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16 octobre 2014 4 16 /10 /octobre /2014 16:39

Tout commence par un long périple maritime quelques six cents ans avant J.C. et vivez-le comme si vous faisiez partie de l'équipage...

Dominique FAGET : Celui qui ne meurt jamais.

600 avant J.C. Une petite flottille de huit trirèmes phéniciennes avec à bord Enmouteff, le frère du pharaon Ouhemibré-Nékao, s'élance d'Arsinoë (Suez) et part à l'aventure en longeant les côtes africaines, descendant peu à peu vers le Cap de Bonaventure puis remontant l'autre versant du continent. Pour Nékao, le pharaon, il s'agit de redonner à l'Egypte son lustre d'antan. Le capitaine à bord, c'est Hannan Baal, Enmouteff, qui veut dire Celui qui ne meurt jamais, n'est qu'un passager chargé d'une mission. Ce qui ne veut pas dire que les deux hommes n'entretiennent pas de relations amicales. Les semaines, les mois s'écoulent au fil de l'eau, bravant vents contraires, orages violents, nouveaux paysages, escales prolongées afin de réapprovisionner les cales en nourritures et eau douce parmi une population hospitalière, le temps également de planter le blé et autres graines puis attendre les récoltes.

Seulement lorsque Enmouteff s'intéresse d'un peu trop près au jeune cuisinier, placé sous la garde son aide, Tatouia l'eunuque, Hannan Baal pique un coup de sang. Bientôt la trirème principale prend l'eau de tous bords, métaphoriquement, et Enmouteff est débarqué livré à un sort qui aurait dû être funeste.

 

En 1976, Alain Leprince, reporter photographe revient s'installer dans la maison familiale près d'Arcachon, entouré d'objets divers et principalement des œuvres africaines transmises en héritage par son père qui longtemps a vécu en Afrique Occidentale Française comme médecin. Cette maison, il ne sait trop s'il va la garder ou la vendre. Trop de souvenirs se rattachent à cet endroit et surtout à cette collection d'objets tels que lances Takouba, poignard Haoussa et autres armes blanches, mais également un masque taillé dans le bois. Et puis cela lui remémore quelques épisodes vécus lorsqu'il était gamin à Bingerville en Côte d'Ivoire. Par exemple lors d'une expédition dans le pays, dans une tribu en compagnie d'autres Européens, il avait assisté à une sorte de représentation de danse et un sorcier portant un masque s'était penché vers lui. Il avait ressenti une peur immense. Un peu plus tard, un indigène a vendu un masque de cérémonie, ce même masque qui trône sur le mur. Et puis, il n'avait pas tout compris, mais un jeune lieutenant et sa mère Suzette se rencontraient souvent, surtout lorsque son père était en déplacement. Un après-midi, alors qu'il n'arrive pas à s'endormir, il s'est infiltré dans la chambre de sa mère et avait vu un conglomérat de corps.

 

Son jeune frère Patrick, avec lequel il ne s'entend guère pénètre dans la villa et s'intéresse à ces objets issus de l'Art Premier. Il aimerait bien se les approprier mais Leprince en colère le renvoie manu militari dans le jardin. Patrick a suivi la même voie professionnelle que leur père, tout comme Malou sa fille installée elle-aussi en Afrique. Leprince est sujet à des absences, et des points de côté dans la poitrine.

Deux policiers lui rendent visite. Une de ses voisines vient d'être sauvagement agressée, et d'autres cadavres vont bientôt s'éparpiller dans la région. Le lieutenant Maurin est accompagné du lieutenant Awa Blanc, une métisse d'origine africaine. Les soupçons pèsent sur Leprince mais les deux policiers se donnent le temps d'enquêter. Seulement entre Awa et Leprince, un courant tellurique s'établit entre eux et l'enquête en pâtit. Les symptômes de mal de tête et d'absences momentanées, des pertes de connaissance de plus en plus fréquentes perturbent Leprince.

Les relations entre Awa et Leprince sont de plus en plus proches et l'enquête de la jeune policière les emmènent en Côte d'Ivoire, à Grand Bassam et au mont Korhogo.

Le mont Korhogo

Le mont Korhogo

Ce roman, fort bien construit, est composé de deux histoires qui s'entrelacent et se déroulent à deux mille cinq cents ans d'écart. La première, le périple de Enmouteff, est à classer dans la catégorie roman d'aventures exotiques et historiques. La seconde relève plus de l'enquête policière basique dont le coupable est rapidement connu du lecteur pour peu qu'il suive attentivement l'action.

Mais les deux héros protagonistes de cette intrique ne sont ni Awa Blanc, ni Alain Leprince, mais bien le masque d'ébène à l'intérieur duquel sont gravés des hiéroglyphes ainsi qu'un poignard particulier composé de trois éléments, ancêtre du couteau suisse. Et tout au long du récit se décline ce mantra relatif à cette arme de jet: Une lame pour trancher. Un poignard pour découper. Un pic pour achever...

Le lecteur ne voit pas le temps passer malgré cette amplitude dans les deux histoires proposées, car tout concourt à captiver son attention. Seul un petit hiatus, que je n'ai pu m'empêcher de relever, concerne l'âge, non pas du capitaine mais d'Alain Leprince. En effet, et à plusieurs reprises, il est présenté comme un quadragénaire. Mais, et point n'est besoin de calculette pour effectuer cette opération, entre 1930, année de l'acquisition du masque et 1976, année durant laquelle sont perpétrés les premiers meurtres qui incitent les policiers à s'intéresser à son cas, quarante-six ans se sont passés. Si l'on ajoute qu'en 1930, le jeune Alain peut avoir entre trois et quatre ans, il serait plus logique de dire que ce reporter-photographe frise la cinquantaine et l'a peut-être même dépassée. Mais ça, c'est mon côté pinailleur.

