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3 mai 2018 4 03 /05 /mai /2018 11:03

Et le lecteur aussi ?

Franck MORRISSET : Alice qui dormait.

Malgré les progrès constants, et bien que l'on soit en l'an 2148, les erreurs existent toujours, et sont lourdes de conséquences pour celui qui les commet.

Ainsi le docteur Jack Smith, directeur du Centre Cryogénic de Toronto, s'est trompé de patient. Il a réveillé Alice Douglas au lieu de Howard Melvyn. Une bévue due à un petit verre de trop. Il s'est emmêlé les pédales en composant le numéro du patient et le voilà mis à la porte par le tout-puissant Jason Mérédith, son patron.

Faut dire qu'il y a des millions de dollars à la clé, car lorsque Alice Douglas est décédée en 2002, l'acte de Renonciation n'existait pas. Alors elle va réclamer son héritage, augmenté des intérêts. Pas de quoi faire couler la baraque, mais c'est pour le principe.

Jack Smith n'a plus qu'à devenir clochard et suivre les conseils de Georges le philosophe pour assurer sa pitance. Alice est toute contente d'avoir retrouvé la vie, elle qui était morte à 28 ans d'une leucémie. Seulement elle n'est pas confiante en l'avenir.

Aussi elle requiert les services d'une petite agence de détectives composée de Dan Campbell et Spencer Goren. Dan et Spencer se complètent. Lorsque Dan ne peut ou ne veut faire quelque chose, Spencer le réalise à sa place. Commence la bataille en le puissant Goliath et les deux petits David. Avec la belle Alice et quelques autres protagonistes entre eux.

 

L'amalgame entre la SF et le polar n'en est pas à sa première expérience, voir l'article de Jean Claude Alizet dans L'Année du Crime 1984 de Michel Lebrun.

Mais ce mélange, cette interpénétration de deux genres populaires n'est pas forcément le gage d'une réussite.

Malgré de petites longueurs, le roman de Franck Morrisset, au titre inspiré de l'œuvre de Sir Henri Rider Haggard, tient la route grâce à une habile connexion. Le départ démarre en fanfare, avec un certain humour, mais la suite devient assez soporifique jusqu'au dénouement final. Toutefois le "Duo" Campbell/Goren n'est pas inintéressant, au contraire, et c'est avec plaisir que nous les retrouverons dans de nouvelles aventures.

Franck MORRISSET : Alice qui dormait. Coll. Anticipation Polar SF N°1990. Editions Fleuve Noir. Parution septembre 1996. 224 pages.

ISBN : 2-265-05592-1

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20 avril 2018 5 20 /04 /avril /2018 08:16

Pauvre Blaise, qui n’était pas à l’aise…

La Comtesse de SEGUR : Pauvre Blaise.

Il est amusant de relire un roman avec un recul de plus de soixante ans. Nos yeux captent plus de messages disséminés par l’auteur que lorsqu’on découvrait ces petits romans à l’âge de huit dix ans. Et il est frustrant de constater que de nos jours bien de ces romans connaissent une réécriture ou des coupes.

Ainsi ce Pauvre Blaise, qui n’est pas le plus connu de ceux écrits par la Comtesse de Ségur, comporte dans la version que je possède, celle de 1943, 312 pages, et le texte est accompagné d’illustrations d’Horace Castelli, le plus souvent disposés en vignettes dans le corps du texte. Or, en vérifiant sur certains sites, un éditeur, Casterman pour ne pas le nommer, proposait en 2004 cet ouvrage avec 156 pages. Etonnant, non ? Ou, s’il ne s’agit pas d’une version tronquée, ces dernières versions n’incluent plus les illustrations d’origine, ce qui est fort dommage.

 

A la lecture de ce roman, on se rend compte combien les mœurs ont évolué depuis l’écriture de cet ouvrage destiné à Pierre, le petit-fils de la comtesse.

Blaise pense à l’arrivée des nouveaux occupants au château. Il est chagrin car il a perdu son ami, le pauvre petit M. Jacques, le fils des anciens propriétaires. Ceux-ci ont déménagé, ne désirant pas entretenir deux résidences reçues en héritage. Or les nouveaux propriétaires, s’ils se conduisent comme leurs valets arrivés en éclaireurs, risquent d’être à ranger dans la catégorie Mauvais, contrairement aux parents de M. Jacques, pense le gamin.

