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25 juillet 2015 6 25 /07 /juillet /2015 15:06

Un roman de Léo Malet piraté !

Léo MALET : Alerte !

Les éditions Bel-Air ne manquaient pas... d'Air justement.

Au bas de la page 6, là où figurent les habituelles mises en garde des éditeurs concernant les copyrights, voici ce que le lecteur peut lire :

Copyright. 1964 Editions Bel-Air Paris. Tous droits réservés pour tous les pays, y compris l'URSS et les pays scandinaves. Reproduction et traduction même partielles interdites.

Seulement cette mise en garde, les éditions Bel-Air ont omis de l'appliquer à elles-mêmes.

En effet Alerte ! est la réédition non signalée de L'ombre du grand mur de Léo Malet (dont le nom figure uniquement page5 et sur la tranche de la couverture mais non sur la couverture elle-même), roman publié pour la première fois en 1944 aux éditions S.E.P.E. dans la collection Le Bandeau Noir puis réimprimé en 1949. Il sera réédité à de nombres reprises, notamment aux éditions Métal en 1955, Eurédif dans la collection Suspense en 1972, Marabout en 1979, Fleuve Noir, 10/18...

A noter que certaines éditions, dont les éditions Métal, donnent comme titre : A l'ombre du grand mur.

Léo MALET : Alerte !

Cette édition Bel-Air est légèrement amputée et remaniée par rapport à l'édition originale. Notamment l'avant-propos qui est purement et simplement passé à la trappe. Pourtant il est intéressant puisque référence à Nestor Burma est faite. Voyons les premières phrases :

Le récit que l'on va lire a été remis par le détenu 9204, de la célèbre prison d'Ossining, une des trois principales maisons de force de l'état de New-York, celle où ont lieu les exécutions, à mon ami Nestor Burma, alors que celui-ci, peu de mois avant la guerre, accomplissait en Amérique un banal voyage d'études.

Suit ensuite la description des intentions de Nestor Burma quant à ce récit et celles de Léo Malet.

Penchons-nous maintenant sur les premières lignes du récit afin de se rendre compte des modifications effectuées par l'éditeur par rapport à l'édition originelle :

 

Version originelle !

Le docteur était un personnage assez gros, d'aspect bonasse. Le rasoir n'entrait que rarement en contact avec son épiderme. Il était vêtu sans recherche, et plutôt pauvrement.

- Où avez-vous fait vos études ? dit-il.

Son regard perçant plongea au plus profond de mes yeux.

- Boston, fis-je.

- Fichtre, siffla le docteur.

 

Version Alerte !

Le docteur était un personnage assez corpulent, d'aspect bonasse. Le rasoir n'entrait que rarement en contact avec son épiderme. Il était vêtu sans recherche, et plutôt pauvrement.

- Où avez-vous fait vos études ? dit-il.

Son regard perçant plongea au plus profond de mes yeux.

Je citai le nom d'une école célèbre.

- Fichtre, siffla le docteur.

 

Peu de divergences mais quelques libertés avec le texte initial, qui ne prêtent guère à conséquence, pouvant même laisser penser que Léo Malet a retravaillé sa prose.

Mais intéressons-nous à l'histoire et du personnage central, le docteur Lewis Ted Crawford.

 

Après trois années passées au pénitencier d'Ossining, condamné pour un meurtre qu'il n'a pas commis, Crawford est enfin libéré. S'il a été soupçonné d'avoir assassiné une jeune femme, les témoignages lors du procès se sont effrités. Un bouton de manchette lui appartenant a été retrouvé sous une carpette de la salle de bain. La domestique pense l'avoir reconnu sortant de chez la jeune femme, de même qu'un policier à qui il aurait demandé du feu non loin de l'appartement tragique.

Pourtant Crawford possédait un alibi : au moment du drame, il était avec sa maîtresse, la femme d'un politicien qui brigue la mairie de New-York. Par galanterie, il a préféré se taire, et comme son amante ne l'a pas soutenu, il en a payé les pots cassés.

En sortant de prison il ne sait plus trop où aller. Ses amis lui tournent le dos, alors il se souvient qu'un codétenu lui a donné l'adresse d'une amie auprès de laquelle il pourrait se réfugier. Celle-ci l'accepte sans poser véritablement de questions mais sait qu'il était toubib. Or justement un appel téléphonique lui demande de contacter un docteur afin de soigner un blessé. L'homme a reçu une balle et le toubib habituel est introuvable, sous l'emprise de l'alcool. Crawford accepte de le remplacer et s'est ainsi qu'il va devenir le monsieur bons soins d'un gang. Suivent des aventures, des règlements de comptes entre gangs, et Crawford qui a changé d'identité s'intègrera dans la bande, sans participer activement aux démêlés mais prodiguant ses conseils.

 

Evidemment Léo Malet a construit une histoire classique d'un homme traîné en justice alors qu'il est innocent mais ne peut justement prouver qu'il n'est pas coupable, d'une guerre des gangs et la participation en sous-main d'un politicien véreux. Tout ça à cause d'une femme qui a préféré rester dans l'ombre, puis la chute inéluctable vers le crime à cause de la défection de ses amis lors de sa libération.

Crawford pourtant s'était juré de ne jamais retourner à L'Ombre du grand mur.

Léo MALET : Alerte !
Léo MALET : Alerte !

Léo MALET : Alerte ! Editions Bel-Air. Collection Détective Pocket N°48. Parution 1964. 160 pages.

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commentaires

Y
Salut Paul, je partage ton avis sur les pavés de 500 pages et plus, un peu de simplicité ne nuit pas au contraire, mais c'est sans doute un exercice plus difficile qu'il n'y paraît, la simplicité demande du travail. De Léo Malet, je n'ai pas beaucoup lu de Nestor Burma, mais par contre, j'ai lu les Johnny Metal, qui doivent traîner au fond de ma bibliothèque derrière des polars plus récents. A dépoussiérer, histoire de se remettre à lire Léo Malet.<br /> Amicalement,
Répondre
O
Bonjour Yv<br /> J'avoue m'ennuyer la plupart du temps à la lecture de ces pavés, et d'ailleurs j'en possède quelques-uns que je n'ai pas terminés et donc que je ne chroniquerai pas. Dommage, mais comme tu dis la concision est un art difficile. <br /> La série des Johnny Métal et autres Malet sous pseudonymes réédités chez NEO c'était sympa.<br /> Amitiés
J
hello Oncle Paul, merci de me faire découvrir ce bouquin de Malet, sous sa propre signature en plus, et les aléas des maisons d'éditions de l'époque ainsi que leur système de corrections sont tout aussi intéressant. Rien qu'en lisant les premières lignes on retrouve sa patte et son style inimitable et sa maitrise parfaite de l'écriture "le rasoir n'entrait que rarement..." alors que n'importe qui aurait mis " On voyait que le rasoir n'entrait que..." sans oser jeter directement la phrase, c'est admirable, et cela prouve encore que Malet reste un de nos plus grand écrivain populaire.<br /> JOB
Répondre
O
Bonjour JOB<br /> Guerber, qui dirigeait Les éditions Bel-Air, Baudelaire, Moulin Noir et d'autres, était un habitué de ce système de piratage. D'ailleurs Léo Malet lui avait intenté un procès lors de la réédition de 120 rue de la gare me semble-t-il. <br /> Quant au style Léo Malet, oui il est reconnaissable, direct, sans fioritures inutiles, et certains romanciers actuels qui pondent des pavés de 500 pages et plus, devraient s'en inspirer. Mais ce n'est que mon avis.<br /> Bonne continuation et peut-être à bientôt<br /> Amicalement

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