 

Le coup de cœur des lecteurs du Prix VSD du Polar 2014 a été décerné à ce roman et c'est amplement mérité !

Dominique FAGET : Celui qui ne meurt jamais. Editions Les Nouveaux Auteurs. Parution le 3 juillet 2014. 330 pages. 18,95€.

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15 octobre 2014 3 15 /10 /octobre /2014 06:45

Hommage à Ed McBain né le 15 octobre 1926.

Ed McBAIN : Manhattan blues

Ed McBain, bien connu des amateurs de littérature policière pour sa saga des flics du 87ème et de la mythique Isola, nous propose de découvrir un nouveau personnage et une nouvelle équipe, conçus dans le même esprit que ses précédents héros.

Spécialiste du roman de procédure policière, Ed McBain poussait la conscience professionnelle en fréquentant les commissariats de New-York et en accompagnant les policiers sur le terrain dans leurs différents déplacements. Cette pratique lui a permis de rendre vivante l'atmosphère bien particulière qui règne en ces lieux. D'ailleurs dans certains de ses romans, il se permet de mener plusieurs enquêtes de front. En outre, il possède un art consommé du dialogue, vif et incisif.

A quelques jours de Noël, un homme est abattu dans son restaurant, et l'inspecteur Reardon est chargé de mener l'enquête. Enquête qui ira de rebondissements en rebondissements, et à laquelle sera mêlé un richissime collectionneur de tableaux et deux courtiers en bourse, avec en prime quelques faits divers inhérents à toute grande ville qui se respecte. On suit donc l'inspecteur Reardon dans sa vie professionnelle et privée, et ce flic qui est loin d'être un super héros, un macho, se révèle comme un homme simple avec ses joies, ses peines, ses déceptions, ses coups de gueule.

Ed McBAIN : Manhattan blues

Ed McBAIN : Manhattan blues (Another Part of the City - 1985. Traduction de Jacques Martinache). Presses de la Cité. Première parution Septembre 1987. Réédition J'ai Lu N° 2594. Janvier 1989. 254 pages.

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14 octobre 2014 2 14 /10 /octobre /2014 14:25

Il était seul mais il agissait dans l'ombre comme sept...

André FORTIN : Le crépuscule du mercenaire.

Il suffit qu'un petit grain de sable, le retard d'un train par exemple, s'infiltre dans une journée bien programmée pour que les enchaînements qui s'ensuivent risquent d'être lourds de conséquence.

Le juge Galtier, qui attend son train en gare de Saint-Charles à Marseille afin de perquisitionner chez le comptable d'une boite d'import-export en compagnie de son policier préféré le commissaire Juston, aide une femme à se relever. Elle a été bousculée par un jeune voleur à la tire qui lui a fauché son collier. Comme le train pour Nice en provenance de Paris ne va pas être à quai avant plusieurs dizaines de minutes, Galtier lui propose de prendre une boisson après avoir déposé auprès du commissariat proche et entame une discussion sur ce qui vient de se passer. L'adolescent lui a juste subtilisé un collier, elle a donné un vague signalement en omettant un petit détail, et cela pourrait s'arrêter là sauf qu'une autre personne s'intéresse au petit malfrat.

Ange Simeoni, un vieux truand sur le retour, même si parfois il trempe encore ses mains dans des trucs louches, a repéré le manège du gamin dénommé Stanley. Il propose à Stan d'exercer ses talents en soustrayant une mallette à un conseiller du ministère de l'intérieur. Opération réussie sans aucun problème. Stanley est pris en charge, son forfait accompli, par son commanditaire en scooter. Le vol ayant eu de nombreux témoins, le spolié ne peut que déclarer le vol, une affaire qui atterrit sur le bureau du juge Galtier.

Or l'enquête de Galtier et de Juston concerne un blanchiment d'argent opéré en sous-main par une entreprise et il semblerait bien que les deux affaires soient liées. D'autant que des agents de la DGSE s'invitent dans le bal policier et judiciaire. Ce n'est que l'avis personnel de Galtier, pas celui du procureur, encore moins celui des instances parisiennes. Croyez-vous sincèrement qu'un parti politique tremperait dans une magouille de blanchiment d'argent pour renflouer les caisses ? Après tout ceci n'est qu'une fiction n'est-ce pas, et rien ne peut confirmer l'hypothèse avancée par André Fortin. Quoi que à bien y réfléchir, en creusant bien, mais cela s'est peut-être passé il y a bien longtemps, mais de nos jours la probité des hommes dirigeant des partis politiques n'est pas à mettre en cause. Mais continuons, car l'histoire non seulement n'est pas finie, mais n'est pas encore commencée.

