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8 décembre 2018 6 08 /12 /décembre /2018 05:20

Quand les céréaliers se font du blé !

Max OBIONE : Les vieilles décences.

Le Mat, inspecteur de police en retraite, et Raja, ex substitut du procureur, se promettaient d’attraper “ le Monstre ”, un énorme brochet, dans un étang de Mornelande à Villecourt, non loin de Chartres.

C’est le cadavre d’un homme égorgé qu’ils remontent accroché à leurs hameçons. Dans les poches de ses vêtements ils trouvent un épi et des grains de blé. L’annonce dans un journal local que l’homicide serait en réalité un suicide attise leur colère. S’informant auprès du localier, Gaspard Métanier, Le Mat apprend que son article a été réécrit par le rédacteur en chef. Toutefois le pigiste promet de fournir une disquette qu’il placera sous la statue de Saint Antoine de Padoue, dans l’église du village.

Sur les conseils avisés d’un bistrotier, Baduc, Le Mat loue une chambre chez l’habitant. Puis il se rend au lieu dit. En cours de route il tombe sur un attroupement. Un camion de pompier vient de blessé mortellement Métanier. Selon le brigadier Bléchard, qui avait procédé à l’enlèvement du corps du noyé, il s’agit d’un banal suicide. Bizarrement le conducteur s’est enfui. Raja le rejoint le lendemain. Dans le train il retrouve par hasard Spiegelman, un journaliste parisien qui doit enquêter sur les céréaliers et plus particulièrement sur une association dite la confrérie de Saint-Luperce. Il passe à la morgue de Chartres afin de vérifier l’identité du poisson humain. Mais le cadavre présenté ne correspond pas au leur.

La disquette leur fournit le nom du faux suicidé : Mornand, un cultivateur qui se serait converti au bio. Après une soirée bien arrosée chez Baduc, lequel leur remet deux jetons permettant semble-t-il de s’introduire dans une officine de jeux clandestins, les deux compères prennent la route de la ferme de Mornand. Ils surprennent une troupe d’une douzaine d’individus habillés en para militaires se rendant vraisemblablement à un rendez-vous en pleine campagne tandis qu’un DC3 survole la région.

Après une nuit réparatrice, ils se présentent à la ferme de Mornand qui semble abandonnée. Des oiseaux morts gisent ça et là. Ils se font passer pour des journalistes auprès d’un jeune écolo, instituteur de son état qui rend visite à Mme Mornand. Celle-ci est inquiète n’ayant pas de nouvelles de son mari depuis plusieurs jours. Selon l’instit, le principal adversaire de Mornand serait le vicomte Hubert Couillard de Hautemanière qui règne sur les céréaliers.

 

Sous un aspect futile et léger, dû principalement à l’humour dégagé par les deux compères, ce roman de Max Obione traite d’un sujet brûlant, celui des dérives agricoles, d’une façon lucide.

Les méfaits des manipulations transgéniques, niées et cachées par les grands groupes chimiques et ceux qui préfèrent la rentabilité au principe de précaution, bafouant la santé de leurs concitoyens, ne sont pas toujours dénoncés avec la virulence qu’il faudrait.

Max Obione ne délivre pas un message mais il met en avant certaines pratiques honteuses, même si cela ne conduit pas forcément jusqu’au meurtre. Quoique. Les exemples de fermes incendiées “ spontanément ” ; de troupeaux d’ovins décimés, appartenant à de jeunes éleveurs bio, deviennent par trop fréquents dans la vie courante, pour que ces événements soient naturels.

Max Obione gratte où ça démange, et il serait souhaitable que d’autres personnes en prennent conscience, et pas uniquement des auteurs de romans noirs. Les personnages de Raja et Le Mat sont réjouissants, et méritent d’entrer dans la galerie des protagonistes atypiques. Quant aux autres figurants de cette histoire, bons ou méchants, ils méritent eux aussi des mentions très bien, quel que soit leur rôle, comme les acteurs à qui seraient décernés le César du meilleur second rôle.

Première édition : Editions Krakoen. Parution 1er mars 2005. 232 pages.

Première édition : Editions Krakoen. Parution 1er mars 2005. 232 pages.

Max OBIONE : Les vieilles décences. Collection Noire Sœur. Editions SKA. Parution le 20 novembre 2018. 2 ,99€.

ISBN : 9791023407457

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1 décembre 2018 6 01 /12 /décembre /2018 05:19

Max et le faire ailleurs…

Jérémy BOUQUIN : Max.

Famélique, crasseux, affamé, Max, à peine seize ans, se présente à la pizzeria chez Paulo, le Sicilien. D’après une rumeur, il pourrait y avoir du boulot pour lui. Une rumeur glanée sur le marché, mais le bistrotier n’a pas l’air emballé d’embaucher ce gamin qui de plus avoue ne pas savoir lire.

Après bien des tergiversations, et fait saliver Max en mangeant goulument sa pizza quotidienne, Paulo accepte de lui confier le service et la plonge. Ce n’est pas à quoi s’attendait Max, mais comme il a faim, faut bien survivre.

La première journée se déroule normalement et il touche un petit pécule qu’il compte bien voir évoluer dans un sens ascendant. Et puis Paulo et Raoul le cuistot ne lui font pas de réflexions désagréables même s’ils se montrent bourrus. Surtout Paulo qui ne commence par démarrer sa journée après l’ingestion de ses trois cafés rituels. Et ses cigarettes papier maïs qu’il offre à Max, lequel refuse, mais se mettra un peu plus tard à cloper lui aussi, des blondes légères.

