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9 avril 2020 4 09 /04 /avril /2020 04:14

Un romancier qui pétille ?

Maurice CHAMPAGNE : Le refuge mystérieux.

Dans la nuit du 17 au 18 juin 1929, La France, un paquebot parti trois jours auparavant du Havre, qui vogue par mer d’huile, se dirige vers New-York.

Le 18, dans la matinée, un garçon chargé du service alerte le commandant de bord. L’un des passagers, l’ingénieur Gérard Aubierne, a disparu. Il a été vu pour la dernière fois vers 22 heures, et dans sa cabine, son lit n’est pas défait. Les recherches entreprises immédiatement restent vaines. Et il est, selon les autres passagers, impossible de songer à un acte suicidaire. Un autre passager manque lui aussi à l’appel, le docteur Soudraka, un Hindou de Calcutta. Deux disparitions simultanées incompréhensibles.

La relation de cet événement est relatée par Gérard Aubierne lui-même.

Débute alors la narration de cette mystérieuse aventure par le héros lui-même.

Désemparé par un chagrin d’amour, Gérard Aubierne, alors qu’il rentre un soir chez lui, est abordé par un Hindou qui prétend se nommer Soudraka. Et dans le discours qu’il lui tient, Aubierne retient cette phrase : Il vous importe peu de vous tuer à telle heure plutôt qu’à telle autre.

Puis l’homme l’emmène chez lui et la conversation qui s’ensuit est assez édifiante. Soudraka connait un certain nombre de choses sur l’ingénieur, dont sa peine de cœur. Et c’est ainsi que quelques jours plus tard, Aubierne, entraîné par Soudraka, quitte le paquebot à bord duquel ils voyagent, accrochés l’un à l’autre par un filin. Ils plongent dans l’océan et sont récupérés par un hydravion. Aubierne est invité à boire une boisson relaxante, et lorsqu’il se réveille, il se trouve dans un appartement luxueux. Des toiles de maîtres sont accrochées et un portrait, celui de sa bienaimée qui l’a quitté, est déposé sur un meuble.

Bientôt il fait la connaissance dans la salle à manger des autres résidents, sept étrangers de nationalités différentes. Deux Russes, dont une jeune femme, un Argentin, un Américain, un Hollandais, un Japonais et un Espagnol. Tous ces personnages se côtoient sans véritablement entretenir de relations amicales. Il règne même une certaine froideur. Un serviteur Hindou pique une fiche sur un panneau. Un nom et une date sont inscrits sur cette fiche. Le Japonais laisse tomber ces quelques mots : Mort cette nuit.

Aubierne découvre qu’il voyage à bord d’une île flottante, ne comportant ni faune ni flore. L’île des Désespérés. Une plaque métallique comme celle du pont d’un porte-avion, et posé dessus un hangar contenant l’hydravion. Tout autour de cette île, la mer, l’océan Pacifique, immense vivier à requins. Soudraka lui apprend que cette île se déplace à l’aide d’un moteur à radium, une invention de l’un des ses frères. Et l’un des Russes les quitte, appelé à subir une expérience.

Des liens se tissent, qui ne sont pas encore d’amitié, entre Aubière et le Japonais, ou avec Nadia, la frêle jeune femme russe. Mais Aubierne est impressionné, lorsque déjeunant en compagnie du Japonais et de Soudraka, un panneau glisse dévoilant un immense aquarium. Un aquarium qui entoure l’île plongée dans les profondeurs sous-marines. La salle est plongée dans le noir, et le confinement ne semble pas encourager les relations entre certains des convives. Un cri, Nadia dressée avec à la main un couteau à dessert, et à quelques pas l’Argentin un filet de sang sur la joue.

 

Ce roman n’est pas sans rappeler deux ouvrages de Jules Vernes, 20 000 lieux sous les mers et L’île à hélice, mais traité différemment, comportant une intrigue qui n’a rien à voir avec ces deux ouvrages. Juste une analogie avec le décor et cet engin qui ressemble à un immense sous-marin. Et le confinement forcé de quelques personnages. Mais le contexte est différent, et la pagination ne permet pas un développement à la façon de Jules Verne.

Aussi, les motifs qui animent le docteur Soudraka et ses frères est-il passé sous silence. L’on sait juste qu’ils s’adonnent à des recherches scientifiques médicales, et qu’ils pratiqueraient à des vivisections, selon l’un des confinés.

Mais ce qui importe, ce sont les relations qui s’établissent entre ces candidats potentiels à la mort, ayant eu à subir des épisodes douloureux, affectifs ou financiers, précédemment. Chacun réagit selon sa sensibilité, ou son manque de sensibilité, son courage devant l’adversité et le fait accompli.

Et la jalousie guide certains des personnages, alors qu’entre Nadia et Aubierne le narrateur s’ébauche une histoire d’amour. L’épilogue est un peu tiré par les cheveux mais les actions qui amènent à ce dénouement sont dignes de scènes cinématographiques.

Un bon moment de détente dans ces temps qui conduisent à la morosité.

Maurice CHAMPAGNE : Le refuge mystérieux. Collection Livre d’aventures. N.S. N°35. Editions Tallandier. Parution 1938. 64 pages.

Première édition Collection Voyages lointains et Aventures étranges. N° 25. Parution 1928.

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8 avril 2020 3 08 /04 /avril /2020 04:53

Les morts revivent… Mais les vivants en meurent

Patrick SVENN : Le fantôme aveugle.

Réfugiée (confinée ?) en Dordogne à cause de la guerre, Sabine de Brignac n’a pas reçu de nouvelles de son mari Jean, resté à Paris, depuis sept mois.

Alors en ce mois d’octobre 1944, elle décide rentrer chez elle à Passy en compagnie de son amie Geneviève. Arrivée devant l’immeuble, un héritage familial de Jean, dont ils jouissent du rez-de-chaussée et du premier étage, un escalier intérieur leur permettant de passer d’un étage à l’autre, Sabine s’enquiert de Jean auprès d’Annonciade, la concierge qui leur sert également de servante.