Ces nouveaux maîtres dont Anfry et sa femme, les parents de Blaise, sont les concierges, sont arrogants, surtout monsieur de Trénille. Quant à leur fils, Jules, c’est une vraie teigne. Menteur, fabulateur, égoïste, fourbe, coupable de bon nombre de bêtises dont il impute la faute à Blaise. Heureusement, Hélène, la sœur de Jules, est nettement plus sage, sensée, conciliante, et elle n’apprécie pas, non seulement les écarts de conduite de son frère, mais surtout ses mensonges. Et elle défend Blaise auprès de ses parents.

Au départ, Blaise ne voulait pas aller jouer avec Jules, s’étant fait rabrouer par les domestiques, imbus de leur position dominante. Mais il a bien dû céder devant les demandes de M. de Trénille puis de son père. Mais à chaque fois, Blaise se trouve le dindon de la farce. Et des stupidités, Blaise est amené à s’en rendre coupable, parfois, par la faute de Jules. Ainsi lorsqu’il lance, au clair de lune, une pierre sur un soi-disant fantôme et que celui-ci se révèle être un chat blanc. Il est vrai que l’animal était posté sur le mur du cimetière, ce qui pouvait induire en erreur. De toute façon, il ne fera plus peur, étant décédé sous le coup de pierre.

M. de Trénille possède des œillères et il ne peut comprendre que son cher fils se rende coupable de quoi que ce soit. Pensez donc, un fils de bonne famille ne peut que porter des valeurs morales édifiantes. Pourtant Blaise sauve la mise à Jules. Par exemple lorsque celui-ci est plongé dans une mare, par sa faute puisque Blaise ne voulait pas qu’il y aille, et qu’il s’y rend quand même à dos d’âne. Une cabriole de la part de l’animal et Jules se retrouve complètement trempé, avec des sangsues accrochées notamment au visage. Blaise dans sa grande bonté l’aide à se changer, lui prêtant ses vêtements secs et enfilant les habits mouillés de Jules. Et rentrant chez lui, Jules prétend que Blaise lui a volé ses effets. Un épisode parmi tant d’autres.

Mais parfois les descriptions de ces scènes sont narrées un peu mièvrement. Il est vrai que les deux gamins n’ont que onze ans et que ce livre s’adresse à des jeunes du même âge. Pourtant on remarquera qu’aujourd’hui, malgré tout le respect que peut émettre un ouvrier envers son patron, celui-ci ne s’adressera pas en ces termes tels que le fait Anfry :

Pardon, Monsieur le comte, vous êtes le maître et je suis le serviteur, et je ne puis répondre comme je le ferai à mon égal, pour justifier mon fils ; mais je puis, sans manquer au respect que je dois à Monsieur le comte, protester que Blaise est innocent des accusations fausses de M. Jules a portées envers lui.

Comme ceci est bien dit. Donc il s’agit bien d’un livre où la morale est présente partout, prônant la vertu, notamment celle du travail. Ainsi lorsque Jules vient chercher Blaise pour s’amuser, celui-ci est en train de défouir un lopin de pommes-de-terre et il refuse de l’accompagner car sa tâche n’est pas terminée.

Mais il dénonce certaines pratiques des nobles et des gros bourgeois envers leurs employés. Ceci n’a guère changé, dans les faits et dans l’esprit. Mais ce qui a changé, ce sont bien les relations enfants-parents, et surtout les occupations des jeunes. Les temps ont évolué, les mœurs aussi, et les occupations des gamins de onze ans ne sont plus d’aider les parents mais de se livrer à des jeux vidéos ou autres.

Mais tout ceci est bien loin et il faut lire ceci avec un petit sourire, même si le respect doit toujours être présent, et nous en manquons souvent.

Dernière petite précision : La Comtesse de Ségur n’hésitait pas parfois à décrire des petites scènes de violence ou de sadisme. Ainsi, alors que Blaise donne des pommes du verger de ses parents à un éléphant, dont le propriétaire fait partie des gens du voyage allant de village en village dans le but de distraire les bonnes gens en faisant exécuter par son animal quelques tours, Jules lui a trouvé un moyen de se distinguer. Possédant une aiguille, il la plante dans la trompe de l’animal qui réagit vivement. Et c’est encore une fois de plus le pauvre Blaise qui encourt les remontrances !

Un roman à mettre dans la malle aux souvenirs, et la nostalgie avec.

La Comtesse de SEGUR : Pauvre Blaise.

La Comtesse de SEGUR : Pauvre Blaise. Illustrations de H. Castelli. Bibliothèque Rose Illustrée. Editions Hachette. Parution avril 1943. 312 pages.

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18 avril 2018 3 18 /04 /avril /2018 07:55

Et ce n’est pas du cinéma…

Christian VILA : X.