Paulo lui trouve une chambre, un studio, chez une petite vieille. C’est cradingue, ça pue, mais au moins Max est à l’abri, au chaud, ce qui le change de ses cartons dans la rue ou sous les ponts. Et ses moments de pause, il les passe à contempler les rives de Loire.

Jusqu’au jour au Paulo lui confie quelques missions qui n’ont rien à voir avec la restauration, mais l’appât de billets supplémentaires influe sur la décision de l’adolescent. D’abord porter dans un endroit pourri un carton de pizza devant la porte ou se terre Raymond, un personnage qu’il a déjà aperçu à la pizzeria. Raymond, un colosse apeuré qui quémandait une forte somme pour réaliser un truc. Un truc, c’est tout ce qu’il sait. Mais Raymond n’a pas tenu ses engagements et Paulo n’est pas content. Pas content du tout, et il réserve à Raymond une surprise à sa façon, c’est-à-dire brutale.

Puis Paulo lui confie un appareil photo pour prendre des clichés d’une femme et son gosse, dans un autre quartier tout aussi délabré, ou presque.

Et il fait la connaissance de Cloé, sans H, qui l’aborde sur un banc alors qu’il rêvassait. Il n’aime pas ça Max, il veut préserver sa tranquillité, et se faire draguer par une gamine de son âge, ce n’est pas dans ses visées. Pourtant Cloé s’incruste, le retrouvant chez le Portugais, un bar où Max a ses habitudes, dégustant des bières brunes durant ses pauses.

Max ne pense pas aux filles. Il garde son air bourru. Et puis, il s’est trouvé une passion, une vraie. Il a maîtrisé son petit appareil photo avec carte malgré qu’il ne sache pas lire, et fait ressortir sur les clichés les aspects les plus intéressants, manipulant, cadrant, mettant en valeur les décors, les visages, tout ce qui lui semble intéressant à capter avec son viseur.

 

Dans une ambiance misérabiliste, Jérémy Bouquin nous entraîne à la suite d’un gamin des rues, moderne Gavroche, transplanté dans les Mystères de Paris, même si l’action se déroule sur les bords de la Loire.

Désirant s’en sortir, par le travail, même en se servant de ses poings, au début du récit, Max est un adolescent qui ne fricote pas avec la pègre, les revendeurs de drogue et autres malfrats. Du moins consciemment. Il est renfermé, réservé, méfiant, et ses relations ne sont que des relations de travail. Il n’a pas d’ami, et lorsqu’une gamine de son âge, plus délurée que lui, l’aborde, il réagit comme un chat sauvage.

Mais la vie décide de l’avenir et ce qu’il va connaitre, subir, le dépasse. La rédemption pourrait passer par la photographie, mais encore faudrait-il qu’il ait une vision nette de ce qu’il se trame et qu’il capte les magouilles qui s’ourdissent en dehors de lui, magouilles dont il est un acteur involontaire.

La seconde partie de ce roman est axée sur Cloé et sa détresse lorsque Max disparaît pour des raisons décrites à la fin de la première partie. Et si Max pourrait être assimilé à Gavroche, Cloé serait la petite fée Clochette, aguicheuse et protectrice à la fois.

Jérémy Bouquin découpe ses phrases en lamelles comme Raoul détaille en julienne ses légumes destinés à garnir ses pizzas. C’est parfois brut, haché, lancés à la volée, compact, et surgissent quelques éclairs de couleurs dans une atmosphère où le sombre, le poisseux, le gras, règnent en une quasi uniformité dégoulinante de noirceur.

 

On s’aperçoit, en lisant la nouvelle génération d’auteurs de romans noirs, qu’au cours de notre vie on s’est peut-être engoncé dans des certitudes qui n’ont plus cours.

Ainsi, alors que depuis des décennies, je plaçais la fourchette à gauche et le couteau à droite, Max me démontre que je faisais une faute de goût puisqu’il dresse la table en sens contraire de mes habitudes. Et alors, que je fus durant de très longues années un fervent fumeur de Gitanes mais pas papier-maïs, j’apprends que les paquets sont désormais souples alors que je les ai toujours connu rigides.

On vieillit et on ne se rend pas compte que le monde évolue…

 

Pour autant, ne manquez pas la chronique de Pierre sur son blog :

Jérémy BOUQUIN : Max. Novelle numérique. Collection Noire Sœur Polarado. Editions SKA. Parution 26 octobre 2018. 190 pages environ. 2,99€.

ISBN : 9791023407402

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22 novembre 2018 4 22 /11 /novembre /2018 05:59

En Simca 1000 Pigeot ?

Thierry CRIFO : Pigalle et la fourmi.

Gabriel Lecouvreur alias Le Poulpe, est plongé dans une phase nostalgique, arpentant les trottoirs de Pigalle, à la recherche des fantômes de ses parents.

Cheryl désirant acquérir une nouvelle boutique de coiffure, histoire de se décentraliser et teindre la mèche hors de son arrondissement de prédilection, a jeté son dévolu sur une boutique du IXe arrondissement, plus précisément rue de Douai.

Ce n’est pas la mer à boire, pourtant Gabriel n’apprécie guère. Et ne voilà-t-il pas que son vieil ami Pedro lui fait remarquer, bêtement, comme ça par hasard, vendant la mèche sans s’en rendre compte, que ses parents (au Poulpe et non à lui Pedro), que les parents donc de Gabriel, ébouriffé par cette révélation, ont habité précisément cette rue et sont décédés accidentellement dans le quartier de Blanche-Pigalle.