D’après Annonciade, elle n’aurait pas vu Jean depuis le 21 mars au soir. Elle était dans sa loge de concierge quand un homme est entré dans l’appartement. Elle a entendu du bruit, des cris, et surtout ces mots qui la révulsèrent : Non pas les yeux, pas les yeux !

Paris était sous la domination allemande et elle n’avait pas osé appeler la police. Sabine s’enquiert auprès de Martin Coutureau, un ami commun à elle et à Jean, afin de savoir s’il peut apporter des précisions. Martin, qui fut amoureux de Sabine, laquelle lui avait préféré Jean, affirme avoir accompagné Jean à la gare le 22 mars.

Et le soir, la nuit, elle ressent comme une présence. Des déplacements furtifs qui se produisent dans sa chambre, près d’elle. La lumière s’éteint sans qu’elle ait actionné l’interrupteur, comme s’il y avait des délestages, et surtout elle retrouve sur un guéridon un camée qui était enfermé dans une boîte à bijoux. Elle a beau le replacer dans sa cache, le lendemain matin, il est à nouveau sorti de son coffret. Un camée bague que lui avait offert Jean quelques années auparavant avant la guerre.

Elle établit la liste de tous ceux qu’ils fréquentaient avant qu’elle se réfugie en Dordogne. Après avoir éliminé les membres de la famille, ne restent que trois noms. Trois hommes avec lesquels Jean avait de nombreux contacts mais qui ne se connaissent par forcément. Parmi eux un trafiquant au marché noir. Tous sont dissemblables physiquement et moralement. Et avec Geneviève, elle organise un repas préparé par Annonciade, afin de les réunir. Seul Martin se récuse, arguant son emploi à la Préfecture qui lui prend beaucoup de temps.

Mais cette réunion ne donne rien. Et dans le jardin particulier, elle découvre un endroit caché où fleurissent encore quelques géraniums. Annonciade avoue que sous terre gît le cadavre de Jean.

 

Un roman de pure angoisse, étouffant, à la limite du fantastique, ancré résolument quelques semaines après la période de la Libération de Paris. Les restrictions sont imposées, malgré tout Sabine et Geneviève, qui ne sont pas démunies d’argent, parviennent à organiser des repas. Et l’un des camarades de Jean se charge de leur fournir le cas échéant les vivres nécessaires. Le rôle de Jean n’est pas très bien défini mais il aurait œuvré dans la Résistance, et il n’est pas exclu que la Gestapo se serait amené un soir pour l’arrêter.

Seulement, ce ne peut qu’être un soupçon éphémère, les Nazis ne prenant guère de gants pour s’emparer de ceux qui côtoyaient de près ou de loin les Résistants, et ce n’était pas dans leur habitude de torturer sur place.

Alors les soupçons se portent sur une vengeance. Mais à l’encontre de qui, et pourquoi ?

Le lecteur se doute de l’identité du suspect, voire du coupable, mais ce n’est pas tant ce qui importe. C’est cette atmosphère d’angoisse étouffante, prégnante, ces déplacements d’objets, ces sensations de frôler une personne invisible, comme un fantôme, qui imprègnent de façon insidieuse le récit.

La tension grimpe au fur et à mesure que les jours, et les pages, passent, et le dénouement est à la hauteur du récit.

Patrick Svenn, auteur de trois romans dans cette collection naissante, est considéré par certains comme un pseudonyme de Frédéric Dard. Je n’ai pas retrouvé la patte de celui qui signait en même temps sous l’alias de San-Antonio. Par deux fois, la Savoie est évoquée, mais cela ne suffit pas à faire endosser à Frédéric Dard la paternité de ce roman.

Patrick SVENN : Le fantôme aveugle. Collection Angoisse N°8. Editions Fleuve Noir. Parution 2e trimestre 1955. 224 pages.

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1 avril 2020 3 01 /04 /avril /2020 04:43

Faciles à sculpter ?

Maurice PERISSET : Les statues d’algues.

En vacances dans la résidence familiale sur les hauteurs de Saint-Tropez, Cédric passe son temps dans sa piscine. C’est un solitaire, contrairement à Stéphane et Béatrice, son frère et sa sœur légèrement plus âgés qui ne pensent qu’à s’amuser et sortir dans les cafés ou en boîtes. Ils sont seuls, leurs parents passant un séjour aux Seychelles.

En admirant, sur le port de Saint-Tropez, les œuvres abstraites d’un peintre local, Cédric fait la connaissance de Sophie, une adolescente de son âge, seize ans. Pour une fois, il surmonte sa timidité, et lui propose de jouer au tennis et lui inscrit sur un bout de papier son numéro de téléphone.

En remontant jusqu’à la villa parentale, cachée dans la végétation et entourée de hauts murs, il croise la route de trois adolescents étrangers à la région. Ils sont à la recherche de Pablo, un copain, et d’un mauvais coup à effectuer.

Paulo et Jacky se sont enfuis d’un Centre de placement, un centre dit de rééducation géré par la DDASS, étant orphelins ou considérés comme tels. Grâce leur amie Clara ils sont descendus dans le sud, à quelques quatre ou cinq cents kilomètres de leur lieu de détention. Ils abordent Cédric, lui demandant un renseignement et éventuellement un peu d’argent.

Deux amis de Stéphane et Béatrice viennent passer quelques jours mais eux aussi ne pensent qu’à aller s’amuser. Ce qui fait que Cédric reste la plupart du temps seul, pensant à Sophie.

Un étrange phénomène se produit. Un nuage noir stagne au dessus de la propriété, et l’eau de la piscine est gelée. Une étrange couche grise flotte au dessus et bientôt se transforme en algues vertes.