Gaël Desmonts, de l’Agence DO, est bien obligé de se rendre à l’évidence. Lui qui ne croyait pas aux OVNI, alors qu’il franchit un col pyrénéen sur sa BM, il aperçoit une lueur. Un énorme objet flotte dans le vide, s’élève doucement dans les airs. Sur le ventre de l’engin est inscrit un symbole, un X.

Le phénomène s’éloigne et Gaël reprend sa route vers la capitale. Un pompiste obligeant lui fait remarquer qu’un véhicule le suit. Arrivé aux portes de Paris, il est arrêté par la gendarmerie. Rien de bien conséquent. Une simple vérification de papiers. Bizarre toutefois que ses papiers, lorsqu’ils lui sont rendus, soient tièdes, comme s’ils avaient été photocopiés.

Au même moment dans le sud Tunisien, Ingrid Altman, tente avec la complicité d’autochtones, d’échapper à un Français, qui se fait passer pour un Allemand. Elle aussi a vu des Ovni, et depuis elle ressent envers ces engins comme une grande bouffée de tendresse, comment dire... d’amour.

Que voulez-vous, les sentiments, ça ne se contrôle pas. C’est pareil pour Gaël qui s’aperçoit qu’entre Sonia et lui, il y a comme un petit quelque chose qui leur remue les tripes, le cœur et le reste. La sœur d’Ingrid requiert les services de Gaël, lequel refuse arguant que ce genre d’enquête ne s’inscrit pas dans les activités normales de l’Agence Do.

Toutefois lorsque Sonia se retrouve dans le coma, à cause d’un chauffard qui a voulu délibérément l’écraser, Gaël prend le taureau par les cornes et remue dans les brancards. Puisque c’est ainsi, il se rend dans le Sud Tunisien, en compagnie du fidèle Mokhtar, et on va voir ce qu’on va voir, barbouzes ou pas.

 

Ce roman, qui aurait dû être édité dans la défunte collection Aventures et Mystères des Editions Fleuve Noir, ne dépare pas cette nouvelle collection S.F. qui s’ouvre un peu à tous les domaines et à tous les genres.

Un livre qui ne manque pas de piquant et qui aurait pu être dédié à Jimmy Guieu, Jacques Pradel et Jean-Claude Bourret.

Christian Vilà nous offre un roman sympathique, qui ne se prend pas au sérieux mais dont l’intrigue est toutefois écrite avec rigueur. Tous ceux qui aime et le roman policier et la science-fiction, à condition qu’elle ne soit pas trop intellectuelle et rébarbative, devraient apprécier ce livre.

 

Christian VILA : X. Collection SF Mystère N°43. Editions Fleuve Noir. Parution juin 1998. 224 pages.

ISBN : 2-265-05906-4  

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8 avril 2018 7 08 /04 /avril /2018 08:16

Hommage à Bertrand Delcour décédé le 8 avril 2014.

Bertrand DELCOUR : Zen.

Depuis quelques mois des transfuges de l'ex URSS sont abattus, à chaque fois d'une façon identique. Un tireur s'amuse à les prendre pour cibles avec son arbalète.

Les responsables du SGN, dont Jeanson, se renseignent auprès de membres de la Mafia russe, qui en échange d'un silence diplomatique sur leurs activités de proxénétisme, fournissent les informations convoitées. Pour eux il ne peut que s'agir de Kaspar Fromm, un Français d'origine allemande qui à la suite d'un dépit amoureux s'est exilé au Japon. Il a appris auprès d'un vieil ermite la théologie zen ainsi que la pratique de l'arbalète.

Jeanson et ses hommes remontent la filière Kaspar d'abord par son père puis par Lizzy, la jeune femme qui autrefois fut sa maîtresse. Depuis Lizzy a refait sa vie. Elle a la possibilité de mener les hommes de la SGN jusqu'à Kaspar mais après avoir mûrement réfléchi elle refuse. En représailles, son chien puis son amant sont éliminés sans état d'âme. Acculée elle accepte de les conduire au tueur mais entre les deux anciens amants l'amour retisse sa toile.

 

Dans ce roman en deux parties, la première étant la recherche du tueur, la seconde décrivant une folle cavale jusqu'en Suisse, Bertrand Delcour nous brosse avec force des personnages non dénués d'intérêt même si parfois ils frôlent la caricature.

Le lecteur se prend de sympathie pour le tueur et sa compagne tandis que les hommes du SGN n'ont que ce qu'ils méritent. Faut avouer que Jeanson, entre autre, ne se montre guère à son avantage en persécutant Lizzy, désirant avec opiniâtreté lui prouver charnellement son amour. La saillie de Jeanson en quelque sorte.