En effet en 1987, soit environ vingt-cinq ans avant que les faits décrits ci-dessus se déroulent, Marc Kervadec est conseiller auprès de présidents africains, du Togo, du Mali, de la Haute-Volta devenue depuis le Burkina-Faso, et autres petits pays évoluant dans le giron de la Françafrique. Ce sont de petits dictateurs, mais leurs pays recèlent tant de richesse, qu'il est bon que quelqu'un les supervise, les aide de conseils avisés, ou favorisent en sous-main leurs adversaires en cas de velléités financières et la diplomatie est toujours présente les menaces à la main. Le commandant Kervadec passe ses vacances à Aix-en-Provence et il fait la connaissance de Margot, une jeune fille évaporée qui ne lui cède qu'au bout de la troisième soirée.

Kervadec, de par sa profession d'agent conseiller occulte, dont le patron le colonel Vilquin agent de la DGSE veille à ce que les objectifs soient réalisés sans encombre, Kervadec rentre en Afrique mais tous les ans il retrouve Margot. Margot qui est toujours disponible, éthérée, acceptant les départs impromptus et les retours inopinés. Ils s'aiment, sans vouloir se l'avouer, et puis la fonction de Kervadec n'autorise pas vraiment les attaches familiales. Et il leur est interdit également de communiquer. Mais un jour Margot n'est pas là à l'attendre, et Kervadec va mettre à profit ses congés pour la retrouver.

 

Le début est assez lent, mais il faut bien que tout se mette en place, que l'intrigue prenne corps. Car André Fortin est méticuleux, préférant accumuler les détails au lieu de laisser des parts d'ombre dans un récit assez alambiqué. Jusqu'au moment où les deux points forts se rejoignent pour offrir un final logique dont le lecteur pressentait une partie et les explications le confortent dans son analyse.

Nous suivons les deux parcours, celui de Kervadec qui à cause d'une bavure va devenir chaotique et l'obligera à changer d'identité, et celui de Galtier et Juston dans leur enquête sur le blanchiment d'argent, en alternance. Ce roman change un peu de la production habituelle de l'auteur, s'ancrant dans une histoire de politique-fiction, tout en gardant le principe de placer ça et là quelques coups de griffes. Ancien juge d'instruction André Fortin connait son sujet, et il ne peut s'empêcher, avec raison, de critiquer quelques façons de procéder qui ne conviennent pas à son éthique. Ainsi le juge Galtier, qui s'exprime à la première personne lorsqu'il prend la parole dans le récit, déclare : Nous touchions là toute l'ambigüité de la police française. Elle dépend de l'exécutif et non du pouvoir judiciaire comme c'est le cas dans d'autres pays démocratiques. Elle est tout entière dévouée au gouvernement. Et c'est bien ce que regrette également une majorité de Français qui se sentent brimés par des policiers alors qu'ils n'ont rien à se reprocher.

Mais André Fortin revient aussi sur le problème du colonialisme en écrivant : C'est un petit pays, pauvre et peu homogène, comme la plupart de ces pays africains découpés à la va-vite par la puissance coloniale. Il ne faut pas s'étonner que de nos jours de nombreuses ethnies s'entredéchirent dans des pays construits de bric et de broc.

 

Voir également l'avis d'Yv sur son blog.

 

André FORTIN : Le crépuscule du mercenaire. Collection Jigal Polar; éditions Jigal. Parution le 15 septembre 2014. 248 pages. 18,50€.

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13 octobre 2014 1 13 /10 /octobre /2014 14:55

Les routiers sont sympa... Il parait !

C. J. BOX : Au bout de la route, l'enfer

Une silhouette dans la nuit épiée de loin par une autre silhouette. Cassandra Dowell, enquêtrice auprès des services du shérif Tubman, du comté de Lewis et Clark dans le Montana surveille les gestes de son coéquipier Cody Hoyt, à la demande de Tubman. Cody est en train de disposer des fausses preuves chez un hommes soupçonné de meurtre. Cassie remet les photos prises à l'insu de Cody à son chef et naturellement le policier est mis à pied, déchu de son grade, viré pour tout dire. Cody, qui a travaillé à Denver et effectué de nombreuses entorses au règlement prend mal son éviction. Cassie a beau lui expliquer qu'elle ne pouvait pas faire autrement, il retombe dans son vice. Ancien alcoolique, sevré depuis deux ans, il se remet à boire.

Le même jour un routier indépendant qui trouve du fret grâce à une centrale se gare sur une aire d'autoroute près de Billings. Il s'est surnommé le Roi Reptile, adepte de la chasse aux couleuvres de parkings; c'est à dire qu'il traque les prostituées qui sollicitent les routiers lors de leurs pauses. En cette fin d'après-midi, il vient d'en repérer une qu'il fait monter dans sa cabine et dont il s'occupe en lui injectant un produit néfaste, tandis que d'autres routiers discutent non loin de lui. Ils palabrent sur des versets de la Bible, ce qui ne le concerne nullement, il a autre chose à penser.

Danielle et Gracie, dont on a pu faire la connaissance dans Piégés dans le Yellowstone, se rendent à Omaha voir leur père. Elles vivent avec leur mère à Denver, et comme le couple s'est séparé, elles profitent de leurs vacances pour aller voir leur géniteur. Les deux adolescentes sont différentes, physiquement et mentalement. Danielle âgée de dix-huit ans, est ravissante, mais un peu trop imbue de sa petite personne, égoïste et tête en l'air. Gracie est tout son contraire, plus réfléchie malgré ses deux ans de moins, moins attrayante aussi physiquement. Danielle conduit sans se préoccuper des voyants allumés, plus occupée à envoyer des messages avec son téléphone portable qu'elle consulte en permanence. Elle a décidé de changer de route et de se rendre à Helena afin de voir Justin, son petit ami, du moins c'est ainsi qu'elle le catalogue, le fils de Cody Hoyt. Justin ne répond pas trop affairé avec ses amis.