C’est le début d’une journée et d’une nuit de cauchemar pour Cédric et les trois adolescents qu’il a croisé dans le chemin des Amoureux et du fameux Pablo. Une nuit d’horreur qui ne semble affecter que la propriété car aux environs le ciel est bleu, bien dégagé. La campagne est comme à son habitude, calme.

 

Délaissant le roman policier pour adultes, Maurice Périsset nous propose une aimable fable pour adolescents, jouant sur le fantastique, la terreur, le suspense. Tout y est bien amené, la tension montant progressivement, seulement l’épilogue déçoit un peu.

En effet, mais même dans un roman fantastique, certains phénomènes possèdent une explication tandis que dans cette intrigue, rien. D’où viennent ces algues vertes qui prolifèrent à une vitesse incroyable ? Quant à la conclusion, elle est assenée comme si Maurice Périsset ayant épuisé son sujet, ne savait plus comment clore son histoire. Ce n’est pas trop grave, le lecteur âgé que je suis demandant peut-être plus de précisions que les adolescents qui se plongent dans cette intrigue étonnante. Et peut-être s’est-il laissé emporté par son imagination n’ayant pas réfléchi comment terminer l’histoire.

Maurice PERISSET : Les statues d’algues. Couverture Philippe Munch. Illustrations intérieures Jean-Louis Henriot.

Collection Zanzibar N°116. Editions Milan. Parution mai 1993. 192 pages.

ISBN : 9782867269103

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30 mars 2020 1 30 /03 /mars /2020 04:18

Dans les brumes écossaises

Kurt STEINER : De flamme et d’ombre.

Alors qu’il devait se rendre chez son oncle à Galashiels, le docteur Walter McCairn fait étape à Edimbourg. Dans une rue, un photographe le prend en cliché et lui remet un ticket pour récupérer deux ou trois jours plus tard la photographie. A peine trois pas de franchis, le docteur se retourne mais le photographe s’est comme volatilisé. Sur le bout de papier figure un numéro pour le moins extravagant. Un H suivi de sept zéros et une adresse.

Il rentre chez lui dans son petit village de Freenoch, sous la pluie automnale. Dora, sa servante, est affolée. Il est attendu impatiemment chez une parturiente mais son intervention dégénère. Il prescrit un médicament mais bizarrement ce qu’il inscrit sur l’ordonnance ne correspond pas à ce qu’il pensait. Un autre incident de ce genre se renouvelle, toujours préjudiciable au patient qui décède.

Rentrant chez lui, il est abordé par une jeune femme qui se prétend sa voisine. Pourtant il est sûr de ne l’avoir jamais rencontrée, côtoyée, vue. Quant à son voisin habituel, atteint de toux chronique et qui vit à l’étage au dessus du sien, il n’est plus là. Autant d’anomalies qui parsèment ses journées.

Des incidents qui se transforment en accidents, tragiques. Car il s’éprend de cette jeune femme (non, ça ce n’est pas tragique !) mais cette relation tourne mal. Et il aperçoit le père de celle-ci se suicider dans les marais.

Et il se rend compte que la date du jour n’est pas celle qu’il croyait mais qu’il vit dans un monde situé deux semaines auparavant, à peu près le jour où il s’est fait photographié dans une rue d’Edimbourg.

 

Kurt Steiner, dont c’est le quatrième roman publié dans la collection Angoisse, joue avec les nerfs de son héros, et donc de ses lecteurs, l’ensevelissant sous une chape de terreur.

Insidieusement l’effroi est distillé pour prendre une ampleur qui enveloppe le docteur dans une gangue délétère, dont il ne peut se défaire. Comme s’il était confiné dans une toile d’araignée qui l’enserrerait de plus en plus. Le fantastique à l’état pur, sans êtres monstrueux ou personnages légendaires interférant dans cette intrigue, mais cette sensation de vivre dans un état second et un monde parallèle.

Pourtant le rationalisme est présent car ce pauvre docteur Walter McCairn va bientôt se trouver confronté à ses erreurs de prescriptions médicales et la police s’en mêle.

Sans vouloir le dévaloriser, ce roman se place dans l’honnête production de Kurt Steiner, ce qui n’est pas péjoratif, mais la fatalité du retour à des événements précédents relève du domaine du fantastique classique. Comme une histoire qui se reflèterait dans un miroir mais avec un décalage temporel.

 

Réédition : Collection Super-luxe N°7. Editions Fleuve Noir N°7. Parution 1er trimestre 1975. 224 pages.

Réédition : Collection Super-luxe N°7. Editions Fleuve Noir N°7. Parution 1er trimestre 1975. 224 pages.

Bibliothèque du Fantastique sous le nom d’auteur d’André Ruellan. Editions Fleuve Noir. Parution février 1999. 672 pages.

Bibliothèque du Fantastique sous le nom d’auteur d’André Ruellan. Editions Fleuve Noir. Parution février 1999. 672 pages.

Kurt STEINER : De flamme et d’ombre. Collection Angoisse N°23. Editions Fleuve Noir. Parution 3e trimestre 1956. 224 pages.

Réédition : Collection Super-luxe N°7. Editions Fleuve Noir N°7. Parution 1er trimestre 1975. 224 pages.

Bibliothèque du Fantastique sous le nom d’auteur d’André Ruellan. Editions Fleuve Noir. Parution février 1999. 672 pages.

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24 mars 2020 2 24 /03 /mars /2020 05:11

…C'était sa dernièr' séance
Et le rideau sur l'écran est tombé…

Georges-Jean ARNAUD : Virus.

La séance de cinéma terminée dans le petit café de Feuilla, Bernard Maury range son matériel et s’apprête à rentrer à Rivesaltes où il est propriétaire d’un cinéma, le Rialto.