Pas doué pour une fois le Pedro qui décoiffe. Gabriel était persuadé que ses parents étaient morts près de Chartres. Du moins c’est ce qu’on lui avait toujours dit. Alors ? Déboussolé, accablé par la chaleur, il investit un quartier qu’il ne connaît pas et remonte les traces qu’aurait pu laisser son père, découvrir une vérité qui le taraude alors qu’auparavant il n’avait jamais pensé à remonter le passé à la découverte de ses origines.

 

Un Poulpe qui sort enfin de l’ordinaire (avec celui de Pierre Bourgeade : Gab save the Di). Gabriel est entièrement impliqué dans cette enquête, cette quête, et ce n’est pas une affaire qu’on lui propose, par le biais parfois.

Non, cette fois, c’est lui qui est en cause, ses parents, les mensonges qui lui ont été fournis peut-être pour ne pas le traumatiser, lui qui se promène avec dans son portefeuille une photo de ses géniteurs mais n’avait jamais cherché à savoir où elle avait été prise, un retour en arrière qui risque de faire mal.

Thierry Crifo, tout en respectant la Bible du personnage, innove, et c’est comme une bouffée de fraîcheur dans un Pigalle qui transpire sous la canicule.

 

Thierry CRIFO : Pigalle et la fourmi. Le Poulpe N°226. Editions Baleine. Parution le 9 octobre 2001. 200 pages. Réédition en version numérique : 2,99€.

ISBN : 978-2842193553

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21 novembre 2018 3 21 /11 /novembre /2018 05:23

Les portes du pénitencier…

Michel HONAKER : Troll.

Dans la prison de Salt Hills, Les Collines de sel, des détenus disparaissent mystérieusement.

Une odeur nauséabonde imprègne les cellules. Dans la nuit, parfois résonnent d’étranges bruits venus des entrailles de la Terre.

Les geôliers ont beau dire que les prisonniers qui manquent à l’appel ont bénéficié de remises de peine, pour ceux qui restent, il s’agit ni plus ni moins d’affabulations.

D’ailleurs à quoi correspond ce cri qui retentit, si ce n’est celui poussé par un être humain en proie à une grande frayeur ? Et l’on ne peut empêcher les rumeurs de circuler.

Il y aurait, parait-il, dans le sol, des disparus, un trou, un cratère. Et s’il s’était agi d’une évasion, tout le monde serait au courant.

Le FBI est chargé de cette affaire et Maître Anika, un occultiste dont on a demandé l’aide, déclare que cette histoire de manifestations d’origines maléfiques est trop forte pour lui. Selon Maître Anika, un seul homme est à même de résoudre cette énigme et de combattre le cas échéant les forces du Mal : il s’agit d’Ebenezer Graymes, démonologue à l’Université de Columbia, plus connu sous le nom du Commandeur.

 

Dans ce septième volume consacré au Commandeur, le lecteur ne s’ennuie pas un seul instant.

Moins violent, moins accrocheur, moins chargé d’érotisme que dans les précédents épisodes, il n’en est pas moins efficace.

Un roman dont certains passages font penser indubitablement au grand Howard Phillips Lovecraft.

Une ambiance et une atmosphère dignes de l’Ermite de Providence.

 

Ce roman a été réédité pour les adolescents sous le titre Le Cachot de l’enfer dans la collection Cascade policier chez Rageot en 1998.

Première édition : Collection Anticipation N°1795. Editions Fleuve Noir. Parution janvier 1991. 192 pages.

Première édition : Collection Anticipation N°1795. Editions Fleuve Noir. Parution janvier 1991. 192 pages.

Michel HONAKER : Troll. Série Le Commandeur N°6. Edition numérique. Collection e.Anticipations. Editions L’ivre-Book. Parution le 14 novembre 2018. 2,99€.

ISBN : 9782368926451

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5 novembre 2018 1 05 /11 /novembre /2018 05:37

Lola… Je suis morgane de toi…

Louisa KERN : Lola.

Si en 2018 la France, et donc nous, fêtons la commémoration du centenaire de l’Armistice de la guerre de 14/18, il ne faut pas oublier non plus le cinquantenaire de Mai 1968 qui changea profondément la vie sociale, politique, familiale, professionnelle, culturelle de la plupart des citoyens de l’époque.

Pour beaucoup Mai 1968 reste une référence, pour d’autres, ceux qui n’ont toujours pas digéré ce changement de cap, un accroc dans le paysage urbain et rural.

Pour bon nombre d’ente nous, mais nous sommes de moins en moins à avoir vécu cette période, celle de nos vingt ans, en parler ne se réduit pas à des barricades dans le Quartier Latin. Ou à des manifestations d’ouvriers et à des défilés de protestations. Et parmi ces événements qui ont défrayé la chronique journalistique, de petits événements se sont déroulés dans l’indifférence générale ou presque.

 

Rue da la Sorbonne, les affrontements font rage entre étudiants et CRS. Le narrateur remarque une jeune fille portant un foulard sur le visage. Un mouvement de foule et il la perd de vue. Il se lance dans sa direction, une barre de fer en main, mais il ne peut aller plus loin. Il se fait tabasser par un membre des forces de l’ordre et lorsqu’il reprend ses esprits, c’est une main sur son front qu’il ressent en premier. Lola. Lola l’emmène en le tirant par les pieds et il est mis à l’abri.