Lorsque le Roi Reptile sort du parking, en s'engageant sur la bretelle d'autoroute, il coupe la route à Danielle qui s'énerve, appuie sur le champignon et le dépasse en montrant par la vitre abaissée un poing rageur. S'engage alors une course poursuite et Danielle pense pouvoir semer le routier à la faveur d'une déviation. Hélas, Roi Reptile en fait de même et les voici approchant du Parc de Yellowstone de sinistre mémoire. Gracie a beau vitupérer, mettre en garde sa sœur qu'un voyant signale une panne proche rien n'y fait. Et pour ajouter aux emmerdements qui se précisent, il n'y a pas de réseau.

Justin, qui n'a plus de nouvelles de Danielle et tente de la joindre en vain, en informe son père qui lui-même en fait part à Cassie. La jeune femme veut se racheter de sa faute et de sa trahison envers son ancien coéquipier et elle prend cette affaire de disparition à cœur. Car pour elle, aucun doute subsiste, il s'agit bien de disparition. Cody se lance donc sur les traces de Danielle et Gracie en pensant aller au devant d'elles. Toutes les suppositions sont envisagées, mais Cassie s'inquiète véritablement lorsqu'elle perd le contact avec son ex-partenaire. Elle demande au shérif Tubman de l'aider, ainsi qu'à des policiers de la route, mais théoriquement aucune recherche ne peut être lancée, les policiers et le shérif estimant le temps écoulé pas assez conséquent. De plus le shérif Tubman est trop remonté envers son ancien adjoint pour l'émouvoir. Pourtant Cassie s'est rendue compte que des disparitions de prostituées ont déjà été enregistrées sur le parcours emprunté par les deux sœurs, et qu'il pourrait y avoir corrélation quoiqu'aucun corps n'ait jamais été retrouvé.

 

C. J. Box narre avec virtuosité une course poursuite haletante, ponctuée des différents épisodes de cette chasse. Cody puis Cassie se heurtent à des murs. Ils naviguent à vue et il faut que véritablement des événements précis et fiables alertent les policiers, pour que des moyens de recherche soient mis en œuvre. Le temps de réaction peut être préjudiciable mais il faut s'en tenir à la réglementation.

Tour à tour on est sur les traces du Roi Reptile, de Cody Hoyt et de Cassie, jusqu'au moment où leurs routes se rejoignent et les collisions s'avèrent dommageables pour les différents acteurs de ce roman qui donne la chair de poule. Entre horreur, scènes que je me garderai bien de décrire, et humour, notamment les accrochages verbaux entre les deux sœurs, on assiste à un périple qui se déroule en à peine trois journées. Mais quelles journées, intenses, angoissantes, effrayantes même. Des pérégrinations à couper le souffle, avec certains personnages dont on a pu faire la connaissance dans Piégés dans le Yellowstone.

Peut-être les retrouverons-nous en partie dans le prochain roman de C.J. Box, car même si cette histoire est terminée, une porte reste ouverte pour de nouvelles aventures.

 

C. J. BOX : Au bout de la route, l'enfer (The Highway - 2013. Traduction de Freddy Michalski). Collection Seuil Policiers. Editions du Seuil. Parution le 4 septembre 2014. 432 pages. 22,50€.

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12 octobre 2014 7 12 /10 /octobre /2014 12:57

Ah les voyages scolaires aux vertus pédagogiques !

Caroline TRIAUREAU : Agatha Doyle au service de sa Majesté.

Le voyage vers Londres débute mal pour Agatha Doyle, perdue parmi les vingt-quatre autres élèves de son collège Maurice Leblanc d'Ecquetot-les-Baons, placés sous la férule de Miss Marple. Ses oreilles sont victimes d'un bouchon désagréable et persistant malgré le mâchouillement d'un chewing-gum obligeamment offert par son ami Hercule. Hercule est fort en friandises et il ne se déplace jamais sans quelques sucreries, d'ailleurs il en a fait une provision conséquente, entretenant des idées reçues sur l'art culinaire britannique. A côté d'Agatha, se tient sagement Sherlock qui triture lui aussi sa pâte à mâcher, se prenant pour un Gustave Eiffel spécialiste en constructions caoutchouteuses. Si Sherlock est le sportif de la bande spécialiste du déguisement, Hercule le gentil Bibendum prompt à aider ses amis, Agatha, longue ficelle blonde aux joues tachées de rousseur, c'est la délurée d'humeur inventive dont la principale activité scolaire est d'amuser ses comparses dans la cour de récréation.

Arrivée en gare de Saint-Pancras, elle ne trouve rien d'autre que de laisser échapper son appareil photo qui est lamentablement écrasé sous les talons de gamins encouragés vers la sortie par la terrible Miss Marple. Cahin-caha en traînant sa valise à roulettes à qui justement il en manque une de roulette, elle suit le petit groupe jusqu'à l'hôtel qui leur est dévolu. Deux par chambre, c'est le régime imposé. Sherlock et Hercule hérite du premier étage, tandis qu'Agatha est propulsée au cinquième en compagnie de Camille, son contraire, adolescente timide et calme.