Sa petite chienne Pipette qui le suit partout n’a pas l’air en forme, et lui boit plus que d’habitude. De l’eau ou une bière car il a de la route à parcourir, vingt-cinq kilomètres environ, sur une petite route de montagne dont une partie en corniche, d’un côté le flanc de la montagne, de l’autre un ravin. Un seul véhicule peut circuler, toutefois un emplacement pour se garer est prévu.

Il se retrouve nez à nez avec son employé, Aguil, lui aussi projectionniste et était dans un village, qui lui propose de l’éclairer à l’aide d’une torche par l’arrière de son véhicule. Maury entame la descente à reculons mais bientôt dans un virage, Aguil, dont l’action était préméditée, se déplace légèrement sur la gauche, induisant dans l’erreur Maury. C’est la chute fatale. Aguil descend afin de se rendre compte. Maury est bien mort, mais la petite chienne Pipette a disparu. Il met le feu au véhicule puis rejoint Rivesaltes, la conscience tranquille, presque.

Car les gendarmes, en la personne de l’adjudant Millet est déjà là, prévenus par des voisins qui ont aperçu le début d’incendie. Aguil prétexte une panne pour justifier son retard.

Mais pour François Maury, le frère de Bernard, l’accident a été provoqué. Les mêmes conclusions que l’adjudant. Juste des suspicions, pas de preuves pour étayer leurs soupçons.

François, étudiant en médecine, était chez son frère, et sa belle-sœur Michèle, pour passer ses vacances. En réfléchissant, il constate quelques anomalies dans le récit d’Aguil, d’autant que celui-ci est proche de Michèle. Trop proche. Et une pointe de jalousie s’enfonce dans le cœur de François qui en compagnie de l’adjudant Millet va enquêter. Sa conviction est forgée. Aguil est coupable et Michèle peut-être sa complice. Mais il lui faut retrouver Pipette afin d’étayer certaines de ses conjectures. Et le comportement d’Aguil, maladif peut-être du paludisme, lui offre de nombreuses questions à creuser.

 

Georges-Jean Arnaud avec ce roman entamait sa fructueuse collaboration dans la collection Spécial-Police du Fleuve Noir, son deuxième roman dans cette maison d’éditions après L’enfer des humiliés dans la collection Grands romans.

Déjà il fait montre d’une grande maîtrise dans la construction de ses intrigues, mais il faut avouer que depuis une décennie il avait fourni de très nombreux romans policier, d’espionnage ou de charme, pour l’Arabesque ou Ferenczi.

Il trouve son style, unique, mettant en scène peu de personnages et s’attachant surtout à la psychologie des différents protagonistes, sans pour autant négliger l’intrigue. Si un gendarme évolue dans cette histoire (deux ou trois car en de certaines occasions l’adjudant Millet met à contribution ses hommes), on ne peut pas parler d’enquête policière à proprement parler. C’est François qui se tape pratiquement tout le boulot, se déplaçant, et surtout tentant d’asticoter Aguil et Michèle par ses propos soupçonneux, afin de les amener à se dévoiler.

Le titre de Virus, adapté pour l’intrigue, est toutefois trop révélateur, et enlève au lecteur le charme de la déduction et de la découverte.

 

Georges-Jean ARNAUD : Virus. Collection Spécial Police N°226. Editions Fleuve Noir. Parution 2e trimestre 1960. 224 pages.

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19 mars 2020 4 19 /03 /mars /2020 04:53

Un épigone d’Arsène Lupin !

Yves VARENDE : Toujours plus fort. Lord Lister N°2.

Au début du vingtième siècle, les petits fascicules allemands ou néerlandais avec personnages récurrents proliféraient, et Harry Dickson est le plus connu de ces héros imaginés par d’obscurs écrivaillons.

Jean Ray s’est emparé de la série des Harry Dickson, adaptant et réécrivant les aventures du célèbre Sherlock Holmes américain, puis en imaginant et rédigeant de nouvelles péripéties. Mais bien d’autres héros eurent les faveurs du public et parmi eux Lord Lister, dit Sinclair le mystérieux inconnu, ainsi que Buffalo Bill, Nick Carter…

Trente fascicules ont été publiés en France dans un savant désordre entre 1909 et 1911, tandis qu’en Belgique ce furent quatre-vingt dix numéros qui virent le jour entre 1925 et 1932. Et Allemagne la série débuta à partir de la mi-novembre 1908. Ces renseignements, je les ai puisés dans ce volume des aventures de Lord Lister grâce à l’érudition d’Yves Varende qui lui-même a réécrit, adapté, nettoyé, restauré, dépoussiéré quelques-uns de ces fascicules qui ont gardé leur fraîcheur et leur naïveté parfois. Les principaux auteurs de ces fascicules se nommaient Kurt Matull et Théo von Blankensee mais bien d’autres polygraphes apportèrent leurs pierres, parfois un peu lourdes à digérer, dans cet édifice.

Dans sa préface, Yves Varende, pseudonyme de Thierry Martens qui fut aussi un auteur de bandes dessinées belges et rédacteur du journal Spirou de 1969 à 1978, nous décrit cette période prolifique, avec tous les nombreux personnages qui furent des héros immortels et qui est une marque de fabrique germanique, puisque de nos jours les fascicules consacrés à Perry Rhodan notamment connaissent toujours un succès de librairie tandis qu’en France ce genre de publications n’existe plus depuis des décennies et la fin des éditions Ferenczi.

Ainsi dans cette préface, écrite entre janvier et octobre 1995, peut-on lire quelques réflexions intéressantes qui de nos jours prennent encore plus d’ampleur, de pertinence et de justesse.

Quelques romanciers populaires ont parfois l’honneur d’une consécration dans la collection Bouquins de Robert Laffont, mais il reste beaucoup à faire et les « directeurs littéraires » sont souvent d’une inculture notoire pour tout ce qui ne leur a pas été enseigné par Lagarde et Michard. Ces intellectuels ne lisent que ce qui est à la mode et se gardent bien de défricher les sentiers rendus à la végétation. Inutile de demander à ces pantouflards qu’ils découvrent les ruines sublimes perdues dans la jungle !