Bertrand Delcour place de ci de là quelques clins d'œil, ainsi les rues Pouy, Sainte Anastase ou de Jarente. Et s'il évoque les éditions Gérard de Pilier, certaines scènes décrites dans ce roman ne sont pas loin de ce que certains reprochaient justement avec véhémence à l'auteur/éditeur de SAS. Il n'en reste pas moins que Zen est un bon roman, à lire au second degré.

 

Bertrand DELCOUR : Zen. Instantanés de Polar N° 38. Editions Baleine. Parution 15 octobre 1996. 238 pages. 9,00€.

ISBN : 2842190378.

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4 avril 2018 3 04 /04 /avril /2018 08:30

L’ancêtre d’un Guide pour les Nuls ?

Robert SOULAT : Mémoire pour servir à l’élévation des médiocres.

Surtout connu pour avoir succédé à Marcel Duhamel à la tête de la Série Noire, de 1977 à 1991, Robert Soulat fut aussi un prosateur, un écriveur comme il se plaisait à se définir, iconoclaste et peut-être dérangeant.

L’écriture s’avère un devoir, un besoin, un but, une passion.

Mais l’autre grande passion, dont l’écriture découle, c’est la femme. La femme qui le porte, l’élève, le soutient, l’inspire. Et en premier lieu, la Mère qui lui inculque l’amour de l’écriture.

Ce pan de la littérature qu’on appelle l’œuvre romanesque, c’est très femme. Ou plutôt, c’est très mère. La manière dont un auteur de romans caresse ses personnages, même lorsqu’il veut en faire des anti-héros, rappelle vivement l’inquiétude et la tendresse des mères.

 

Ironique, caustique, Robert Soulat l’est indéniablement mais tout autant à son sujet, quà sa propre personne, qu’envers des thèmes plus sensibles, ou légers, graves, voire tabou.

Cela va de ce qu’il pense de lui-même et de son cerveau, se propulsant ensuite vers la religion, le rapport de celle-ci avec l’argent, citant Groucho Marx, se plaçant ou plutôt se comparant aux nouveaux riches, ceux de la Rive Droite et ceux de la rive Gauche.

Il manque à mon cerveau des murs de soutènement. Et je me demande parfois comment sa toiture s’y prend pour tenir toute seule. D’où je conclus souvent que cette toiture est une illusion et que mon cerveau est dangereusement exposé aux intempéries.

Plus loin il illustre ses propos ainsi :

Mon cerveau, je le crains, ressemble fort à ces potages où le vermicelle est constitué par des lettres de l’alphabet, et on sait que ce genre d’ouvrage est illisible.

Lucide ou se moquant volontiers de lui en se rabaissant ? Non, une simple constatation d’un intellectuel sachant maîtriser ses capacités littéraires, se livrant sans complaisance, alors que nous-mêmes devrions faire parfois un état des lieux.

Sur la question de l’argent, il se montre volontiers provocateur, tout en étant réaliste.

Les Américains qui ont de l’argent le proclament et s’en vantent, ce qui manque d’élégance. Les Français qui ont de l’argent s’en défendent en public, ce qui est grotesque.

Il oppose l’histoire et la religion, posant des questions fondamentales qui semblent futiles.

Toute l’histoire officielle des Français catholiques – j’entends par là celle qui nous cause des cuisses de Marie-Antoinette et de l’odeur des pieds d’Henri IV – passe pudiquement sur les questions d’argent. L’Eglise romaine aurait, paraît-il, interdit le prêt à intérêt, combine lucrative qu’auraient aussitôt exploitée ces salauds de juifs.

Dans cette dernière phrase, l’on ressent bien ce côté provocateur, Robert Soulat empruntant l’expression de salauds de juifs à la veine populaire, et donc n’est à prendre qu’au second degré. Il montre que la jalousie, en ce qui concerne l’aspect financier, voire mercantile, appose des œillères sur le jugement de bien des personnes qui pourtant se déclarent non-racistes et non antisémites.

Et les Médiocres là-dedans ?

Je ne dissimule pas qu’à force de faire l’éloge des Médiocres, je risque de passer, aux yeux des Purs et des Durs, pour un Conservateur, au mieux, et peut-être même pour un Fasciste.

Ce pourrait être un carnet de réclamation, de pensées divagantes, mais l’auteur suit son idée, celle de se chercher, de se trouver dans un monde où il évolue comme un entomologiste, étudiant ses contemporains, un peu comme La Bruyère l’effectuait lorsqu’il écrivait ses Caractères.

Un mémoire et non des mémoires, parfois, souvent même, amusant, et qui contrairement à ce que l’on pourrait croire est nettement plus profond que toutes les vaticinations de prétendus philosophes autoproclamés.