Munis d'un panier-repas et d'une étiquette précisant que son porteur est Français, perdu et prière d'appeler le... les collégiens se dirigent allègrement en bus rouge à impériale (normal pour un empire britannique) vers une promenade pédagogique. Agatha est plus intéressée à reluquer par dessus la balustrade du toit les voitures qui passent près du bus et surtout leurs occupants. Son seul souhait est d'apercevoir William et Kate. Surtout William et s'il pouvait l'apercevoir elle, sûr qu'il tomberait amoureux immédiatement de la petite frenchie.

Enfin la compagnie arrive à Saint-James's Park, mais les tartines de pain au beurre de cacahouètes n'enchantent guère le palais de notre trio. Et Agatha décide de nourrir les écureuils, comme s'ils n'avaient attendu qu'elle pour manger. Et c'est en s'enfonçant tête en l'air dans un fourré qu'elle se trouve catapultée par un olibrius en lequel Hercule, très au fait des membres de la famille royale, reconnait James Cavendish, un petit-neveu de la reine. Malheureusement ce n'est pas William !

Le lendemain, visite de Westminster et une fois de plus Agatha la turbulente se fait morigéner par Miss Marple. Elle est renvoyée du groupe pour une futilité mais elle se trompe de chemin et se perd jusque dans une pièce inconnue. Et ce sont les débuts d'une nouvelle turbulence qui va déboucher sur une aventure incroyable mais vraie. Si ce n'était pas réellement arrivé, pourquoi l'auteure aurait si bien décrit ces péripéties ? Sachez toutefois que le déclenchement d'une alarme lui vrille les oreilles, que Sherlock et Hercule partis à sa recherche vont découvrir par pur hasard un tunnel, non pas sous la Manche mais reliant l'Abbaye à Buckingham, qu'un précieux document, le Traité d'Indépendance de l'Irlande dit aussi Traité de Paix, vient d'être dérobé et qu'Agatha va pouvoir enfin approcher de près William, Duc de Cambridge.

 

Si le clin d'œil à Agatha Christie et à Conan Doyle est évident un autre est adressé à une romancière qui a ravi des millions et des générations de lecteurs : En droite ligne d'un roman d'Enid Blyton, style le club des cinq sans le chien Dagobert, mais en plus impertinent, Caroline Triaureau nous emmène à Londres et sous des dehors farfelus traite d'une sujet grave aussi bien pour les Britanniques que pour les Irlandais. Et le vol d'un document pourrait raviver les braises d'un incendie qui n'a jamais été totalement circonscrit. Pour les nombreux lecteurs qui ne connaissent pas Londres comme leur poche et l'intérieur des bâtiments royaux, une carte de Londres est mise gracieusement à leur disposition ainsi qu'un plan partiel de Westminster.

La reine prit place sur le trône, accompagnée du roi George VI. Je veux bien que ce roman amusant joue parfois sur l'absurde, tout en se montrant pédagogique dans l'histoire des monuments, mais quand même. George VI, père de l'actuelle Reine Elizabeth, ne peut être présent à ses côtés puisqu'il est décédé le 6 février 1952. De plus, Agatha ne peut s'empêcher de proférer un juron trivial à double sens phonétiquement. En effet lorsque quelque chose ne va pas, qu'un incident se produit, qu'une bagatelle cloche dans son environnement, elle s'exclame : my God de merde... Je me demande bien ce que vient faire là-dedans un objet sexuel dans la bouche de cette adolescente !

 

Un roman qui a également fait l'objet d'une chronique sur Action Suspense.

 

Caroline TRIAUREAU : Agatha Doyle au service de sa Majesté. Editions Naïve. Album Jeunesse. Parution le 25 septembre 2014. 192 Pages. 12,00€.

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11 octobre 2014 6 11 /10 /octobre /2014 15:21

Pas pire que vivre dans l'ombre ?

Gilbert GALLERNE : La mort au soleil.

Entre Jacques, la quarantaine burinée par le soleil du désert et Sonia, vingt cinq printemps et journaliste, c’est la passion réfléchie. Ils s’aiment, se voient à l’occasion de leurs déplacements, mais il n’est pas question pour eux de parler mariage. Alliant travail et plaisir, ils se sont installés pour un mois à Saint-Tropez.

Les vacances pour Jacques, les interviews de célébrités pour Sonia. Au cours d’une des nombreuses fêtes qu’ils écument, Sonia retrouve Hélène et Paul, des jumeaux qu’elle a connu au lycée. Entre Jacques et Hélène, c’est le coup de foudre malgré la cocaïnomanie de la jeune femme et sa réticence à envisager toute relation durable.

Elle est persuadée attirer le malheur sur ceux qu’elle aime. Ses deux précédents fiancés sont décédés accidentellement ainsi que son premier petit ami. Jacques va bientôt l’apprendre à ses dépens mais il ne veut croire à la fatalité. D’autant qu’il a maille à partir avec un caïd de la région dont il a perturbé un spectacle de combat extrême au cours duquel les paris échangés entre les mondains en vacances sont plus conséquents et qui provoque un frisson plus excitant que les soirées au casino.

Les incidents se multiplient et une mystérieuse dame blanche sème la mort dans la capitale du plaisir et de la fête.

 

Après avoir œuvré longtemps dans le domaine du fantastique et de la science fiction, Gilbert Gallerne, alias Gilles Bergal, se tourne vers le thriller en utilisant un thème maintes fois éprouvé mais le lecteur se pique malgré lui au jeu. L’amour, la mort, la jalousie, la passion sont au rendez-vous de ce roman dont la signature aurait pu être celle d’un écrivain américain.