 

Autre réflexion non dénuée de bon sens adressée cette fois aux auteurs.

On ne compose malheureusement plus beaucoup de tels univers populaires de nos jours. S’il y a désaffection pour la lecture, c’est peut-être parce que trop d’auteurs oublient que le but essentiel d’un écrivain doit être d’offrir une agréable détente à ses amis lecteurs, même s’il aborde parfois des sujets plus difficiles ou ouvrant des controverses.

Le rêve des dirigeants de nos sociétés est d’offrir de la détente insipide et sans saveur pour que le cirque politique devienne le dernier spectacle à la mode. Ils interdiraient volontiers de réfléchir hors des sentiers battus et craignent ce qui n’est pas « politiquement correct ».

Lorsque l’on veut filtrer l’information, diriger la pensée, limiter l’expression et imposer des œillères au peuple, la démocratie ne se distingue plus beaucoup des dictatures qu’elle prétend combattre. L’homme n’est plus considéré que comme un contribuable fiché et numéroté, destiné à assister, impuissant, au festival des canailleries des partis et des puissants qui se partagent le pouvoir.

 

Après cette longue présentation fort instructive, et pertinente, suivent quatorze nouvelles ayant pour protagoniste principal Lord Lister, nouvelles précédées d’une présentation de l’auteur, ainsi qu’un court texte qui avait servi de remplissage pour Les esprits de Bertha Dunkel mais qui peut se lire indépendamment du texte originel.

 

Je reviendrai plus longuement sur chacune de ces nouvelles, si j’en ai le temps (voire le courage), mais juste un petit mot pour vous mettre en appétit sur La ville de la nuit éternelle.

L’action se déroule à San Francisco où se rendent Lord Lister et son inséparable jeune ami et adjoint Charley Brand. Lister veut se procurer un produit spécial auprès de l’un des Chinois de la ville et tous deux se trouvent entraînés dans une sombre histoire d’enlèvements de jeunes filles. Et le lecteur captivé les suit dans leurs déambulations souterraines, le sous-sol de San Francisco et plus particulièrement le quartier chinois, le Chinatown californien, étant aménagé en véritable labyrinthe creusé par les habitants eux-mêmes sous la férule d’un mystérieux chef de bande d’une triade.

Cette périlleuse mission est le reflet d’une psychose de l’époque, le péril jaune souvent traité par de nombreux romanciers populaires dont le principal représentant est sans conteste Sax Rhomer et son personnage de Fu-Manche, initié par le Capitaine Danrit dans L’invasion jaune. Et cette ville souterraine inspira à Henri Vernes une aventure de Bob Morane, La cité de l’Ombre jaune en 1965.

 

 

Sommaire :

Préface.

La ville de la nuit éternelle

Baxter en vacances

Une périlleuse mission de confiance

L'affaire de la canonnière

Le trésor de guerre du Roghi

Une campagne électorale

Le secret du coffre-fort

Le trésor sacré de çiva

Le vase de Chine

Une mirifique agence de voyage

Un vol au musée

La torpille aérienne

Le saint en argent

Les esprits de Bertha Dunkel

Marholm, détective

Bibliographies : Lord Lister en langue française et Lord Lister en langue allemande.

Table des matières.

 

A noter également en hors texte la reproduction en couleurs des couvertures des quatorze premières nouvelles.

Yves VARENDE : Toujours plus fort. Lord Lister N°2. Collection Volume. Editions Lefrancq. Parution juin 1996. 1004 pages.

ISBN : 978-2871532835

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14 mars 2020 6 14 /03 /mars /2020 05:12

Et demain sera un autre jour…

Geneviève STEINLING : Hier, il sera trop tard.

Rien n’est plus propice à laisser vagabonder son esprit que d’assister à une messe. Pour certains la méditation prend le pas sur le quotidien, pour d’autres ce sont les souvenirs qui remontent à la surface comme des bulles délétères crèvent dans la vase d’un marais infesté.

Pour Marie-Jeanne, c’est toute son enfance qui remonte à la surface, des maux pas roses dans une ambiance morose. Il lui en a fait voir de toutes les couleurs celui qui gît dans le cercueil posé devant l’autel. Et elle se souvient de toutes les avanies qu’elle a dû subir sous sa férule d’alcoolique notoire. Des mesquineries et des punitions qu’elle avalait dans la naïveté de son enfance.

Sa mère, bigote comme il pouvait y en avoir dans les années soixante, obnubilée par la religion, passait l’éponge des coups d’humeur de son mari comme on chasse une mouche. Pour Marie-Jeanne, ces souvenirs sont trop prégnants pour les effacer d’un coup de gomme rageur.

La cérémonie mortuaire terminée, elle s’enfuit de l’église comme si elle avait le diable aux trousses, dans le froid, la pluie, la nuit. Elle quitte son village du Haut-Jura, sa grand-mère, sa mère, son frère Christian, emportant pour seuls bagages ses souvenirs, ses cauchemars.

 

Elle glisse sur la chaussée mouillée et un taxi qui passe par là manque l’écraser. L’homme qui est à l’intérieur l’aide à se relever et l’emmène à la gare où il doit prendre un train. Il ne s’agit pas d’un enlèvement, car Marie-Jeanne est consentante. Il va à Paris, elle aussi. Un voyage non programmé en compagnie d’un inconnu. Et lorsqu’il lui demande son nom, elle répond Michèle. Elle commence une nouvelle vie avec un nouveau prénom, à défaut de pouvoir changer de nom.