Baptiste est son copain de toujours, malgré leur position sociale respective. Le narrateur vit dans une cité HLM, Baptiste dans un quartier résidentiel. Lola, qui au début battait froid envers Baptiste, s’amourache de lui. Ils se retrouvent tous en compagnie d’autres révoltés dans un squat. Le narrateur ne sait pas faire grand-chose, sauf la popote. Il se trouve propulsé cuistot et c’est au cours de l’une de ses préparations culinaires pour la petite communauté, que les forces dites de l’ordre font irruption. L’intervantion dégénère et le narrateur se voit inculpé pour un meurtre qu’il n’a pas commis.

 

Une nouvelle, à deux voix entre le narrateur et une jeune fille nommée Sabine, pleine de délicatesse, d’émotion, de souvenirs, sur un fond historique et dramatique. Nul doute que cela ravivera la mémoire de certains d’ente vous, pour les autres, un moyen de découvrir l’autre côté de la barrière, vu de l’intérieur.

 

Si vous aimer cette nouvelle, ce dont je ne doute point, sachez que Louisa Kern possède un double qui signe Valérie Allam. Et cette jeune écrivaine (mais dont les écrits ne sont pas vains !) de talent, qui s’affine de plus en plus dans son écriture et les thèmes développés, vient de faire paraître aux Editions du Caïman : Quatre morts et un papillon.

 

Louisa KERN : Lola.

Pour acheter cette nouvelle et d’autres, vous pouvez vous rendre sur le site ci-dessous :

Lire également de Louisa Kern chez SKA : Popa ; Petit Papa Noël ; Gaspacho ;

Louisa KERN : Lola. Nouvelle numérique. Collection Norie Sœur. Editions SKA. Parution 26 octobre 2018. Environ 12 pages. 1,99€.

ISBN : 9791023407389

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10 octobre 2018 3 10 /10 /octobre /2018 05:23

Comment faire le tour du monde avec en poche vingt-cinq centimes ? A méditer par nos hommes politiques au lieu de faire les poches des retraités !

Paul D’IVOI et Henri CHABRILLAT : Les cinq sous de Lavarède.

C’est ce que doit réaliser Armand Lavarède, trente cinq ans, journaliste ayant également poursuivi des études de médecine et scientifiques mais homme dépensier, possédant des dettes un peu partout.

Surtout avec monsieur Bouvreuil, qui pratique l’usure en plus de ses différentes occupations de banquier et financier, agent d’affaires. L’homme, peu sympathique, qui a racheté les quittances de loyer, veut bien passer l’éponge sur ses dettes, des loyers en retard, si Lavarède accepte d’épouser sa fille, la triste et sèche Pénélope. Ce que refuse catégoriquement Lavarède qui ne veut en aucun cas se mettre un boulet à la cheville.

Il est convoqué chez un notaire qui lui signifie qu’il est le légataire universel de son cousin Richard, qui s’était installé en Angleterre, pour un héritage s’élevant à quatre millions environ, et composé de maisons et propriétés, de rentes, d’actions et d’obligations. Mais pour percevoir ce pactole, il devra faire le tour de monde avec seulement vingt-cinq centimes en poche. Et pour vérifier si notre voyageur, qui accepte les clauses du testament, ne triche pas, il sera accompagné par sir Murlyton et sa fille Aurett, les voisins de cousin Richard en Angleterre. Autant Pénélope est moche, autant miss Aurett est belle à ravir. Mais nous ne sommes pas là pour digresser sur les avantages physiques de celle qui va suivre, en compagnie de son père ne l’oublions pas, les tribulations de Lavarède qui devront durer un an, jour pour jour. Rendez-vous est pris donc pour le 25 mars 1892, avant la fermeture des bureaux.

Première étape gare d’Orléans, direction Bordeaux, puis correspondance avec un transatlantique qui va rallier l’Amérique. En gare, comme il connait un sous-chef, il promet à celui-ci une forte somme d’argent s’il parvient à toucher l’héritage. L’homme accepte sans difficulté et Lavarède se niche dans une caisse à piano sur laquelle est apposée la mention Panama. Dans le même train voyagent sir Murlyton et sa fille Aurett, ainsi que l’oiseau de mauvais augure du nom de Bouvreuil, qui doit également effectuer le voyage, étant le président du syndicat des porteurs d’actions du Panama. La conversation s’engage et Bouvreuil sait à présent que Lavarède doit se trouver à bord d’une caisse, miss Aurett l’ayant aperçu.

Heureusement la jeune fille parvient à avertir Lavarède, niché dans sa caisse, et celui-ci a le temps de s’extirper avant que Bouvreuil exige des employés que le caisson soit ouvert. Mais point de Lavarède à l’intérieur au grand dam de l’homme d’affaires.

Nous suivons Lavarède à bord du paquebot qui va le transporter gratuitement jusqu’au Panama, avec à ses trousses Bouvreuil et en compagnie ou suivi de loin, voire parfois protégé par sir Murlyton et sa fille. Surtout sa fille.

