nique aux détracteurs de la littérature dite de genre ou populaire, qui justement avancent effrontément, et sans avoir lu les ouvrages, que ceux-ci sont mal écrits, bourrés de fautes et donc sans intérêt. Les pauvres qui se contentent de romans de la Blanche aux nombreuses coquilles qu'ils placent devant leurs yeux d'intégristes de la littérature les prenant pour une nouvelle forme d'orthographe.

En vérité, je vous le dis, Robert Darvel mérite de figurer dans votre bibliothèque en compagnie des plus grands noms de la littérature de l'imaginaire.

Robert DARVEL : L'homme qui traversa la Terre. Roman d'amour et de vengeance. Collection Hélios. Parution le 6 juin 2019. 240 pages. 8,90€.

ISBN : 978-2-36183-563-7

Collection La Bibliothèque Voltaïque. Les Moutons électriques éditeurs. Parution 6 octobre 2016. 224 pages. 15,90€. Existe en version numérique : 5,99€.

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25 mai 2019 6 25 /05 /mai /2019 04:50

Faut pas mollir Maguy !

Paul FEVAL : Les Molly-Maguires.

Plus connu pour la série d’arrestations et les procès qui eurent lieu entre 1876 et 1878 en Pennsylvanie aux Etats-Unis à cause de leur mutinerie contre les propriétaires de mines qui refusaient le syndicalisme, les Molly-Maguires étaient des Irlandais regroupés dans une société secrète qui œuvra d’abord sur leur île en rébellion contre les Orangistes Britanniques. Les Catholiques contre les Protestants.

Au moment où débute cette histoire, au mois de novembre 1844, dans la région de Galway, nous faisons la connaissance de la famille du vieux Miles Mac-Diarmid. Attablé en train de souper, il est accompagné de ses huit fils dont l’âge s’échelonne d’une trentaine d’années à dix-huit ans, d’Ellen Mac-Diarmid, une parente âgée de vingt ans, d’un homme en haillons, invité à se restaurer, d’une gamine nommé Peggy. Seule manque à l’appel, Jessy, la jeune nièce de Miles Mac-Diarmid, qui est mariée depuis peu à Lord George Montrath. Mais le vieux Mac-Diarmid s’inquiète pour Jessy dont les nouvelles ne parviennent que rarement.

Néanmoins, il leur faut rendre hommage à Ellen, que Miles Mac-Diarmid considère comme sa noble cousine. Et il est qu’elle fait partie de la famille, descendante des Mac-Diarmid qui autrefois possédaient un château, aujourd’hui en ruines, dans la région. Et ce n’est pas pour rien qu’elle est surnommée l’Héritière. Le vieux Miles Mac-Diarmid vitupère contre les Mollies, une société secrète dont les membres brûlent et pillent. Morris, l’un des fils tente bien de justifier leurs actes, démentant les pillages, mais rien n’y fait. Miles Mac-Diarmid est un fidèle de Daniel O’Connell, un Irlandais qui refusait l’implantation des Orangistes sur son sol mais considéré depuis comme une sorte de traître par les rebelles.

Il est question aussi d’un major anglais qui serait dans la ferme de Luke Neale, un fermier considéré comme un usurier, un assassin et autres qualités incompatibles avec l’honneur des Irlandais. L’évocation de Percy Mortimer, le major anglais, trouble Ellen, et l’un des plus jeunes fils de Miles s’en rend compte. Elle l’aime, se dit-il.

Au moment de se quitter, l’homme en haillons qui se prénomme Pat prend à part chacun des fils, leur glissant un petit mot en sourdine. Et tous les fils Mac-Diarmid sortent, l’un après l’autre, et se retrouvent à la ferme de Luke Neale, étonnés de se retrouver ensemble et d’appartenir à cette confrérie des Molly-Maguirres, avec comme mot de reconnaissance les Payeurs de minuit.

Ils sont venus s’emparer de Percy Mortimer, qui est blessé, et de Kate Neale, la fille du fermier, mais un homme, un chef sans nul doute, habillé d’un carrick, sauve la vie de Mortimer, car entre eux il existe une dette de sang. L’un des frères Mac-Diarmid aime Kate Neale, ils sont même fiancés selon lui, et c’est assez pour que les autres frères laissent également la vie sauve à la jeune fille.

La ferme est incendiée et au milieu des débris est dressé un panneau sur lequel est inscrit : La quittance de minuit.

Fin du prologue intitulé Les Molly-Maguire.