Très gentil le monsieur qui lui paie sa place lorsque le contrôleur leur demande leurs billets, et comme elle ne sait pas où se rendre, une fois arrivée sur place, il l’emmène chez lui en proche banlieue. Il lui offre même de passer la nuit dans la chambre de sa fille Madeleine, qui est décédée trois ans auparavant. La pièce est restée dans son jus, comme il est de bon goût d’affirmer maintenant lorsque rien n’a été changé depuis des années, avec les affiches de personnalités diverses et décédées. Ou encore la photo de Madeleine dans un cadre.

Le lendemain, elle ne se décide pas à partir, et Jean-Jacques, son hôte d’une nuit, accepte qu’elle reste. Sous certaines conditions. D’abord il va l’appeler Madeline, du prénom de sa fille. Elle va se vêtir avec les habits de la défunte, se coiffer pareil. Bref endosser un personnage. Et si elle peut se promener partout dans la maison, il lui est interdit de se rendre au grenier. Comme dans le conte de Barbe-Bleue. Pourtant la nuit précédente elle avait entendu, ou cru entendre une voix qui lui enjoignait de partir.

 

Marie-Jeanne devenue Michèle va pouvoir bénéficier d’une vie privée et Jean-Jacques pousse la complaisance à lui octroyer un emploi comme hôtesse d’accueil dans un hypermarché. Et peu à peu elle va faire la connaissance d’hommes avec lesquels elle s’entend bien, mais la déveine, la malchance, les occasions manquées se succèdent. Deux ans se passent, et elle va bientôt fêter son anniversaire, elle atteint l’âge qu’avait Madeleine lorsqu’elle est morte.

 

Une histoire simple mais poignante, qui du Haut-Jura jusqu’à Paris, entraîne une jeune fille un peu naïve, un peu perdue, un peu cabossée par la vie, dans une succession de petites joies, de grosses peines.

De 1978 à 1980, le lecteur suit le parcours de Marie-Jeanne aussi bien dans le réel que dans ses souvenirs, et il participe mentalement à cette succession d’épisodes qui l’accablent plus ou moins.

Il voudrait pouvoir lui prodiguer des conseils, mais que peut-on dire à une jeune fille majeure depuis peu et qui n’a rien connu de la vie, engoncée qu’elle était entre son père alcoolique et sa mère bigote. Son frère Christian était là, bien sûr, mais à Paris, ce n’est eux qu’elle regrette le plus. Lili, sa poupée lui manque.

Un roman simple, ai-je écrit, oui, jusqu’à un certain point. Car le final ne manque pas de remettre tout en question, d’expliquer des faits jusque là cachés, des faits et des épisodes dont Marie-Jeanne ne veut pas se souvenir. Juste des images indélébiles. Et le dénouement est assez imprévu même si le lecteur s’attend à un retournement de situation comme dans tout bon suspense qui se respecte.

 

 

On ne peut pas empêcher les gens de parler mais on peut s’empêcher de les écouter.

Geneviève STEINLING : Hier, il sera trop tard. Publication indépendante (Amazone). Parution le 19 février 2020. 200 pages. 8,50€.

ISBN : 979-8608276651

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11 mars 2020 3 11 /03 /mars /2020 04:11

Pas plus facile à forcer que les portails d’outre-tombe…

Emmanuelle et Benoît de SAINT CHAMAS : Les portails d’outre-temps (Strom 2).

Leur apprentissage terminé, Raphaël et Raphaëlle, les jumeaux, ont été intronisés pages dans la confrérie des Chevaliers de l’Insolite, une société secrète dont leur parrain Tristan Milan est l’un des séides influents.

Ce qui leur permet de réaliser quelques tours de magie, toujours sous le contrôle de leur parrain, qui procède en même temps à leur éducation et subvient à leurs besoins matériels et affectifs, leurs parents étant morts des années auparavant dans un accident de voiture, et de Sparadrap, leur protecteur et superviseur, un komolk parfois sourcilleux qui se transforme à volonté en animal ou objet.

Ils ont pour amis Arthur, qui n’a pas réussi le test et est resté apprenti, ainsi qu’Aymeric et Suzanne qui eux ne connaissent pas leurs facultés de magiciens en herbe. Des cours de maîtrise leurs sont dispensés mais réussir à marcher sur une ligne rouge comportant de multiples dangers et des embuscades diverses n’est pas aisé. Ils ont également en charge deux enfants placés dans un institut, auxquels ils doivent apporter assistance, affection et essayer de les sortir du monde dans lequel ils sont enfermés. Ainsi Cybille qui végète dans une forme d’autisme et joue avec une boite d’allumettes, construisant des figures géométriques ; ou Laurent, appelé aussi Oran, qui est trisomique. Une tâche dont ils s’acquittent avec conscience et abnégation.

En sortant de La Commanderie, l’endroit qui sert de lieu de réunion de l’Organisation dans les sous-sols du Louvre, un touriste demande à Tristan de le prendre en photo, en échange il lui propose d’en faire autant avec ses deux filleuls. Or la photo qui figure sur l’appareil numérique est exactement celle qui avait été récupérée sur l’ordinateur retrouvé quelques mois auparavant au fond d’un tombeau égyptien.

Raphaëlle, qui passait quelques jours avec Suzanne dans la résidence que ses riches parents venaient d’acquérir, le château d’Aurus, a mystérieusement disparu ainsi que son amie. Alerté, Tristan se rend immédiatement sur place en compagnie de Sparadrap et d’un ordinateur tout neuf. Il est persuadé que les deux gamines ont découvert une porte d’outre-temps et qu’elles s’y sont engouffrées. Il n’hésite pas à les suivre dans le passage secret et se retrouve quatre mille ans en arrière dans le désert égyptien. Un autre membre de l’association, qui lui aussi a emprunté par inadvertance un de ces passages permettant de voyager dans le temps, les accueille en compagnie d’hommes d’armes. Raphaëlle et Suzanne vont bien mais les membres de cette petite troupe sont traqués par des soldats portant sur la poitrine la marque d’un faucon. Heureusement ils peuvent correspondre avec Raphaël resté à Paris afin de mener une enquête de terrain. Il leur faut déjouer les pièges placés sur leur chemin, se débarrasser des assaillants, rencontrer Nitokris, la jeune reine qui malgré ses seize ans jouit sur son peuple d’une aura sans nuage, et surtout lui demander la permission de pouvoir accéder à la Porte du ciel, un passage qui leur permettrait de revenir au XXIème siècle. Car Tristan se demande si la momie qu’ils ont découverte dans un sarcophage quelques mois auparavant lors de leur précédente aventure et qui possédait un ordinateur qui ressemble curieusement à celui dont il est en possession, si cette momie ne serait pas lui-même. Mais les nuages s’amoncellent sur Nitokris.