Mais qui va donc à l’essentiel ? Et qu’est-ce que l’essentiel ? Une station-service ?

Le dérisoire au service de la goguenardise, un entretien avec son lecteur, pour peu que celui-ci daigne le suivre dans le cheminement de ses pensées, des anecdotes délivrées par-ci par là, issues de sa mère, de sa grand-mère, de ses voisins, de ses observations.

 

Robert SOULAT : Mémoire pour servir à l’élévation des médiocres. Editions de l’Atalante. Parution mai 1990. 160 pages.

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28 mars 2018 3 28 /03 /mars /2018 08:43

Là-haut sur la montagne, les deux pieds, les deux mains dans la…

Christian VILA : La montagne de Noé.

Gaël Desmonts, l'un des créateurs et animateurs de l'agence DO, se rend compte, alors qu'il circule en moto dans Paris, qu'il est filé par une voiture.

Il tente de semer ses poursuivants mais ceux-ci l'attendent en bas de chez lui. Un chauffeur de taxi d'origine kurde, qui soi-disant passait là par hasard, l'aide à repousser les assauts de ses agresseurs.

Van Haken, le roi du diamant atteint d'une maladie irréversible, demande à Gaël et à son associée, Sonia Olsen, de retrouver l'Arche de Noé, le navire mythique échoué selon la légende sur le mont Ararat. Ce n'est pas tant l'idée de se mettre à la recherche de l'épave qui séduit Gaël Desmonts mais de s'adjoindre les services d'un spécialiste, un Irakien du nom de Khaled Al-Ba`id, en délicatesse avec le régime de Saddam Hussein et assigné en résidence surveillée.

La priorité est donc de faire passer la frontière à Khaled puis de se lancer à l'aventure.

 

Dans cet ouvrage fort documenté, Christian Vilà amalgame ésotérisme, aventures, archéologie et fantastique. Un mélange de rationnel et d'extraordinaire. La trame, la solidité de l'intrigue, l'aspect mi-scientifique mi-imaginaire de ce roman fait quelque peu penser à ce qu'aurait pu écrire Jules Verne, ce qui n'est pas un mince compliment.

Christian VILA : La montagne de Noé. Collection Aventures et mystères n°11. Editions Fleuve Noir. Parution novembre 1995. 192 pages.

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26 mars 2018 1 26 /03 /mars /2018 08:30

Mais ça, c’était avant. Maintenant Tout le monde il est beau, tout le monde il est gentil !

Charles COLOMBEY : Meurtre au RPR.

Samedi 8 février 1992. Jacques Chirac a convoqué rue de Lille Edouard Balladur, Alain Juppé et Nicolas Sarkozy. Motif : la préparation des législatives en 1993 et tenter de couper l’herbe sous le pied de Valéry Giscard d’Estaing.

Alors qu’il va expliquer à ses amis la tactique à suivre, une voix féminine le mande au téléphone. Il prend la communication dans le bureau voisin. Soudain un cri retentit. Alain Juppé se précipite. C’est pour découvrir le corps inanimé de Jacques Chirac gisant à terre.

Le maire de Paris, mortellement blessé, vient de recevoir un coup de poignard. L’annonce de cet assassinat est une véritable bombe dans les milieux politiques, principalement à droite où les factions se déchirent. Est-ce le crime d’un maniaque, d’un déséquilibré ? Dans ce cas il a été savamment orchestré !

L’impression première ressentie par tous est qu’il s’agit plutôt de l’œuvre d’un jaloux, de Droite ou d’Extrême-droite. De quelqu’un écarté du pouvoir, et qui, non content de se venger, espère reconquérir une parcelle de gloire.

Pierre Joxe, le ministre de l’Intérieur, confie au commissaire Leroy la redoutable, périlleuse et délicate mission de résoudre à bien cette affaire qui provoque pas mal de remous dans les sphères politiciennes.

Charles Pasqua, le principal suspect d’avoir sinon perpétré lui-même du moins d’avoir commandité ce meurtre, charge son ami l’inspecteur Ange Paluzzi d’effectuer une enquête parallèle.

Tout le monde, y compris le président Mitterrand, a encore en tête quelques affaires célèbres non élucidées : Boulin, Fontanet, De Broglie. Un parallèle en filigrane dont se seraient bien passé majorité et opposition.

La résolution de l’enquête ne se joue pas sur un coup de dé mais, comme bien souvent, le hasard et le bon sens font bien les choses.

Les rumeurs et fausses informations, ou plutôt les informations erronées édictées de bonne foi, font florès dans les médias. Les supputations vont bon train.