Débute alors l’histoire de L’Héritière qui se déroule six mois plus tard, en juin 1845 toujours à Galway et ses environs.

Dans une auberge, deux femmes et deux hommes se tiennent assis sur un banc, et buvant un rafraîchissement. L’un des deux hommes est sous-contrôleur à la police métropolitaine de Londres, et l’autre un pauvre hère qu’il soudoie afin que celui-ci effectue un faux-témoignage.

En effet, Miles Mac-Diarmid, le vieux Mac-Diarmid, est emprisonné suite à l’incendie de la ferme de Luke Neale. Les preuves manquent, et il serait bon que ses enfants affirment devant la justice que le vieux Miles était présent lors de cet incendie. Comme l’homme est pauvre et ne peut nourrir ses rejetons, la solution est toute trouvée.

Mais dans Galway, la tension est étouffante, tout comme la chaleur. Les Orangistes et les Irlandais ne manquent pas de s’invectiver, voire de se porter des gnons. Les soldats tentent de maintenir l’ordre sous le commandement du major Percy Mortimer. Mais celui-ci est un homme probe, sachant faire la part des choses, il est honnête et n’accepte aucun débordement de la part de ceux qui sont sous ses ordres. On serait tenté d’écrire qu’il ménage la chèvre et le chou. Pourtant il est la cible des Irlandais qui désirent sa mort et le lui font savoir en lui envoyant des messages sur lesquels est dessiné un cercueil.

Dans cette ambiance délétère et belliqueuse, se trament des histoires d’amour entre Anglais et Irlandaise ou inversement, de trahisons liées non pas à une approche politique mais à cause du paupérisme vécu par certains, des affrontements divers dans lesquels des enfants jouent un rôle non négligeable.

Paul Féval ne cache pas professer une attirance pour les idées du peuple Irlandais, l’envie de se débarrasser d’un envahisseur qui impose ses lois et sa religion, alors que dans certains de ses romans il met en avant une certaine supériorité des fils d’Albion. D’ailleurs bon nombre de ses romans ont en commun de mettre en scène des Britanniques, comme dans Jean Diable, La Ville-vampire, Les mystères de Londres et autres.

 

Le titre exact de ce roman qui comporte deux parties, L’Héritière et La galerie du géant, est La Quittance de minuit. Mais les éditions de l’Aube ne rééditent que le prologue, qui donne son titre à l’ouvrage, et la première partie dite l’Héritière. Ce qui peut induire en erreur les lecteurs, qui de ce fait n’ont en main qu’un roman tronqué de sa seconde partie, et les laisser sur leur faim.

Les heureux possesseurs d’une liseuse, peuvent télécharger gratuitement et en toute légalité l’intégralité de roman, La quittance de minuit, en se rendant sur le lien ci-dessous :

Paul FEVAL : Les Molly-Maguires. Collection L’Aube poche. Editions de l’Aube. Parution le 20 octobre 2016. 272 pages. 10,80€.

ISBN : 978-2815920131

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12 mai 2019 7 12 /05 /mai /2019 04:33

Horace, oh désespoir…

Alexandre DUMAS : Pauline.

Lorsqu’Alexandre Dumas entremêlait roman gothique (architecture anachronique, n’est-ce pas ?) appelé originellement roman noir, et littérature romantique.

En cette fin d’année 1834, l’entrée d’Alfred de Nerval dans la salle d’armes de Grisier, renvoie l’auteur quelques temps en arrière.

Il se souvient avoir aperçu lors d’un voyage en Suisse puis en Italie son ami en compagnie d’une femme pâlotte, d’aspect maladif, un épisode qu’il avait oublié. Il connaissait vaguement cette jeune femme prénommée Pauline. Alfred de Nerval revient s’entraîner et remontant sa manche, le narrateur et Grisier peuvent discerner la cicatrice d’une blessure provoquée par une balle.

Tous deux sont avides de savoir comment Alfred de Nerval fut blessé et celui-ci promet de narrer le soir même l’incident au cours d’un repas. C’est cette relation que Dumas nous propose, car plus rien ne s’oppose à la publication de cette histoire.

Alfred de Nerval prend donc la succession de Dumas pour raconter dans quelle condition il a fait la connaissance de Pauline de Meulien et pourquoi le romancier les a aperçus aux cours de ses voyages en Suisse et en Italie.