 

Cette nouvelle aventure des jumeaux Raphaëlle et Raphaël et de leurs amis, promène plaisamment le lecteur de Paris jusqu’en Egypte, de New-York au cimetière du Père-Lachaise puis en forêt de Brocéliande, grâce à deux intrigues qui se croisent. Aventure, action, exotisme, mystère, fantastique, humour, émotion, tous ces ingrédients sont utilisés selon un dosage savamment établi et deux énigmes non résolues dans le premier tome sont ici dévoilées. Et nous retrouverons avec plaisir nos naufragés du temps dans un troisième épisode programmé en octobre 2011, lequel, n’en doutons point nous réservera d’autres agréables surprises.

 

Citation : Il avait l’air aussi désolé qu’un boucher qui tranche sa viande à grands coups de hachoir.

Emmanuelle et Benoît de SAINT CHAMAS : Les portails d’outre-temps (Strom 2). Editions Pocket Jeunesse. Parution 6 novembre 2014. 400 pages. 6,95€.

ISBN : 978-2266253406

Première édition : Editions Nathan. Parution 17 février 2011.

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7 mars 2020 6 07 /03 /mars /2020 04:54

Quand deux monstres sacrés de la littérature s’affrontent…

Lois H. GRESH : Les dimensions mortelles.

Rien qu’en regardant la couverture, le lecteur sait où il met les yeux. Et cela ôte un peu le mystère de ce roman, dévoilant l’identité des protagonistes. Et en y regardant d’un peu plus près, on apprend qu’un volume 2, mettant en scène les mêmes personnages principaux, va paraître en octobre, ce même lecteur se dit que l’histoire n’est pas finie et qu’elle peut se prolonger indéfiniment.

L’éternel combat du Bien contre le Mal.

Alors faire autant de simagrées, imaginer autant de circonvolutions, d’énigmes, de cachotteries au départ, énerve quelque peu. Quand est-ce le fond du sujet va-t-il être enfin abordé ?

Tout débute en octobre 1890, lorsque Sherlock apprend en lisant son journal favori, que quatre cadavres ont été découverts à Whitechapel dans un état de puzzle sanglant et macabre. Ou plutôt que les différents morceaux ont été rassemblés en une sorte de jeu de construction. Et trône parmi ces décombres une étrange sphère en os, percé d’un petit trou, à l’intérieur de laquelle sont gravés d’étranges symboles arcaniques. Parmi les défunts, le constructeur d’une machine bizarre entreposée dans un atelier délabré. Le fils de celui qui a monté cet ensemble de tuyaux, de morceaux de métal, de joints et de soufflets, apprend à Sherlock Holmes et Watson que cet engin à vapeur avait été financé par un personnage dont il ne connait pas le nom. Et la machine prend de l’ampleur, comme si elle vivait et se gonflait, inspirait quelque produit délétère.

Soudain la machine s’emballe, alors que passe un tramway à vapeur sur rails, et il semblerait bien qu’une corrélation soit à effectuer entre ce passage et le véhicule. Une explosion déchire les parages et ils n’ont que le temps de s’enfuir. Mais des passants ou habitants n’ont pas eu cette chance. Et Watson croit apercevoir sa femme Mary, son bébé dans les bras, avant d’être lui-même blessé.

En sortant de son évanouissement, il est rassuré. Sa femme et son fils vont bien et s’ils étaient sur place, c’est parce que Mary avait reçu un message, signé de son nom, l’enjoignant de se rendre sur les lieux. En examinant cette missive Sherlock et son compère pensent qu’il s’agit de Moriarty qui leur aurait joué un tour à sa façon, une farce de fort mauvais goût.

L’inspecteur Bentley et le professeur Fitzgerald sont au chevet de Watson avançant de nombreuses hypothèses.

A Avebury, dans le Wiltshire, un ébéniste qui ne fabrique que des meubles spéciaux, mettant des années pour les confectionner à l’attention de riches acheteurs, est tué par un fauteuil transformé en machine infernale. Le fils de l’artisan génial en informe Sherlock et Watson, et ceux-ci se rendent sur place afin d’enquêter sur ces étranges événements qui se produisent quasi simultanément.

Les meubles étaient conçus grâce à des plans provenant d’ancêtres les possédant depuis des siècles, des plans dessinés sur des parchemins de peau.

 

Ce fort volume n’entre pas dans ce que l’on pourrait qualifier le Canon holmésien, mais de nombreux auteurs se sont largement démarqués depuis la parution des aventures de Sherlock pour s’en offusquer.

Non, ce n’est pas là le bât qui blesse. Mais ce roman est lourd à digérer, verbeux, bavard, trop long avec trop de digressions, pour retenir mon attention. Plusieurs fois, j’ai décroché, le reprenant quelques jours plus tard, avançant péniblement dans ma lecture. Mais je dois avouer que je n’ai guère d’accointance aussi avec Cthulhu et les dieux imaginés par le Maître de Providence, même si ce monstre n’est que l’alibi (ou pas) de ce récit confus.