La solution de cette énigme serait frustrante, aussi bien pour les hommes politiques que pour le lecteur, si l’épilogue n’était pas là pour apporter un joli retournement de situation et permettre de croire à cette fiction fort bien racontée, imaginée et mise en scène.

L’auteur n’est pas toujours très tendre avec la classe politique et principalement avec eux qu’il a eu l’occasion de côtoyer. Charles Colombey est un pseudonyme, cela va de soi, et l’on pourrait toujours essayer de cerner par déduction le personnage irrévérencieux et humoristique qui se cache, qui se dissimule sous ce nom au combien gaullien. Mais cela est-il nécessaire ?

Applaudissons plutôt à cette performance et rions de bon cœur aux réparties qu’il prête à certains hommes politiques.

Ainsi Seguin aurait-il déclaré un jour : Quand nous n’avons rien à dire, nous désignons Balladur comme orateur.

Ou encore Alain Vivien qui aurait surnommé Michèle Barzach la station-service. Pourquoi ? Des pieds à la ceinture, elle est super, de la ceinture au menton elle est ordinaire et au dessus du menton sans plomb.

 

Dans la même collection :

 

Charles COLOMBEY : Meurtre au RPR. Collection Les lieux du crime. Editions Calmann-Lévy. Parution janvier 1991. 252 pages.

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15 mars 2018 4 15 /03 /mars /2018 11:14

Hommage à Fredric Brown décédé le 11 mars 1972.

Fredric BROWN : La vie sexuelle sur Mars

Malgré son titre quelque peu accrocheur, mais qui est la traduction exacte du titre américain, voilà un petit livre (par le format mais non le contenu) qui se révèle à la lecture intéressant et passionnant.

Outre deux nouvelles policières inédites en France, sont inclus dans ce recueil un conte fantastique écrit spécialement par Fredric Brown pour ses enfants en 1930, Les prodigieuses aventures de Tagrid, et les deux premiers chapitres d’une étude consacrée à la science-fiction.

A signaler, qu’au moment de la parution de ce recueil en 1988, Les prodigieuses aventures de Tagrid sont non seulement inédites en France, mais également aux Etats-Unis.

Penchons-nous plus longuement sur les deux premiers chapitres de l’étude concernant la science-fiction et intitulée La vie sexuelle sur Mars. Une étude que Fredric Brown n’a pas menée à son terme puisqu’il n’a pas trouvé preneur pour son manuscrit. Pourtant que d’humour dans ce texte caustique mais aussi dérangeant, vis-à-vis de certains auteurs et éditeurs de S.F.

Tout d’abord il remet les pendules à l’heure et précise quels sont les droits et les devoirs d’un écrivain de S.F. et comment son roman doit être construit. Je cite :

La science-fiction est un fourre-tout. Elle représente la frontière de l’esprit et de l’imagination humaine. Elle est aussi littérature de l’imaginaire qui extrapole sur l’avenir en se basant sur des données scientifiques existantes.

Les petits coups de griffe qu’il assène ça et là ne sont pas dénués de fondement et dénotent une grande pertinence et une vision particulièrement acérée des problèmes scientifiques et politiques de l’humanité. Je précise que ce texte date de 1950.

Prenez par exemple un fusée du 4 juillet (le 4 juillet étant la fête nationale aux Etats-Unis) si vous arrivez à en trouver une, car la plupart des états interdisent la vente de tels feux d’artifice, jugés trop dangereux, pas comme notre jolie bombe A.

Edifiant, non ? Ou encore :

A l’heure où j’écris ces lignes, seuls deux gouvernements de par le monde ont les moyens de réussir dans une si vaste entreprise que le voyage dans l’espace. Et ces deux gouvernements y travaillent principalement, parce que l’autre s’en occupe également.

Autre petite phrase humoristique mais qui est pleine de bon sens :

Tel un historien qui se permettra de vous indiquer catégoriquement la personnalité de Marie-Antoinette ou de Cléopâtre, alors qu’il s’avèrera incapable de connaitre les sentiments qui animent sa femme ou sa maîtresse.

Outre ces petites phrases, Fredric Brown définit avec justesse le rôle de la Science-fiction et du fantastique, ou établit un parallèle amusant entre le Space-opéra et le western.

Dommage que Fredric Brown n’est pu ou voulu continuer cette étude, malgré le refus des éditeurs, car elle aurait sûrement bousculé des à-priori. Une étude qui se lit comme un roman. L’on comprend mieux la démarche littéraire de Fredric Brown, et pourquoi il est en marge dans sa production science-fictionnesque.

Un écrivain terriblement humoristique mais aussi extrêmement sérieux et exigeant dans son métier d’auteur.

 

Sommaire :

 

Stéphane Bourgoin : Introduction, pages 7 à 9.