Première escale en Martinique, puis arrivée au Panama, qui à l’époque faisait partie de la Colombie, via La Guaira, le port de Caracas au Venezuela. Un nouveau personnage entre alors en scène, don José Miraflorès y Courramazas, un aventurier qui s’accoquine avec Bouvreuil. Puis tout ce petit monde gagne le Costa-Rica à dos de mulets ou de cheval pour les plus chanceux. A la faveur d’une révolution Lavarède se trouve propulsé comme le nouveau président de la république costaricienne. Mais il est bientôt destitué à cause d’une nouvelle révolution et départ pour la Californie où les voyageurs passent quelques temps à Frisco dans le quartier chinois. Ensuite embarquement pour les îles Sandwich, toujours sans payer, car Lavarède trouve une nouvelle astuce pour voyager à bord d’un navire. Il se fait passer pour mort et enfermer dans un cercueil à la place d’un Chinois, membre d’une franc-maçonnerie chinoise.

Tout ce petit monde parviendra en Chine en aérostat, puis la traversée du Tibet verra notre voyageur désigné comme un nouveau dieu.

Les avatars continuent jusqu’à l’arrivée en Europe puis à Londres où Lavarède arrive pile à l’heure, en compagnie de sir Murlyton, qui s’est pris d’affection pour ce compagnon aventureux, et de miss Aurett qui ressent un sentiment nettement plus amoureux.

 

Ce roman a été publié pour la première fois en 1894, mais l’on ne pourra s’empêcher de penser au Tour du monde en 80 jours de Jules Verne, roman publié en 1873. En effet Les cinq sous de Lavarède propose un tour du monde avec retour au lieu de départ à une date fixée par contrat, et les différents moyens de transports employés, par terre, par mer, par air, possèdent un air de ressemblance avec l’un des plus célèbres romans de son prédécesseur qui signait les Voyages Extraordinaires, tandis que la série des voyages imaginés par Paul d’Ivoi se nommait les Voyages excentriques.

L’intrigue et la narration des Cinq sous de Lavarède sont nettement plus enlevés, plus rapides, plus passionnants, moins pédagogiques même si le lecteur voyage beaucoup et sans véritables temps morts. Un roman d’action, d’aventures, dont les épisodes sont parfois rocambolesques, humoristiques, avec ce petit côté ludique, qui ne peut qu’engendrer le plaisir de lire et inciter à se plonger dans d’autres ouvrages du même genre et en déborder pour découvrir d’autres styles, d’autres catégories.

Même si parfois on se rend compte qu’on est en face d’aventures débridées, pas toujours crédibles, on se laisse emporter par ce périple au long cours. Un classique de la littérature qui a été adapté aussi bien en bandes dessinées qu’au cinéma, justement par ce côté grandiloquent dans les situations diverses dans lesquelles notre héros, et ses compagnons de voyage sont entraînés. Sans oublier le cas de Bouvreuil qui suit à la trace ou voyage de concert avec Lavarède et à qui il arrive de nombreuses avanies. Mais chacun des personnages de ce roman est lui aussi confronté à des situations périlleuses ou amusantes, et l’enchainement des divers épisodes oblige le lecteur à poursuivre son chemin sans avoir envie de s’arrêter.

Vous pouvez télécharger gratuitement cet ouvrage, sous la forme numérique que vous souhaitez en cliquant sur le lien ci-dessous :

Paul D’IVOI et Henri CHABRILLAT : Les cinq sous de Lavarède. Collection Mille Soleils d’or. Editions Gallimard. Parution septembre 1980. 450 pages.

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8 octobre 2018 1 08 /10 /octobre /2018 13:31

Une variante d’histoire d’O et de 50 nuances de Grey… mais en plus léger !

Véronique POLLET : Blind date et la suite.

Dans sa poche, une enveloppe noire. A l’intérieur un carton, noir lui aussi, et juste ce mot écrit en lettres d’argent : Tout.

Cette femme qui détient ce message énigmatique, pour le lecteur, mais pas pour elle car elle sait ce que ce Tout signifie, cette femme est une magnifique représentante du plaisir.

Hiératique dans sa pose et sa démarche, et un regard hautain sur le monde. Elle fait partie de la race des vainqueurs, avec un visage froid et dur, et des yeux verts de chat sauvage. Et n’a qu’un seul but : gagner.

Gagner quoi ? La reconnaissance peut-être, de son client éventuellement. Car cette femme anonyme s’engouffre dans un hôtel de luxe, donne son nom à la réception, et reçoit sans barguigner une lourde clé. Mais elle ne se précipite pas, elle attend nonchalamment installée dans un fauteuil du hall, dégustant en connaisseuse un whisky sans glaçon.

Puis elle se rend à la chambre 222, accompagnée jusqu’à l’étage par le groom. Spirou peut-être ? Peu importe. Elle est attendue par un homme dont elle ne peut apercevoir la silhouette. Juste la voix.

Puis la séance débute… mais là permettez-moi de vous quitter sur la pointe des pieds et de vous laisser continuer la lecture de cette nouvelle érotique mais très douce, très imagée, très caressante parfois. Tout se déroule dans le noir, je vous incite à laisser travailler votre esprit afin de mieux imaginer ce qui va suivre.

 

Cette femme anonyme, on la retrouve dans deux autres nouvelles, For your eyes only, dans laquelle elle se dévoile comme dominatrice, fouettante, câline, adepte des menottes sans être une représentante des forces de l’ordre, et dans Sweet memories, une projection dans l’avenir puisqu’elle réside dans un hôtel afin de reprendre du poil de la bête. Elle est amaigrie, et ses fils lui ont conseillé de suivre une cure. Dans cette résidence fin de siècle, d’un autre siècle, elle s’installe dans la salle à manger se laissant aller à se remémorer ses souvenirs de dominatrice. Son regard est attiré un pensionnaire encore viril, une attirance réciproque, et elle retrouve un peu de force et de fierté…

 

Trois histoires qui se suivent et ne se ressemblent pas sauf par cette atmosphère de soumission et de domination, de sexe feutré, de douceur dans le propos. Un éloge de la femme qui ne subit pas, sauf peut-être dans ses envies, ses besoins, ses plaisirs.