Il s’agit d’un pastiche, certes, mais pas vraiment bourré d’humour. Plutôt d’horreur, et cette sorte de sensation ne m’attire guère. Un roman qui paraît s’adresse à un lectorat jeune, avide de sensations fortes, débridées, complexes, qu’à un vieux de la vieille (et de la veille) comme moi. Seul le passage concernant Watson s’inquiétant de la santé de sa famille m’a intéressé, et encore, comment croire qu’il soit si dépendant de Sherlock pour partir, avec remords certes, courir l’aventure. A moins que justement l’aventure soit sa drogue. Sherlock Holmes possède bien la sienne dont il use et abuse selon les cas.

La fin toutefois est plus épique, franchement dirigée vers l’horreur et le terrifiant, dans une mise en scène grandiloquente qui confine à un épisode du Grand Guignol, et qui parfois fait sourire dans sa démesure.

Dubitatif et pas vraiment convaincu par ce style, par cette histoire, mais ce n’est que mon opinion personnelle, que je partage volontiers, et à laquelle tout un chacun n’est pas obligé d’adhérer.

Lois H. GRESH : Les dimensions mortelles. Sherlock Holmes vs Cthulhu tome 1 (Sherlock Holmes vs Cthulhu : The Adventure of the Deadly Dimensions – 2017. Traduction de Thomas Bauduret). Editions Ynnis. Parution le 8 janvier 2020. 480 pages. 24,90€.

ISBN : 9782376971153

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6 mars 2020 5 06 /03 /mars /2020 04:18

Je vous ai apporté des bonbons,

car Fleur est périssable…

Patrick LACHEZE : Fleur.

Petite fille de huit ans, Fleur est atteinte d’un mal terrible et incurable.

Elle ne parle pas, elle n’entend pas. Elle n’émet et ne perçoit aucun son. Rien. Le silence total.

Ce qui ne l’empêche pas de ressentir de la douleur physique et mentale lorsque son frère Philippe, son aîné de cinq ans, la violente.

C’est tellement facile de martyriser un être sans défense !

Jusqu’au jour où Fleur se sent animée, habitée, d’un pouvoir étrange qui lui permet de commander les objets à distance. Et c’est le drame.

La mère de Fleur ne peut qu’imaginer ce qu’il s’est passé et se tromper sur les motifs de Fleur à se rebeller.

Fleur qui est seule dans sa tête, qui ne peut communiquer avec personne, qui ne peut expliquer à personne le pourquoi de son geste. Fleur qui se rend compte que l’amour que sa mère aurait pu éprouver envers l’enfant handicapée qu’elle est, n’est plus que dans la compassion, de la pitié, de la commisération.

Dans l’hôpital psychiatrique où Fleur est internée, vivent toutes sortes d’exclus de la société, des exclus physiques et mentaux.

Fleur ayant maîtrisé son pouvoir saura semer la pagaille dans cette prison.

 

Pas franchement science-fiction, ce roman est plus axé sur l’épouvante, l’horreur, tout en privilégiant l’aspect psychologique.

Un roman terrifiant qui pourrait être un roman parabole ou prémonitoire, mais qui ne laisse en aucun cas le lecteur sur sa faim.

 

Quelques mots sur l’auteur :

Patrick Lachèze est né le 18 novembre 1957 à Clermont-Ferrand (Puy de Dôme).

Jeunesse heureuse passée sous le signe des livres qui ont toujours constitué le centre d’intérêt principal de mes jours et de mes nuits jusqu’à la rencontre de la femme de ma vie avec laquelle j’ai eu deux enfants.

Après le bac, une année en fac (psychologie) et un concours réussi : entrée dans le monde du travail et dans l’administration par la même occasion.

Le goût de la lecture étant toujours présent, ma bibliothèque s’étoffe au fil des ans et déborde dans toutes les pièces, ou presque, de mon habitation. Le temps que je parviens à consacrer à l’écriture est hélas beaucoup trop réduit, et ma production est assez dérisoire.

 

Le genre préféré de Patrick Lachèze se décompose en SF, Fantastique et Bande dessinée. Parmi les Français, ses auteurs de prédilection son t Serge Brussolo, Pierre Pelot, Jean-Pierre Andrevon, Joël Houssin, Serge Lehman ou encore Maurice Dantec. Les auteurs étrangers se nomment Dan Simmons, J. G. Ballard, Philip K. Dick, John Brunner, Theodore Sturgeon, Cordwainer Smith, Lovecraft et beaucoup d’autres.

En ce qui concerne la littérature dite générale, Umberto Eco, Perez-Reverte, Philippe Djian, Le Clézio, sans oublier les classiques : Hugo, Zola, Poe, Conrad, Sartre, Dumas, sans oublier les auteurs de la littérature populaire : Maurice Leblanc, Gaston Leroux, Ponson du Terrail, Féval…

A la question Pourquoi, il répond :

J’ai des goûts très éclectiques et je trouve autant de plaisir à lire Léon Malet ou Bob Morane (ce n’est pas un auteur mais un personnage, précision du scripteur) que Robbe-Grillet ou Margueritte Duras. Mes critères d’appréciation dépendent du plaisir, évasion pure ou jouissance plus intellectuelle, que procure la lecture de tel ou tel ouvrage. Il est cependant évident que la SF et les romans dits populaires ont souvent ma préférence, car ils se dévorent et je suis un lecteur boulimique.

 

Je précise qu’il est également l’auteur de deux nouvelles :

L'Amour qui s'en va est comme la mosaïque hermétique et fragile de l'agonie d'un cosmonaute. Miniature n° 1, octobre 1989.

Le Chasseur. THX 1138 N°1. 1997.

(Portrait établi d’après une correspondance avec l’auteur le 23 septembre 1998).

Patrick LACHEZE : Fleur. Collection Anticipation N°1703. Editions Fleuve Noir. Parution juillet 1989. 192 pages.

ISBN : 2-265-04170-X  

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  • : Lectures de l'Oncle Paul
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