Alors qu’il étudie la peinture, Alfred de Nerval et sa sœur héritent une forte somme d’un oncle défunt. Aussi il décide de voyager et part au Havre pour se rendre en Angleterre. Apprenant que deux camarades d’atelier sont en villégiature dans un petit village qui se nomme Trouville (cela a bien changé depuis), il décide de leur rendre une petite visite. Et comme il n’est pas pressé, il loue un bateau afin de peindre la côte. Mais il n’avait pas prévu un fort coup de vent doublé d’une pluie violente qui l’entraînent du côté de Dives.

Il aborde sur le rivage et apercevant au loin un parc et une bâtisse, il s’y rend, alors que la nuit est tombée, afin de se mettre à l’abri. Il s’engage dans le parc puis s’introduit dans une chapelle en ruine et se réfugie dans le cloître. Il est réveillé par un bruit puis il remarque un homme qui débouche d’un escalier souterrain et enfoui une clé sous une dalle.

Peu après, il est recueilli par des pêcheurs qui acceptent de le reconduire à Trouville. Il apprend que les ruines sont celles de l’abbaye de Grand-Pré, attenantes au parc du château de Burcy, la demeure d’Horace de Beuzeval. Horace, le mari de Pauline de Meulien ! Son esprit ne fait qu’un tour, car il est toujours amoureux de la jeune femme n’ayant toutefois pas osé déclarer sa flamme.

Selon les marins, l’épouse serait décédée depuis peu et va bientôt être inhumée. Or il se rend compte que le cadavre de la morte cachée sous un suaire n’est pas celui de Pauline.

Il décide alors de revenir aux ruines et découvre sous la dalle une clé qui lui permet d’ouvrir quelques portes et comme il s’était muni de pinces, de fracturer le cadenas d’une geôle. Or dans cette prison souterraine est retenue depuis quelques jours et contre son gré Pauline. A bout, n’espérant plus aucun secours, elle vient de boire un verre d’eau déposé par Horace, son mari prévenant, et qui contient du poison. Des traces de poudre tapissent encore le fond du gobelet. Alfred de Nerval aide la jeune femme à s’échapper.

Il la prend sous son aile tutélaire et débute alors le récit de Pauline, dévoilant comment et pourquoi elle est enfermée par son mari Horace de Beuzeval.

Mais dans la région, des vols sont commis par une bande qui écume la région. Des vols accompagnés de meurtres parfois.

 

Construit un peu comme un roman gigogne, Pauline, relève du romantisme et diffère profondément de sa production actuelle car Dumas est surtout auteur de pièces de théâtre à succès (ou non). Pauline est donc son premier roman, publié directement en volume et ne comporte que peu de dialogues, ce qui le change de sa production habituelle, surtout théâtrale.

Mais à la lecture de cet ouvrage, on se rend compte que le début de ce roman est la reprise des chapitres des Impressions de voyages, paru en 1833 et qu’il est le creuset de romans ultérieurs, dont Le comte de Monte-Cristo et Salvator. Il utilise des thèmes récurrents comme les duels qui font florès dans bon nombre de ses romans d’inspiration historique, dont notamment Les Trois mousquetaires.

Souvent Dumas revisite sa production antérieure et dans certaines de ses nouvelles, comme Marie et Le Cocher de cabriolet, on retrouve la figure de jeune fille séduite et abandonnée. Mais dans Pauline, il place résolument son intrigue dans son époque contemporaine alors que la plupart de ses récits empruntent à l’Histoire. C’est la période riche du romantisme littéraire, et Dumas ne pouvait pas ne pas y sacrifier. Mais ce roman emprunte également au roman noir, qui par la suite est devenu roman gothique, dans la lignée d’Ann Radcliffe et d’Horace Walpole (Horace, comme l’un des personnages principaux de Pauline !).

Et Alexandre Dumas aime se mettre en scène dans ce genre de romans, accréditant ainsi une véracité du récit, et on ne peut s’étonner que le personnage principal se nomme Alfred de Nerval. Un hommage non déguisé à son ami Gérard de Nerval, et le côté artistique est présent puisqu’Alfred de Nerval est peintre.

Ce ne sera pas la seule fois où l’on retrouvera les deux hommes, Dumas et de Nerval puisque dans Contes dits deux fois, Dumas se met en scène et retrouve de Nerval dans le rôle de conteur.

 

Alexandre DUMAS : Pauline. Edition présentée, établie et annotée par Anne-Marie Callet-Bianco. Collection Folio Classique N°3689. Editions Gallimard. Parution le 22 mai 2002. 256 pages. 4,30€. Version numérique 3,99€.

ISBN : 9782070412303

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