La Vie sexuelle sur Mars (Sex life on the planet Mars), pages 11 à 59, trad. Stéphane Bourgoin.

Le Cadavre et la chandelle (The Corpse and the Candle / The Mildewed Night), pages 61 à 88, trad. Stéphane Bourgoin.

Une mèche de Satan (A Lock of Satan's Hair / Hair of the Dog), pages 89 à 124, trad. Stéphane Bourgoin.

Les Prodigieuses aventures de Tagrid (How Tagrid Got There), pages 125 à 184, trad. Gérard De Chergé.

 

Fredric BROWN : La vie sexuelle sur Mars (Sex Life on the Planet Mars – Traductions de Stéphane Bourgoin et Gérard de Chergé). Recueil de quatre nouvelles dont 2 inédites aux USA. Collection Série 33 N°16. Editions Clancier-Guenaud. Parution octobre 1988. 192 pages.

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13 mars 2018 2 13 /03 /mars /2018 09:25

Hommage à Daniel Walther, né le 10 mars 1940 et décédé le 3 mars 2018.

Daniel WALTHER : Tigre.

Daniel Walther est bien connu des amateurs de science-fiction. En réalité il fut plus un écrivain de fantastique, de spéculative-fiction, qui écrivait comme s’il voulait exorciser ses propres démons, ses propres fantasmes.

Toute sa production tend à le montrer comme un écrivain torturé. Ses « héros », ses personnages plutôt, car les protagonistes de ses histoires sont plus proches de l’antihéros étymologiquement parlant, ses personnages donc se conduisent en individus traumatisés, perdus dans un univers qui n’est pas le leur, qui ne peut être le leur.

En utilisant parfois une certaine verdeur, une certaine trivialité, une outrance dans l’écriture ou la description scénique, Daniel Walther stigmatise ses personnages, les engluant, les torturant moralement, les culpabilisant.

Tigre n’échappe pas à cette règle. Tigre, c’est le nom du personnage central, qui, tueur et amnésique, ne sort que la nuit afin de perpétrer ses forfaits.

Conduit par une voix intérieure, il ne sait pas pourquoi il tue, mais il s’y sent obligé, et accomplit alors un acte qui selon les circonstances devient un acte de défense ou un acte de rejet.

Rejet de soi et d’une société morcelée en clans, en sectes, avec ses nantis, ses vigiles, ses milices, sa pègre, son gouvernement fantôme, le tout porté à un paroxysme insoutenable.

Sur toute l’œuvre règne le spectre de Lovecraft, lequel a influencé bon nombre d’auteurs talentueux et qui reste un géant et une référence littéraire de la S .F. et du fantastique.

 

(c) Fabienne Rose

(c) Fabienne Rose

Daniel Walther a reçu le Grand Prix de l'Imaginaire :

1976 : Nouvelle / Short story pour Les Soleils noirs d'Arcadie

1980 : Roman pour L'Épouvante

Daniel WALTHER : Tigre. Collection Anticipation N°1605. Editions Fleuve Noir. Parution janvier 1988. 192 pages.

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6 mars 2018 2 06 /03 /mars /2018 09:45

Avant la vache folle, il y eut la roue folle… A chaque époque sa folie.

Anthony BUCKERIDGE : Bennett et la roue folle

Destinés plus aux préadolescents qu’aux enfants, la série Bennnett de l’Anglais Anthony Buckeridge connut vingt-quatre épisodes dont vingt-deux furent traduits en France.

Cette série est résolument placée sous le signe de l’humour, un comique de situation mais également ponctué de quiproquos à cause d’une incompréhension entre les propos des élèves, et particulièrement de Bennett, et des adultes, le plus souvent Monsieur Wilkinson, l’un des professeurs de la Troisième Division du collège de Linbury, près de Dunhambury, deux petites villes imaginaires du Sussex.

Le plus souvent, Bennett et son ami Mortimer, onze ans, sont opposés dans des situations comiques qui risquent de s’envenimer à Wilkinson, dit Wilkie par les élèves, lequel est assez soupe-au-lait et ne comprend pas toujours soit ce que veulent dire les deux enfants, soit ce qu’ils veulent entreprendre ou ont déjà réalisés en toute bonne fois. Les autres professeurs, Carter et madame Smith, prennent les situations avec bonne humeur, déminant les imbroglios, et n’en tiennent aucune rigueur aux gamins qui gaffent, souvent involontairement.

Et chaque chapitre est autant de petites scènes, parfois désopilantes, souvent cocasses, mais dont ne se rendent pas compte les acteurs.