Véronique POLLET : Blind date et la suite.
Véronique POLLET : Blind date et la suite.

Véronique POLLET : Blind date et la suite. Nouvelles numériques. Collection Culissime. Editions SKA. Parution le 1er octobre 2015. 1,99€ chaque.

Blind date. ISBN : 9791023404432

For your eyes only. ISBN : 9791023404562

Sweet memories. ISBN : 9791023404913

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8 octobre 2018 1 08 /10 /octobre /2018 06:43

Envoyer une lettre coquine c’est bien, en recevoir, c’est mieux !

Théophile GAUTIER : Bellissime. Lettre à la présidente.

Dans cette lettre, datée du 19 octobre 1850, Théophile Gautier s’adresse à la Présidente. Une missive écrite à Rome et relatant son voyage en Suisse d’abord puis dans différentes villes de la péninsule italienne.

La Présidente, est une charmante femme qui servit de modèle à des sculpteurs et des artistes peintres, recevant de nombreux écrivains, compositeurs ou statuaires à sa table ou dans son salon. Elle se montre à l’égal de ses hôtes et selon Ernest Feydeau (Souvenirs intimes de Théophile Gautier) elle se montrait supérieure aux autres femmes, d’abord en ce qu’elle était mieux faite, ensuite, parce que, contrairement aux habitudes des personnes de son sexe, elle n’exigeait point qu’on lui fit la cour, et permettait aux hommes de parler devant elle des choses les plus sérieuses et les plus abstraites.

Ce courrier débute ainsi : Cette lettre ordurière, destinée à remplacer les saloperies dominicales, s’est bien fait attendre ; mais c’est la faute de l’ordure et non de l’auteur. Un peu plus loin, il continue en ces termes : J’ai le grand regret de ne pouvoir vous envoyer que des cochonneries breneuses et peu spermatiques. Une façon quelque peu familière d’écrire à une jeune femme qui n’est point offusquée et peut-être en redemande.

Villon et Rabelais sont présents au-dessus de l’épaule de l’écrivain, et peut-être lui soufflent-il quelques expressions, tournures de phrases qui font les délices d’un amateur égrillard. Gautier s’attache plus à décrire les personnes du sexe, comme il était de bon goût à l’époque de dire lorsque l’on parlait de femmes, que les monuments et curiosités touristiques des villes dans lesquelles il musarde en compagnie de Louis. Je ne prélèverai que deux exemples, juste de quoi vous émoustiller et vous inciter à découvrir le texte en son entier.

A Genève, le gouvernement vous recommande, à la porte de la ville, devoir ci-derrière ; ce qui est beaucoup dans une ville protestante, où, pour humilier les catholiques, et leur montrer qu’ils ne sont que des païens sensuels, les femmes se rabotent le cul et les tétons avec la varlope de la modestie, selon la méthode américaine.

Une image qui traduit l’antagonisme entre l’austérité, affichée, des mœurs des pratiquants de la religion dite réformée, et la joyeuse paillardise dont les moines bedonnants et à la mine réjouie pouvaient se prévaloir.

Au contraire, l’auteur s’extasie devant les rotondités des Romaines, débordantes de chair. Une description qui ne manque pas de saveur et l’on se prend à rêver devant L’histoire de la mère de Beatrice Cenci, à qui l’on ne pouvait couper la tête, parce que ses tétons, gros come des bombes, l’empêchaient d’appuyer son cou sur le billot...

Théophile Gautier et son compagnon de voyage ne résistent pas aux bonnes fortunes qui leur sont prodiguées en cours de route, et cela est relaté d’une manière peu académique.

 

La préface signée André Lacaille est fort intéressante, notamment en ce qui concerne le style et les écrits de certains écrivains de l’époque, respectables et honorés, piedestalisés, quasiment panthéonisés, qui n’hésitaient pas à se fourvoyer dans des écrits gaulois, grivois, érotiques, voire plus. Je me permettrai juste de relever ce qui me semble une petite erreur. Il est écrit : il a 24 ans en 1830 lorsqu’il effectue sa première incursion (à sa passion italienne). Il voyage en compagnie de Louis de Cormenin, fils du fameux pamphlétaire du règne de Louis-Philippe. Or, à ma connaissance, Théophile Gautier est né le 31 août 1811. Et sans prendre de calculette, je puis affirmer que notre ami Théophile n’a dans ce cas que 19 ans, ce qui est plus logique par rapport au texte, à la forme de naïveté qui s’en dégage, et surtout à l’approche que l’auteur de la missive professes à l’encontre des femmes. Mais si ce voyage s’effectue en 1830, comment se fait-il que cette lettre soit datée du 19 octobre 1850 ! Les mystères des prosateurs qui peut-être ne se relisent pas ou qui cherchent à égarer le lecteur dans ce qui n’est après tout qu’un document privé.

A moins que ceci ne soit qu’un aimable pastiche…

 

Théophile GAUTIER : Bellissime. Lettre à la présidente. Préface d’André Lacaille. Collection Perle rose. Editions Ska. Parution 01 novembre 2017. 3,99€.

