Overblog
Editer l'article Suivre ce blog Administration + Créer mon blog
3 mars 2016 4 03 /03 /mars /2016 15:13

Ah les fraises et les framboises...

Jacques BABLON : Rouge écarlate.

http://leslecturesdelonclepaul.over-blog.com/2015/02/jacques-bablon-trait-bleu.html

Mais les framboises sont absentes et les fraises mortifères.

Tout a commencé par la mort d'un chien écrasé par inadvertance. Marcus Gulbis ne l'avait pas vue cette pauvre bête. Pas entendue non plus à cause de la radio. Et puis qu'est-ce qu'elle faisait derrière sa voiture ?

Des relations de voisinage qui se sont refroidies, comme le chien, d'un seul coup. Mais Joseph Salkov ne pouvait pas en vouloir à Rosy, la rondelette femme de Marcus, et encore moins à Angelo, leur fils qui vient chercher parfois son ballon dans son jardin. Les relations entre Joseph et Rosy se sont distendues aussi, pas à cause du chien, non, mais parce qu'elle s'était enveloppée davantage, qu'elle avait été enceinte, et puis la routine.

A moins que tout a débuté par une fraise dégustée par Salma, accorte trentenaire, alors qu'elle se défoule comme souvent en courant sur le bord d'une petite route, un aller et retour chronométré. Des femmes dans un champs, des plantes à ras du sol, un homme qui lui tend un sac comme s'il était son ravitailleur. Elle ne pensait pas s'arrêter, tant pis elle fait demi-tour, pioche dans le pochon, goûte une fraise juteuse, puis deux, puis tout s'enchaîne.

Les femmes ne parlent pas, tout juste un sourire mitigé. L'homme l'invite à prendre un verre, lui fait découvrir la musique classique, plus particulièrement La Callas, lui propose de dormir ensuite dans une chambre d'ami. Bien gentil le monsieur qui veut même lui offrir une séance hygiénique, qu'elle refuse en lui en lui fracassant une lampe de chevet sur la tête. Elle tente de se réfugier mais l'homme la poursuit, tout le monde dégringole, il la frappe, elle se rattrape à une herse, celle-ci prise de mouvements plante ses dents dans la cuisse de l'individu qui aurait mieux fait de rester à compter ses fraises. Puis elle rentre chez elle, une odeur de fraise plein les narines. Mais elle est amochée et un plâtre est nécessaire, son nez ayant dégusté dans la prise de bec.

Marcus Gulbis n'est pas vraiment ce qu'il prétend être. Son métier de comptable, c'est une couverture, en réalité il traficote avec des Coréens, du Nord ou du Sud, on ne sait pas, pas de ségrégation dans les affaires louches. Et il a une maîtresse, c'est bon pour le standing. Seulement les commanditaires de Marcus ne sont pas des pieds-tendres, il ne se doute pas encore qu'on va lui offrir une dégustation de pruneaux.

Joseph ne soufre vraiment plus son voisin, ni sa voisine, et pourtant lorsque Rosy lui envoie un message lui suggérant de venir réparer le tuyau de gaz bouffé par les rats, il comprend tout de suite qu'elle a besoin de lui pour une petit épanchement. Hélas, il a beau essayer, son tuyau de gaz reste ramolli et il ne peut contenter Rosy qui pourtant en avait bien envie.

Salma ne reste pas les mains dans les poches. Invitée à une soirée de copines d'école, elle se retrouve ensuquée, ramenée chez elle par le mari d'une des femmes. Stefan, joli prénom Stefan, mais gentil le garçon qui l'aidera quand les affaires commenceront vraiment à aller très mal.

Le drame éclate. D'abord c'est l'élimination directe de Marcus et de Rosy. Angelo ne doit sa survie qu'à sa présence d'esprit, c'est à dire tomber opportunément dans les pommes. Joseph découvre le carnage, prend peur, oublie qu'il avait quelque chose à cuire dans le four, part précipitamment, le feu se déclare chez lui, la catastrophe. Et Salma dans tout ça ? Elle est en butte avec les séides de son violeur d'un soir, va toutefois lier connaissance et même entretenir une espérance d'amitié avec une des cueilleuses de fraise, une étrangère bien évidemment, car le ramassage des fraises se fait au noir, même si c'est en plein jour.

 

Et tout le monde se met à cavaler, sauf les morts bien évidemment, dans tous les sens ou les uns après les autres, l'inspecteur Schifano à leurs trousses, courant après un os dont il ne connait même pas la forme, l'origine, le pourquoi du comment, s'emmêlant dans des suppositions et en arrivant toutefois au but comme la tortue poursuivant des lièvres véloces.

 

Le lieu où se déroule l'action n'est pas précisé. Seulement que ce n'est pas très loin de la mer. Cela importe peu à l'auteur et au lecteur par voie de conséquence. C'est l'action qui prime, partant dans tous les sens, se rejoignant enfin dans un final quasi moral.

De tous ces personnages qui courent à perdre haleine dans une intrigue diaboliquement ficelée, Angelo est balloté dans une histoire à laquelle il ne comprend rien. Il a six ans, est mutique, comme s'il était autiste. Il est vrai qu'il n'a pas son mot à dire dans ce méli-mélo d'adultes, pourtant il en est également une victime. Heureusement des grandes personnes vont veiller sur lui, car lui aussi risque sa vie alors que le pauvre n'a rien demandé, pas même à manger des fraises.

Jacques Bablon, utilise son stylo (c'est une figure de style) comme le boucher son couteau à parer la viande. Un désosseur ça s'appelle parait-il. Et Jacques Bablon dégraisse, dénerve, pare son texte pour ne lui en laisser que les morceaux choisis. Et malgré tout c'est nerveux comme écriture, c'est rapide, c'est sec, et une fois fini, le lecteur se rend compte qu'il vient de savourer un roman bien ficelé, juteux à souhait, pas trop cuit, un peu saignant même. Une belle présentation pour un repas de lecture qui se clôturera comme il se doit par une poignée de fraises bien juteuses.

 

A lire également de Jacques Bablon : Trait bleu

Jacques BABLON : Rouge écarlate. Polar Jigal. Editions Jigal. Parution 15 février 2016. 192 pages. 17,50€.

Partager cet article
Repost0

commentaires

P
Salut Oncle Paul, très très bientôt en lecture. Amitiés
Répondre
O
Bonjour Pierre,<br /> et j'espère que tu prendras autant de plaisir que moi à sa lecture<br /> Amitiés
A
Ce n'est pas encore la saison, pourtant !
Répondre
O
Plus ça va, plus ça se rapproche... Et la vraie saison est si courte !

Présentation

  • : Lectures de l'Oncle Paul
  • : Bienvenue dans la petite revue de la littérature populaire d'avant-hier et d'hier. Chroniques de livres, portraits et entretiens, descriptions de personnages et de collections, de quoi ravir tout amateur curieux de cette forme littéraire parfois délaissée, à tort. Ce tableau a été réalisé par mon ami Roland Sadaune, artiste peintre, romancier, nouvelliste et cinéphile averti. Un grand merci à lui !
  • Contact

Recherche

Sites et bons coins remarquables