Tout débute lorsque pour son Noël Bennett se voit offrir par sa tante un carnet rouge dans lequel il doit consigner quotidiennement ce qu’il fait de ses journées. La carotte pour tenir régulièrement son journal étant un beau billet de cinq livres à la fin de l’année. Seulement, ce carnet étant confidentiel, Bennett trouve une astuce : écrire à l’envers. Seul Mortimer est dans la confidence de ce code.

Une interrogation d’histoire est prévue avec M. Wilkinson, le peu sympathique professeur et Bennett en est malade. Mentalement et physiquement. Il est soigné par Mrs Smith qui prend sa défense auprès du prof acariâtre et en remerciements Bennett veut lui offrir quelque chose. Mais quoi, telle est la question.

Alors il se rend en compagnie de son ami Mortimer à Dunhambury mais avec seulement cinquante pence en poche, les possibilités sont réduites. D’autant que l’argent file vite, location de vélos pour se rendre à la petite ville, obérant partiellement leur pécule. Mais Mortimer n’a jamais fait de vélo, hormis ceux munis de stabilisateurs. Et comme les vélos sont dans un médiocre état, le parcours est jonché d’incidents.

L’attrait de la fête foraine, l’achat d’un cornet de frites, et le passage au stand de tir est quasiment néfaste au reliquat de leur bourse. Et si par un heureux hasard, Bennett gagne une coupe en verre taillé, celle-ci est brisée lors du retour. Et la roue folle me demanderez-vous, avec pertinence. L’épisode se déroule un peu plus tard. Bon, d’accord, allons-y tout de suite, et ne perdons pas de temps en chemin, malgré les autres scènes drôlatiques qui s’intercalent.

Mais auparavant il me faut signaler que Bennett se verra confisquer son carnet rouge et afin de se plier aux exigences de sa tante, il notera dans un cahier à la couverture verte ses faits et gestes. Une initiative qui lui procurera quelques désagréments en fin de trimestre.

Suite à un os découvert dans les petits jardins alloués aux élèves, Bennett et Mortimer s’intéresse à la paléontologie et l’archéologie, et comme il existe un ancien camp romain non loin du village, ils s’y rendent afin de prospecter et découvrir éventuellement des vestiges romains. Effectivement, en grattant la terre, ils découvrent d’abord une chaîne rouillée, de fort belle longueur et à laquelle est accrochée une vieille roue en bois.

Ils sont persuadés, d’après l’inscription qui est gravée dessus, qu’il s’agit d’une roue détachée d’un vieux char romain. Une découverte inestimable pensent-ils, ne sachant pas que cet objet va les entraîner dans une suite d’épisodes au cours desquels ils auront du mal à rester sereins, les profs aussi d’ailleurs.

Si cette roue occupe une partie de l’histoire, il ne s’agit que d’un épisode et le titre français induit quelque peu en erreur, le titre original devant signifier, si mes notions d’anglais sont encore bonnes, le carnet ou le journal de Jenning, Jenning ayant été transformé en Bennett dans la traduction française.

 

Bennett et Mortimer envisagent de créer un musée d’antiquité d’où la scène suivante :

Extrait :

Comme ils s’élançaient vers l’escalier, ils aperçurent M. Wilkinson qui sortait de la salle des professeurs. Bennett jugea le moment bien choisi pour solliciter sa coopération.

« Pardon, m’sieur ! Nous cherchons des antiquités. Est-ce que nous ne pourrions pas jeter un coup d’œil dans la salle des professeurs pour voir s’il n’y aurait pas quelques vieux fossiles ?

Malheureusement, M. Wilkinson interpréta mal ces mots. Son visage s’empourpra.

« Quoi ? Quoi ? Rugit-il. Des vieux fossiles dans la salle des professeurs ?... Qu’est-ce que c’est que ces allusions impertinentes ? Essayez vous de faire le malin, mon garçon ?

« Pas du tout ! assura Bennett. Je veux parler de trucs pour notre musée, vous comprenez ? Des oiseaux empaillés, par exemple…

Première parution Idéal-Bibliothèque N°263. 2ème trimestre 1964. Illustrations de Jean Reschofsky.

Première parution Idéal-Bibliothèque N°263. 2ème trimestre 1964. Illustrations de Jean Reschofsky.

Si vous désirez en savoir plus sur Anthony Burckridge, sachez que la revue Le Rocambole lui a consacré un numéro double en compagnie d'Enyd Blyton.

Anthony BUCKERIDGE : Bennett et la roue folle (Jennings Diary – 1953. Texte français d’Olivier Séchan). Illustrations de Daniel Billon. Collection Bibliothèque Verte. Parution novembre 1975. 190 pages.

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