Mais également on retrouve un peu la rigueur et l’atmosphère des romans écrits par Jean-Pierre Ferrière ou Maurice Périsset. Le classicisme ne meurt jamais et revient parfois en force au moment ou l’on ne s’y attend plus, un peu comme l’engouement pour les histoires de chambre close.

 

Gilbert GALLERNE : La mort au soleil. (Première édition Flammarion, Mai 2000). Réédition Objectif Noir. Parution 28 septembre 2014. 324 pages. 19,99€. Existe en version Kindle pour, 4,97€.

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10 octobre 2014 5 10 /10 /octobre /2014 08:04

Un titre qui rafraîchit...

Pascale DIETRICH : Le congélateur.

Quatre nouvelles, quatre histoires, quatre faits-divers en apparence inoffensifs et anodins, pouvant arriver à chacun de nous et plus particulièrement aux femmes. Et pourtant qui sortent de l'ordinaire. Et si j'écris particulièrement aux femmes, c'est bien parce que celles-ci sont les héroïnes volontaires ou non de ces petits textes.

Dans Vends Peugeot 306, une jeune femme, mariée et mère d'un petit garçon, passe une annonce afin de vendre sa voiture. Elle nettoie soigneusement son véhicule et lorsque l'acheteur potentiel se présente elle lui demande de l'emmener en empruntant un trajet qu'elle a l'habitude d'effectuer en compagnie de son mari et son gamin. Elle a tout prévu, un brumisateur et surtout une thermos de café qu'elle partage avec le conducteur. Une situation banale mais qui comporte une faille, faille qui conditionne les actes de chacun des protagonistes des autres historiettes qui suivent.

Le congélateur, nouvelle éponyme du recueil, est une légère incursion dans le domaine du fantastique, et qui vous incitera peut-être à vérifier s'il n'y a pas d'intrus dans votre bac réfrigérant. Madame Vidal apprécie travailler seule dans son bureau aussi lorsque son patron lui apprend qu'elle va cohabiter avec un collègue, cela ne l'enchante guère. Sa meilleure amie lui conseille une petite recette facile à mettre en œuvre et qui serait efficace : Il suffit de prendre en photo la personne à l'origine de tes tourments et de mettre la photographie au congélateur: la personne en question sera aussitôt neutralisée. Pourquoi pas ? Et elle met en pratique ce conseil qui s'avère judicieux. Elle ne se contente pas de disposer des clichés dans sa glacière personnelle mais en disperse une flopée d'autres dans des magasins de surgelés. Une astuce refroidissante !

Cette nouvelle a bénéficié d'une publication dans le recueil collectif Tu dis ça parce que tu m'aimes en 2006 aux éditions Monsieur Toussaint Louverture.

Pratiquement toutes les familles ont eu à résoudre le problème soulevé dans Jean-Pierre. Un couple, dont la femme est enceinte, cherche le prénom de leur futur enfant or le père de Matthieu vient à décéder. C'est décidé, l'enfant à naître s'appellera Jean-Pierre, prénom du défunt. Mais la future parturiente primipare trouve ce prénom vieillot. Bien sûr dans son entourage elle en connait des Jean-Pierre, mais aucun gamin. Que faire dans ce cas ? Il y aurait bien une solution, suffit de la mettre en pratique. Dans une nouvelle la chute est importante, or dans Jean-Pierre elle manque de punch. J'attendais autre chose, un retournement de situation, un dénouement plus machiavélique, mais c'est l'auteur qui choisit, pas le lecteur.

Enfin, ultime histoire, Maman !!! Un cri du cœur lancé par le seul narrateur masculin du recueil. A quarante ans, Murat vit toujours chez sa mère. C'est le bichon à sa maman, mais il sait bien qu'elle n'est pas éternelle. Alors quand il apprend qu'un procédé vient d'être expérimenté par le professeur John C., savant de réputation internationale qui est la tête pensante du Mouvement pour la Congélation et l'Eternité, sa décision est prise. Mais c'est Maman qui s'occupait de tout, aussi bien de son linge sale que des factures à régler. Et quand on oublie de payer sa facture d'électricité, la sanction arrive rapidement !

 

Dans ces quatre nouvelles, c'est la femme qui est au premier plan, même si on ne s'en aperçoit pas tout de suite. La célibataire égoïste qu'il ne faut pas déranger dans Le Congélateur, la mère de famille qui vit dans son monde dans Vends Peugeot 306, la mère castratrice dans Maman !!! ou encore la mère qui ne veut pas d'un prénom qu'elle juge ringard pour son enfant à naître dans Jean-Pierre.

 

Un recueil que dissèque Claude Le Nocher sur Action Suspense.

 

Pascale DIETRICH : Le congélateur. Collection Polaroïd. Editions IN8. Parution le 3 octobre 2014. 80 pages. 12,00€.

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9 octobre 2014 4 09 /10 /octobre /2014 06:48

Bonjour monsieur le professeur...

Marie NEUSER : Je tue les enfants français dans les jardins.

Souvenez-vous, à l'appel dans la cour, les élèves se rangeaient deux par deux et interdiction de parler dans les rangs. Pour s'exprimer en classe, il fallait d'abord lever le doigt. De nos jours la configuration a bien changé. Les collégiens se conduisent comme des électrons libres et l'enseignant a bien du mal à se faire entendre et imposer une certaine discipline.