ISBN : 9791023406559

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1 octobre 2018 1 01 /10 /octobre /2018 09:36

Vous connaissez les TOC, troubles obsessionnels compulsifs, mais connaissez-vous les TOS ?

Jan THIRION : A fond les manettes.

Il s’agit tout simplement d’une pulsion qui oblige l’individu atteint de ce trouble de se masturber. Ce qui se nomme Trouble Obsessionnel Sexuel.

Peut-être vous-même ressentez-vous ce besoin, mais ne me dites rien, ceci fait partie de votre vie privée, et intéressons-nous plutôt à Clochette, un des personnages de cette nouvelle humoristique et érotique de Jan Thirion qui savait narrer une histoire libertine sans pour autant choquer la pudeur de ses lecteurs.

Alors que Clochette inspecte d’un doigt habile son entrejambe, elle sent une odeur de brûlé. Ce n’est juste que le rôti qui prend ses aises dans le four. Et le téléphone qui se met à sonner. L’hôpital l’informe que son beau-père vient d’être amener en urgence. Elle a beau appeler Willy son mari, mais personne ne répond. Elle le découvre dans la réserve de l’abri-antiatomique en train de mélanger de la confiture dans un pot à l’aide de son outil destiné à la reproduction et placé entre ses jambes depuis sa naissance.

Car tout autant que Clochette, Willy son compagnon est un adepte des plaisirs solitaires (tiens, tiens, Clochette et Willy, clin d’œil à Willy et Colette ?) ce qui les a rapproché. Leur union est satisfaisante et ils s’entendent comme larrons en foire pour leurs débordements manuels.

Willy se rend immédiatement à l’hôpital, non sans avoir hésité sur le choix de la voiture qu’il va emprunter. Féru d’automobile, comme son père et le père de Clochette, il possède quelques voitures de sport magnifiques mais il se décide finalement pour un véhicule banal. De toute façon la vitesse en ville est limitée à 5 km/heure, ce qui fait qu’il aurait aussi vite fait d’aller à pied. Les véhicules prioritaires ont droit à un effarant 8 km/heure. Et Jan Thirion l’avait écrit bien avant les annonces officielles sur les réductions de vitesse.

 

Dans ce texte gaulois, non réfractaire, Jan Thirion se déchaîne, accumulant les situations les plus baroques, les plus loufoques, les plus démesurées, les unes que les autres.

Joyeusement égrillard, A fond les manettes est totalement délirant, et l’on ne croit pas une seule seconde à toutes les péripéties que nous narre Jan Thirion. Il laisse son imagination vagabonder pour évoquer des situations abracadabrantesques mais sous son propos, certains actes, qui ne sont pas manqués, sont réels, comme peuvent en témoigner quelques infirmiers et infirmières qui ont été confrontés, parfois, à des cas quasiment semblables. On n’arrête pas le progrès en termes d’objets sexuels de substitution.

A lire en prenant du recul…

 

http://leslecturesdelonclepaul.over-blog.com/2017/04/jan-thirion-la-compil.html

Jan THIRION : A fond les manettes. Nouvelle numérique. Collection Culissime. Editions SKA. Parution le 20 juin 2013. 20 pages environ. 1,99€.

ISBN : 9791023401905

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20 septembre 2018 4 20 /09 /septembre /2018 05:57

Il est Hypperbone, si je puis dire !

Jules VERNE : Le testament d’un excentrique.

En ce vendredi 3 avril 1897, règne une effervescence inhabituelle dans Chicago. Un char tendu de draperies d’un rouge éclatant traverse la ville, accompagné de toutes les personnalités de la cité, hommes politiques, journalistes, riches entrepreneurs, et combien d’autres invités à défiler, précédés d’orchestres et d’orphéons, salués par une foule nombreuse estimée à plusieurs centaines de milliers d’individus, tous sexes et âges confondus.

Les applaudissements fusent, il règne une espèce de joie diffuse, dont l’origine est pourtant mortuaire. Il s’agit de se rendre après quelques heures de marche jusqu’au cimetière d’Oakswoods, la plus grande et la plus célèbre nécropole chicagoise afin de procéder à l’inhumation de William J. Hypperbone.

A peine âgé de cinquante ans, ce milliardaire qui avait bâti sa fortune en spéculant sur les terrains immobiliers, est donc conduit à sa dernière demeure, un mausolée véritable petit palais où même est prévue une salle à manger avec tout ce qu’il faut pour se sustenter, vivres y compris.

Mais le plus curieux réside dans ce fameux testament qui va être lu devant une nombreuse assemblée. Passionné du noble Jeu de l’Oie au sein de son cercle, les Club des Excentriques, il a imaginé que six concurrents désignés au sort participeraient à un immense Jeu de l’Oie organisé selon les règles du dit jeu, les différents Etats composant les Etats-Unis figurant les cases de ce jeu. Et l’Illinois, état dont Chicago est la capitale, représenterait les cases où figure l’Oie. Mais tout est expliqué en détail dans ce roman ludique. Le vainqueur recevant la coquette somme de soixante millions de dollars.

Et c’est ainsi que sortis d’un chapeau, maître Tornbrock, notaire, et George B. Higginbotham, le président du club, révèlent le nom des heureux candidats à cette course déterminée par deux dés, avec six millions de dollars de récompense à la clé pour le vainqueur.

Il s’agit de Max Réal, artiste peintre paysagiste de vingt-cinq ans qui commence à posséder une certaine renommée. Il est célibataire et adore sa mère, sentiment partagé réciproquement. Il se verra accompagné par un jeune noir, Tommy qui rêve d’être son esclave afin de ne plus avoir de problèmes financiers.

Tom Crabbe, boxeur, champion hors normes, puisqu’il peut avaler jusqu’à six repas par jour ce qui ne l’empêche pas de démolir ses adversaires. Mais la tête pensante est son entraîneur, John Milner, qui l’accompagne partout, et est son porte-parole officiel. Un couple figurant la tête et les jambes.

Herman Titbury, quarante-huit ans. Petit banquier et prêteur sur gages marié avec une maritorne, sorte de dragon femelle. Le couple s’entend bien dans l’avarice, ce pourquoi ils n’ont pas eu d’enfant.

Harris T. Kimbale, journaliste, chroniqueur en chef de La Tribune. Trente-sept ans, célibataire, et fort estimé de ses confrères, qui se promet bien de ramener des articles sensationnels.

Lissy Wag, jeune femme de vingt et un ans, est sous-caissière dans un grand magasin. Elle partage son petit appartement avec Jovita Foley, vingt-cinq ans, vendeuse dans le même magasin.

Hodge Urrican, cinquante-deux ans, célibataire, officier de la marine des USA, en retraite depuis six mois et au caractère irascible et son faire-valoir qui se montre encore plus vindicatif que son mentor.

Mais un codicille figure en fin de ce règlement. Un septième candidat est prévu pour participer à ce jeu. Il s’agit d’un inconnu dont le patronyme n’est pas dévoilé. Il s’agit d’un certain XKZ et bien malin serait celui qui pourrait le décrire. Même le notaire affirme ne pas en savoir plus sur ce concurrent inédit.

Seule une femme participe donc à ce jeu grandeur nature, mais il ne s’agit que du simple hasard voulu par l’auteur, et le profil physique et psychologique de ces six candidats est plus détaillé dans le roman donc je en m’attarderai pas plus.

Le départ de ces concurrents s’échelonnera de deux jours en deux jours à partir du 1er mai 1897. C’est Max Réal qui va débuter le parcours. Il a quinze jours pour rallier Fort Riley dans le Kansas et connaître alors quelle sera sa prochaine destination qui lui sera signifiée par télégramme.

Il en sera de même pour les autres candidats qui devront se plier à plusieurs contraintes. Les voyages seront à leur charge, de même que les pénalités éventuelles, puisque certaines cases donnent lieu à paiement de primes, ou de retour en arrière. La date d’arrivée du vainqueur ne peut donc être déterminée et ce parcours peut prendre des semaines, voire des mois.

 

Jules VERNE : Le testament d’un excentrique.

Nous suivons les différents participants lors de leurs différentes pérégrinations hasardeuses. Car tout ne tourne pas comme sur des roulettes, les impondérables s’accumulent. Ainsi tandis que l’un des candidats est malade, l’autre est confronté à des grèves de cheminots, un troisième risque de la prison pour avoir inconsidérément demandé un grog au whisky dans un état qui interdit la consommation d’alcool. Ou alors un participant arrive juste au dernier moment à son lieu de rendez-vous ayant traîné en route pour admirer le paysage et allier l’utile à l’agréable.

Si certains se retrouvent, par le lancer de dés, non loin de leur lieu de départ, l’état qui est désigné jouxtant l’Illinois, d’autres sont obligés de traverser les Etats-Unis d’Est en Ouest, puis à nouveau d’Ouest en Est, ce qui occasionne non seulement des frais mais oblige à un jonglage dans les moyens de transports. Le train, naturellement, le bateau, le fiacre, le cheval et même une triplette, trois vélos en un, vont servir de moyen de transport.

Des cartes du pays sont éditées à des millions d’exemplaires afin que le bon peuple puisse suivre les déplacements des concurrents. Une curiosité naturelle, mais comme il s’agit d’un jeu, les parieurs sont nombreux. Chaque candidat se verra donc affublé d’un dossard fictif, une sorte de petit drapeau qui personnalisera sur les états concernés leur position.

Et, le lecteur s’en doute, l’épilogue se termine un coup de théâtre final, propre au roman populaire, alliant suspense et retournement de situation. Ce roman est le soixante-quatrième publié par Hetzel, d’abord en feuilleton d’abord dans Le Magasin d’éducation et de récréation puis en deux volumes en 1899.

Il ne déroge pas à la ligne de conduite de Jules Verne qui ne se contente pas de mettre en scène des personnages participants à un jeu de hasard, mais il en profite pour alimenter ses jeunes lecteurs de détails géographiques, historiques et économiques en tous genres. Les itinéraires, les villes traversées, le nombre d’habitants et bien d’autres détails qui n’apportent pas grand-chose à l’intrigue mais au contraire la ralentissent.

S’il ne possède pas le souffle épique du Tour du monde en quatre-vingts jours, qui était un pari, réaliser un voyage en un temps déterminé, il faut quand même constater que cette intrigue est un tour de force, l’adaptation d’un jeu de salon en grandeur nature.

Pour les possesseurs de liseuse, ce roman est disponible gratuitement sur le site ci-dessous :

Jules VERNE : Le testament d’un excentrique.

Collection Les intégrales Jules Verne. Editions Hachette. Parution 1979. 474 pages.

Editions Ebooks Libres et Gratuits. 460 pages.

ISBN : 978-2010055935

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