Jeune professeur d'italien, Lisa peine à se faire respecter dans sa classe de troisième. Seule Samira lui offre des petites satisfactions, le plaisir de corriger ses copies, auxquelles elle met invariablement un 20/20, des notes méritées. Samira est arrivée en France elle avait quinze ans, aujourd'hui elle en a dix-huit et a assimilé la langue française en bûchant car elle n'en possédait aucune bribe lors de son entrée à l'école. Samira travaille, quand elle peut, car dans sa famille elle doit s'acquitter des tâches ménagères en esclave moderne.

Samira est la seule à ne pas participer au chahut général qui règne dans la classe, mise à l'index par les perturbateurs. Malik, Andrami, Marel, Noumein... Les trublions qui ne se contentent pas d'être les agitateurs patentés, mais se comportent en véritables provocateurs, et même en petits dictateurs en puissance. Par exemple Malik ou Andrami qui font la loi chez eux, n'ayant pas peur de tabasser leurs génitrices.

Aussi Lisa se rend à son établissement presque à reculons, angoissée par ce qui l'attend. Pierre, son mari est au calme dans la librairie où il travaille, et s'il sait les vexations, les affronts, les humiliations que Lisa subit, il n'y peut pas grand chose.

Ce matin là, lorsqu'elle arrive sur le perron du collège, le CPE attend Lisa de pied ferme. L'agent de service s'est plaint : quelqu'un a uriné dans la poubelle. Lisa n'entend pas se laisser faire et le CPE est obligé de tenter de découvrir le coupable lui-même. Tâche trop ardue et il consigne la classe. Le lendemain Lisa est la risée de Malik and Co via un dessin pornographique.

Ses collègues sont à même enseigne. Certaines ont beau afficher un tempérament de dresseurs de monstres, il ne s'agit que d'une façade d'orgueil. D'autres ont passé l'âge d'être importunées, pas comme Lisa. La rançon de la joliesse.

Mais les filles ne valent guère mieux que leurs condisciples masculins. Elles affichent avec fierté leur poitrine, se prennent pour des top-modèles et goutent déjà aux jeux des grandes personnes, sans culotte et sans honte, entre deux voitures avec des hommes qui pourraient être leurs pères. L'apprentissage de la vie non décrit dans les manuels scolaires. Et que ne ferait-on pas pour s'acheter des fringues de marque, des gamines devenues femmes-sandwich.

Racket, inceste, brutalités, sans oublier les suicides pour se soustraire à des mariages forcés. Elle est pas belle la vie ?

Ceci n'est qu'un roman, mais on ne peut s'empêcher de penser que tout n'est pas sorti de l'imagination de l'auteur et qu'elle a vu, connu, entendu la plupart des protagonistes, des incidents, des épisodes décrits dans ce livre. Des anecdotes qu'elle a grappillé ici et là, en leur donnant une forme romanesque. D'ailleurs, la traditionnelle petite mise en garde selon toute ressemblance avec des personnes ou faits réels seraient purement fortuite... n'apparait pas en prolégomènes.

Un roman dur, âpre, poignant et qui bouleverse. Le petit monde de l'éducation est malmené dans tous les sens mais ce n'est pas la première fois que ce sujet est traité. J'ai retrouvé cette ambiance sur le thème de la violence entre adolescents et professeurs, peut-être pas de façon aussi paroxystique, qui était déjà abordée et décrite dans Graine de violence (Blackboard Jungle) signé Evan Hunter, plus connu en France sous l'alias d'Ed McBain, un roman adapté au cinéma par Richard Brooks en 1955.

Plus proche de nous Corinne Bouchard préfère parler des problèmes éducatifs avec un humour incisif et caustique dans La vie des charançons est assez monotone puis La vie des charançons deviendra poétique.

 

Quant au titre il renvoie à un fait divers relaté par le Petit Journal du 29 avril 1906.

 

De Marie Neuser lire également le très beau roman Un petit jouet mécanique paru en 2012 aux éditions de L'Ecailler.

 

Une chronique à lire également sur Action Suspense de Claude Le Nocher.

 

Marie NEUSER : Je tue les enfants français dans les jardins. Editions Pocket N° 15545 (réédition de l'Ecailler - 2011). Parution le 11 septembre 2014. 160 pages. 5,30€.

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8 octobre 2014 3 08 /10 /octobre /2014 12:45

Encore une histoire de vers...

Corinne BOUCHARD : La vie des charançons deviendra poétique.

Chaque ministre, quel qu'il soit et dans quel domaine que ce soit, cherche à marquer de son empreinte le ministère où il exerce, ne serait-ce qu'un laps de temps réduit.

Et il semble bien que l'Education Nationale reste l'un des ministères les plus convoités, l'un de ceux où l'on rencontre également le plus de chamboulement et ce la plupart du temps au détriment des élèves.

Alors que la concertation devient le mot clé de toute négociation, de toute envie de changement, les scolaires mais aussi ceux qui sont chargés de leur dispenser leur savoir, sont ballottés au gré de réformes uniquement compréhensibles par ceux qui les rédigent et qui balayent avec un entrain non dissimulé et revanchard les dispositions prises par leurs prédécesseurs.

Pauvre Jules Ferry, ou plutôt son fantôme, qui s'interroge sur la qualité de l'instruction délivrée au peuple ! Lui qui prônait la clarté, la simplicité, du jugement, de la réflexion, de l'ordre et de la justesse dans la pensée et le langage, soupçonne que ces préceptes sont depuis longtemps perdus de vue et que règne un jargon abstrus, abscons et mystérieux, un code réservé à un service secret de l'enseignement.

Il mène son enquête dans un petit lycée représentatif de l'ambiance et de l'état d'esprit qui règnent au sein des établissements scolaires. Quasi désespéré, il retrouve le moral grâce au bon sens d'un professeur qui a compris que les ordinateurs ne remplaceront jamais l'intelligence, voire le bon sens de l'être humain.

Corinne Bouchard avec humour, acidité, causticité, virtuosité, met les pieds dans le plat avant que la soupe mitonnée par des théoriciens et des technocrates de l'enseignement ne soit par trop indigeste. Des pondeurs de concepts pédagogiques qui ont oublié que les niais aiment et admirent surtout ce qu'il y a de caché sous des termes ambigus.

Pourquoi faire simple quand on peut compliquer à plaisir l'existence d'autrui ?

Cette chronique date de novembre 1994 et n'a rien perdu de son actualité. Encore un ouvrage qui a été probablement mis à l'index de l'Education Nationale comme jugé par trop pernicieux ou trop révélateur de l'incapacité des différents ministres qui se sont succédés à ce ministère, trop occupés à se faire un nom via une réforme qui de toute façon sera abrogée par son successeur. Ils pensent, malgré toutes leurs vertueuses déclarations, à se mettre en avant plutôt que d'œuvrer à la réussite des gamins dont ils ont la charge par procuration.

Voir également : La vie des charançons est assez monotone.

 

Corinne BOUCHARD : La vie des charançons deviendra poétique. Calmann-Lévy. Parution Aout 1994. 170 pages.

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8 octobre 2014 3 08 /10 /octobre /2014 09:42

La maîtresse des colles ou la maîtresse décolle ?

Corinne BOUCHARD : La vie des charançons est assez monotone.

Alors que les portes des écoles, collèges et lycées ont rouvert leurs portes depuis un mois environ, et ce après deux longs mois de vacances au cours desquels nos chers bambins se sont efforcés d'oublier tout ce qu'ils ont appris durant l'année précédente, Corinne Bouchard, jeune et jolie enseignante, nous livre avec humour ses réflexions, ses analyses, ses expériences du système scolaire.

Comment peut-on inculquer à quelqu'un une matière qu'il n'a pas envie d'apprendre? Et quand je dis matière... Bien sûr, si notre petit ange échoue à ses examens au mois de juin, c'est parce que les profs auront été trop durs avec lui, ou trop tendres, parce qu'ils n'ont pas la vocation, parce qu'ils manquent de pédagogie, parce qu'ils ne les auront pas assez motivés, parce qu'ils sont trop vieux et dépassés par les événements, ou trop jeunes, donc manquant d'expérience. Enfin, toutes sortes de motifs pour refuser de reconnaître que celui, ou celle, issu de notre chair, s'est prélassé sur les bancs au lieu d'engranger la bonne parole.

Corinne Bouchard démythifie avec humour, acidité, causticité, gravité, et peut-être un peu de désabusement le rôle du professeur à l'aide d'anecdotes. Il ne faut pas croire que l'élève ou celui qui est chargé de lui enseigner la littérature, le français, les maths, les sciences ou l'histoire-géo ne sont que des jean-foutre. Le système éducatif lui aussi révèle quelques carences, quelques aberrations qu'il était bon de dénoncer.

Et Corinne Bouchard, j'insiste là-dessus, nous le démontre avec humour. Un live-constat qui exclut toute aridité prouvant à l'aide d'exemples concrets, avec verve, que si tout ne va pas pour le mieux dans le meilleur des mondes, c'est la faute à personne, ou à tout le monde.

Un récit qui invite à réfléchir, à se pencher sur ce quoi dépend l'avenir de nos enfants en nous proposant les deux faces 'un miroir légèrement terni par un archaïsme ou une évolution édictée en dépit du bon sens.

Corinne Bouchard, alias Marie du couple Marie et Joseph qui écrivirent quelques bons romans parue à la Série Noire, chez Calmann-Lévy dont le très beau Mississipi Delta Blues, ou pour les enfants chez Syros dans la collection Souris Noire, Corinne Bouchard que j'ai rencontré à plusieurs reprises au Mans lors des 24 heures du livre à la fin des années 80 début 90, fait œuvre pie. En espérant que ce roman, essai, pamphlet sera lu entre les lignes et qu'il profitera à tous car s'il n'y a pas de remèdes miracles existent heureusement les panacées bienfaisantes.

Cette chronique rédigée fin 1992 n'a pas dû franchir les bureaux feutrés de l'Education Nationale, car aujourd'hui il est toujours d'actualité comme nous le verrons bientôt avec la réédition du roman de Marie Neuser : Je tue les enfants français dans les jardins...

 

Corinne BOUCHARD : La vie des charançons est assez monotone. Calmann-Lévy. Parution Aout 1992. 178 pages.

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  • : Lectures de l'Oncle Paul
  • : Bienvenue dans la petite revue de la littérature populaire d'avant-hier et d'hier. Chroniques de livres, portraits et entretiens, descriptions de personnages et de collections, de quoi ravir tout amateur curieux de cette forme littéraire parfois délaissée, à tort. Ce tableau a été réalisé par mon ami Roland Sadaune, artiste peintre, romancier, nouvelliste et cinéphile averti. Un grand merci à lui !
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